6. Indicateurs biologiques des landes humides et des tourbières
-Télécharger le Tome 2 complet-
– Télécharger le Tome 4 complet –
– Télécharger le Tome 6 complet –
6.1 Végétation des tourbières et bas-marais acidiphiles
Rédaction : Kévin Romeyer
Contribution : Grégory Caze
Les communautés végétales de tourbières et bas-marais acidiphiles trouvent leur optimum dans les régions froides (boréaux-montagnardes) où la décomposition de matière organique en condition anaérobie est fortement réduite.
Carte de répartition de Trichophorum cespitosum, espèce caractéristique des tourbières, en France (FCBN, 2016)
De ce fait elles sont intéressantes à suivre en lien avec le changement climatique car particulièrement sensibles à des épisodes de sécheresses et de canicules plus intenses . Les tourbières forment ainsi des reliques glaciaires en Nouvelle-Aquitaine. Les végétations qui les composent sont adaptées à un engorgement régulier par des eaux pauvres en nutriments et acides. Ces contraintes permettent le développement d’une flore particulière avec de nombreuses espèces patrimoniales au niveau régional (Menyanthes trifoliata, Narthecium ossifragum, Parnassia palustris, Sphagnum magellanicum) et national (Rhyncospora fusca, Drosera rotundifolia, Lycopodiella inundata). Dans le contexte du changement climatique avec des modifications de régime hydrique (en baisse ou saisonnalité plus marquée de la pluviosité, augmentation de l’évapotranspiration, abaissement des nappes), les végétations de tourbières pourraient disparaître ou se raréfier au profit de végétations de landes et fourrés et/ou de communautés moins oligotrophiles .
Pour identifier et mesurer les effets du changement climatique sur les communautés végétales de tourbières et bas-marais acidiphiles, l’objectif est de suivre dans le temps et dans l’espace :
1- leur structure (types biologiques dominants, hauteur, recouvrement) ;
2- leur composition floristique (diversité spécifique, cortèges indicateurs, fréquence relative des espèces, spectre chorologique).
Séléction des sites
En plaine de la région Nouvelle-Aquitaine, les habitats de tourbières et bas-marais acidiphiles sont peu fréquents et très fragmentés, ils se cantonnent aux dépressions sur sables acides du plateau landais et dans quelques secteurs de Dordogne et des Charentes. De plus, ils occupent rarement des surfaces importantes (supérieures à 0,5 ha) et bien exprimés floristiquement et fonctionnellement. En se rapprochant des zones sous influences boréo-montagnardes de la région, en Limousin et Pyrénées-Atlantiques, ces habitats deviennent plus fréquents et mieux exprimés. Ils demeurent toutefois en limite d’aire méridionale de répartition et forment également des habitats sensibles aux évolutions climatiques annoncées .
Situation géographique des zones d’expression des communautés végétales de tourbières et bas-marais acidiphiles en Nouvelle-Aquitaine
L’identification des sites de suivi favorables s’appuie d’abord sur la présence de la flore caractéristique des hauts et bas-marais relevant de l’Oxycocco palustris – Ericion tetralicis Nordh. ex Tüxen 1937, du Rhynchosporion albae W. Koch 1926, du Caricion fuscae W. Koch 1926 ou de l’Hydrocotylo vulgaris – Schoenion nigricantis B. Foucault 2008 renseignées dans l’Observatoire de la Biodiversité Végétale de Nouvelle-Aquitaine (OBV atlas en ligne) d’une part et les connaissances et prospections de partenaires/gestionnaires et l’étude de la bibliographie d’autre part.
Ensuite, l’utilisation d’indices d’état ont permis de sélectionner les habitats les plus favorables, c’est-à-dire dans un bon état de conservation. Ces indices sont les suivants :
– surface d’habitat, basée sur l’aire d’expression optimale des communautés (0,5 à 1 ha pour les tourbières) en excluant les linéaires de faible largeur (inférieure à 70 m) ;
– occupation par les espèces typiques (Eriophorum , Sphagnum sp., Narthecium ossifragum, Erica tetralix, Rhyncospora sp., Drosera sp.) ;
– recouvrement par les sphaignes, notamment les espèces hygrophiles et ombro-hygrophiles (ex : Sphagnum magellanicum) ;
– fermeture limitée du milieu, basée sur la fréquence relative et le recouvrement d’espèces de landes et de stades dynamiques ultérieurs (ex : Erica scoparia, Frangula alnus, Salix atrocinerea, Betula pubescens) ;
– gestion homogène dans le temps et dans l’espace ;
– limitation des perturbations : drains, eutrophisation, surpâturage, etc.
L’existence préalable d’un réseau de sites de suivi des communautés végétales de tourbières dans l’ex-région Aquitaine pour l’évaluation des HIC, reposant sur des méthodes et indicateurs compatibles (structure, composition floristique et taux de recouvrement de chaque communauté végétale) avec ceux exposés ici , permet de mutualiser une partie des dispositifs mis en place et de bénéficier de données historiques sur ces communautés depuis 2014. Ainsi, 14 dispositifs de suivi ont été matérialisés en 2014 sur 7 sites différents, répartis essentiellement sur le plateau landais (Gironde et Landes).
D’autre part, dans le cadre de l’OPCC2 (Observatoire Pyrénéen du Changement Climatique) et du POCTEFA 2014-2020 (Programme opérationnel de coopération territoriale Espagne, France, Andorre), les tourbières de la chaîne pyrénéenne font l’objet d’un suivi par rapport aux impacts du changement climatique. Un renforcement des suivis de tourbières en montagne à travers le programme les sentinelles du climat apportera une synergie des données collectées entre programmes. En plus, cela apparaît complémentaire avec le réseau de suivis développé en plaine sur ces mêmes habitats, apportant un gradient altitudinal et donc climatique très intéressant pour la mesure des phénomènes de résilience floristique et fonctionnelle. Ces végétations originales sont assez bien représentées dans le département des Pyrénées-Atlantiques. La mise en place de suivis de ces végétations à fort intérêt patrimonial se heurte toutefois à un inconvénient majeur dans ce département : la difficulté de trouver des sites en bon état de conservation et non ou peu pâturés (L. Olicard – CBNPMP, com. pers.). Cela représente une condition essentielle afin de mesurer la réponse de la végétation aux impacts spécifiques du changement climatique et non ceux du pâturage.
Etant donné le faible nombre de site potentiels pour la mise en place de suivis à long terme, notamment en plaine, la sélection s’est d’abord orientée sur les sites les plus favorables avec une répartition représentative à l’échelle de la région et en tenant compte du gradient altitudinal ou d’influences boréo-montagnardes La comparaison des conditions climatiques et de la réponse des communautés végétales entre sites sous différentes influences sera intéressante pour évaluer la résilience de ces habitats dans le contexte du changement climatique
En 2017, 5 sites ont fait l’objet d’une mise en place et d’une lecture dans les ex-régions Aquitaine et Limousin :
Définition et positionnement des points d'échantillonnage
Le suivi de tourbières en lien avec les évolutions climatiques reprend les mêmes principes d’échantillonnage que pour l’évaluation de l’état de conservation dans le cadre du suivi des HIC pour Natura 2000 .
Pour ces milieux, associant généralement des végétations liées à différents niveaux topographiques, la méthode de suivi s’appuie sur un système de transect, avec plusieurs quadrats de fréquence de 1 m de côté disposés le long de celui-ci.
La longueur et le positionnement des transects dépendent des conditions écologiques et de la surface occupée par les végétations à suivre sur chacun des sites. Un transect pourra ainsi être sécant par rapport au suintement ou au cours d’eau. Les deux extrémités du transect sont géolocalisées par GPS , et matérialisées par l’installation de piquets en bois (ex : robinier). Le temps de la lecture, le transect est matérialisé par un décamètre reliant les piquets permanents et les éventuels piquets temporaires :
Exemple de positionnement de transect et quadrats sur un site de tourbière
Le positionnement des quadrats de fréquence doit se faire le long du transect à intervalles réguliers dans le cas de végétations assez bien cloisonnées, ou définis par l’observateur dans le cas de végétations imbriquées liées à une topographie irrégulière afin de garantir une homogénéité floristico-écologique à l’échelle du quadrat. Les mêmes intervalles doivent être respectés entre chaque lecture.
La durée de mise en place et de relocalisation des quadrats et transects sur un site est estimée autour de 30 minutes. La durée de lecture du transect n’est pas limitée, elle dépend du nombre de quadrats et peut être estimée entre 15 et 20 minutes par quadrat.
Les caractéristiques de l’ensemble des dispositifs mis en place sur les sites de tourbières et bas-marais sont présentées ci-après. Ce tableau synthétise, par site, le code du suivi utilisé, les types et nombre de dispositifs et leur longueur respective :
Caractéristiques des dispositifs de suivi de tourbières et bas-marais par site
Le site du Petit étang de Biscarrosse a fait l’objet d’une mise en place de suivi en 2014 avec une première lecture mais n’a pas été relu en 2017 faute de temps.
Méthodes de relevés et détermination des espèces et des communautés végétales
Le protocole de suivi des tourbières et bas-marais dépend de l’échelle spatiale considérée et du type de dispositif en place.
A l’échelle du transect, l’objectif est de mesurer l’évolution des végétations en réponse à des changements du niveau hydrique. Le long de ce transect, les différentes végétations sont notées avec éventuellement des relevés phytosociologiques au sein de chacune. Afin de proportionner les différentes communautés et rendre compte de leur organisation spatiale sur le site, un coefficient de recouvrement ainsi qu’un indice d’agrégation (isolé, plus ou moins fragmenté, étendu) peuvent être associés à chacune d’elle. En plus, pour conserver une vision physionomique du site, et aider dans l’interprétation des données et dans la relocalisation des dispositifs, des photos avec prises de vue du départ, de l’arrivée et si possible de l’ensemble du transect sont réalisées, ainsi que pour chaque communauté observée.
A l’échelle du quadrat de fréquence (1 m de côté), le but est de suivre l’évolution de la structure et de la composition floristique de la communauté à un niveau fin de précision. Pour cela, le quadrat de fréquence est subdivisé en 16 quadrats élémentaires de 25 cm de côté dont 8 qui sont lus :
Un relevé exhaustif de la flore est réalisé en présence/absence au sein de chacun des quadrats élémentaires avec notation de la hauteur moyenne et du recouvrement des différentes strates présentes. En plus, un relevé complémentaire est réalisé, également en présence/absence, à l’échelle du quadrat de fréquence pour noter les espèces non contactées dans les 8 quadrats élémentaires. Cette méthode présente l’avantage de pouvoir s’abstenir d’une estimation des coefficients de recouvrement, une variable sujette au biais d’interprétation des données engendré par la diversité des observateurs et empêchant la détection de changements subtils dans la composition floristique du tapis végétal étudié. Des photos de chaque quadrat, dans l’ordre de lecture, doivent être réalisées.
La détermination des espèces végétales non-identifiées peut s’effectuer directement sur le terrain à l’aide d’une flore et d’une loupe (x10 minimum). Dans le cas de critères délicats à appréhender in situ (ex : Sphaignes), l’identification se fera ultérieurement en laboratoire, avec un matériel adéquat (loupe binoculaire, microscope, etc.), sur des échantillons prélevés hors de la zone d’étude. Concernant les espèces rares ou protégées, la détermination devra se faire soit en laboratoire sur la base de photos prises sur site, soit in situ sans prélèvement.
Pour l’étude des tourbières et bas-marais, le champ d’investigation taxonomique concerne les spermatophytes et ptéridophytes mais aussi les sphaignes, les autres bryophytes et lichens sont exclus car trop complexes à appréhender. Le référentiel taxonomique suivi est la version la plus récente de TaxRef (actuellement version 9, ).
Les flores utilisées sont diverses :
– Flora Gallica ,
– Flore de Dordogne ,
– Flore du Pays Basque et des régions limitrophes ,
– Flore descriptive et illustrée de la France, de la Corse et des contrées limitrophes (Tomes 1 à 3) ,
– Les fougères et plantes alliées de France et d’Europe occidentale ,
– Handbook of European Sphagna ,
– Mosses and liverworts of Britain and Ireland .
Le référentiel syntaxonomique des végétations utilisé est celui du CBNSA, version du 19/09/2017 . Afin de maintenir de la clarté dans la lecture, les autorités des syntaxons cités ne seront notées que lors de la première mention (ex : Juncion acutiflori Braun-Blanq. in Braun-Blanq. & Tüxen 1952 puis Juncion acutiflori).
Pour la mise en place et la lecture d’une placette de tourbières, le matériel requis est le suivant :
– 2 ou 3 piquets en bois fendu imputrescible (ex : robinier) pour transect ;
– tiges en métal (acier ou inox) pour quadrats de fréquence (en cas d’absence de transect) ;
– appareil GPS (GPS submétrique si possible) ;
– piquets fins en bois (8 minimum) ;
– corde tressée ou rubalise (120 m minimum) ;
– détecteur de champs magnétiques ;
– marteau et masse ;
– quadrat en bois ou PVC (1m de côté) ;
Photo du quadrat de fréquence de tourbières et bas-marais (1 m de côté)
– décamètre (50 m) ;
– appareil de visée ;
– boussole ;
– appareil photo.
Période optimale de suivi
Les tourbières et bas-marais de Nouvelle-Aquitaine connaissent leur optimum phénologique entre début juillet et mi-septembre ; c’est-à-dire la période durant laquelle la majorité du cortège floristique est au stade de floraison. Afin de noter et pouvoir identifier le maximum d’espèces, les inventaires et suivis doivent s’effectuer durant cette période . En 2017, les dates de suivi se sont étalées du 8 août au 5 octobre.
Nombre de campagne de relevés
Une seule campagne de relevés est réalisée pour chaque année de suivi. En effet, la quasi-totalité du cortège floristique étant observable dans le cas d’une lecture pendant la période phénologique optimale (obs. CBNSA), la réalisation de plusieurs campagnes n’offre qu’un intérêt limité.
Ces végétations étant assez stables sans perturbations anthropiques mais pouvant être relativement dynamiques dans le cas d’un changement de conditions de gestion ou de régime hydrique, le délai entre chaque campagne de suivi est fixé à 3 ans, soit 2017 et 2020. Pour les sites complémentaires identifiés et matérialisés en 2018, le délai est ramené à 2 ans (2018 et 2020) pour permettre une lecture synchrone des dispositifs. En fonction des premières analyses et retours d’expérience, ce délai pourra être rehaussé. En effet, les impacts du changement climatique sur cet habitat intervenant à une échelle de temps bien plus large, des suivis trop rapprochés ont peu d’intérêt.
Fiche de relevé
Pour le suivi de ces habitats, la fiche de relevés compile les informations relatives aux :
– métadonnées et informations générales ;
– pressions et menaces ;
– variables descriptives (maturité, espèces sociales, tourbe) ;
– géolocalisation des dispositifs ;
– quadrats de fréquence.
Discussion
Les protocoles énoncés semblent assez précis et adaptés pour répondre à la problématique de l’évolution des communautés par rapport au changement climatique car ils intègrent plusieurs échelles spatiales (quadrats de fréquence et transect) permettant la détection de variations floristiques et structurales au sein de ces communautés liées à la modification de l’engorgement et aux changements de régime hydrique (quantité de précipitations, alimentation en eau).
6.2 Végétation des landes humides
Rédaction : Kévin Romeyer,
Contribution : Grégory Caze
Les communautés végétales de landes humides et tourbeuses atlantiques sont liées à des précipitations assez importantes (supérieures à 900 mm/an) sur des sols acides et pauvres en nutriments, et adaptées à un engorgement plus ou moins régulier par des eaux oligotrophes limitant la minéralisation de la matière organique . Ces contraintes permettent le développement d’une flore particulière avec de nombreuses espèces patrimoniales au niveau régional et national (Gentiana pneumonanthe, Sphagnum magellanicum, Drosera rotundifolia, Genista anglica). Du fait de ces caractéristiques phyto-écologiques, elles semblent particulièrement sensibles à des épisodes de sécheresses et de canicules plus intenses . Dans le contexte du changement climatique, ces végétations pourraient se fragmenter davantage ou se raréfier au profit de végétations de landes plus sèches et de communautés moins oligotrophiles.
Pour identifier et mesurer les effets du changement climatique sur les communautés végétales de landes humides, l’objectif est de suivre dans le temps et dans l’espace :
1- leur structure (types biologiques dominants, hauteur, recouvrement) ;
2- leur composition floristique (diversité spécifique, cortèges indicateurs, fréquence relative des espèces, spectre chorologique).
Sélection des sites
Les habitats landicoles humides sont assez bien représentés au niveau de la région Nouvelle-Aquitaine et sont surtout concentrés sur les substrats acides et pauvres en nutriments du plateau landais, de la Double landaise et de l’ex-région Limousin, et dans quelques secteurs en Dordogne, Vienne et Pyrénées-Atlantiques. Néanmoins, ils occupent rarement des surfaces importantes (supérieures à 0,5 ha), hormis dans les zones où la gestion permet leur maintien (camps militaires de Souge et de Captieux, barthes de l’Adour etc.) (obs. CBNSA). Les landes humides se retrouvent essentiellement en linéaires le long de crastes, de lisières forestières et de pistes.
Situation géographique des zones d’expression des communautés végétales de landes humides en Nouvelle-Aquitaine
L’identification des sites de suivi favorables s’appuie d’abord sur la présence de la flore caractéristique des landes humides et tourbeuses relevant de l’Ulici minoris – Ericenion ciliaris (Géhu 1975) et de l’Oxycocco palustris – Ericion tetralicis renseignées dans l’Observatoire de la Biodiversité Végétale de Nouvelle-Aquitaine (OBV) d’une part et les connaissances et prospections de partenaires/gestionnaires d’autre part. L’étude de la bibliographie a permis de tenir compte de la variabilité et de la répartition des communautés végétales de landes. Par ailleurs, très sensibles aux changements de régime hydrique (drainage, abaissement de la nappe) ou de pratiques de gestion (absence de débroussaillage régulier) et à l’eutrophisation, les landes humides sont en forte régression ces dernières années, dont certaines de manières irréversibles . Une attention particulière est apportée à l’absence ou l’impact réduit de ces facteurs de modifications pour isoler au mieux le facteur climatique par rapport au suivi.
L’utilisation d’indices d’état permet alors de sélectionner les habitats et les sites les plus favorables, c’est-à-dire en bon état de conservation. Ces indices sont les suivants :
– surface d’habitat minimum, basée sur l’aire d’expression optimale des communautés (2 à 4 ha pour les landes en excluant les linéaires de faible largeur (inférieure à 50m) ;
– occupation majeure par les espèces typiques (Erica ciliaris, Ulex minor, Calluna vulgaris, Erica tetralix, Molinia caerulea, Genista anglica) ;
– présence si possible d’espèces psychrophiles d’affinités boréo-montagnardes (Sphagnum magellanicum, Lycopodium clavatum) ;
– fermeture du milieu faible, basée sur la fréquence relative et le recouvrement d’espèces de fourrés (ex : Erica scoparia, Frangula alnus, Salix atrocinerea, Betula pubescens) ;
– gestion homogène dans le temps et dans l’espace ;
– absence ou limitation des perturbations : drains, plantations, eutrophisation, gyrobroyages fréquents, etc.
L’existence préalable d’un réseau de sites de suivi des communautés végétales de landes humides en ex-région Aquitaine (Annexe 15) pour l’évaluation des HIC, reposant sur des méthodes et paramètres d’étude compatibles avec ceux exposés ici , permet de mutualiser une partie des dispositifs mis en place et de bénéficier de données historiques sur ces communautés.
La sélection de nouveaux sites avec une répartition représentative des systèmes landicoles humides à l’échelle de la région est primordiale pour l’étude de ces habitats dans le contexte du changement climatique. En effet, le mésoclimat peut être très différent selon les secteurs régionaux (Données AURELHY par Météo France). Cela devrait permettre de détecter des variations de cortèges (ex : perte d’espèces psychrophiles, développement d’espèces plus mésophiles et/ou plus mésotrophiles voire thermophiles) dans les différentes zones suivies et ainsi définir les plus sensibles.
En 2017, 8 sites de landes humides ont fait l’objet d’une mise en place et d’une lecture des dispositifs de suivi des communautés végétales dans les ex-régions Aquitaine et Limousin.
Situation géographique des sites de suivi de communautés végétales de landes humides
Définition et positionnement des points d'échantillonnage
Le suivi des landes humides en lien avec les évolutions climatiques reprend les mêmes principes d’échantillonnage que pour l’évaluation de l’état de conservation dans le cadre du suivi des HIC pour Natura 2000 .
Pour ces milieux topographiquement homogènes, un système d’échelles emboîtées est utilisé car permettant des analyses complémentaires et une vision représentative du site d’un point de vue floristique et dynamique :
– échelle du site ;
– échelle du complexe landicole par un quadrat paysager de 25 m de côté ;
– échelle de la communauté végétale par un quadrat de fréquence de 7 m de côté.
Les données à l’échelle du site peuvent être obtenues via photographies aériennes (couleurs normales et infra-rouge) et ne nécessitent pas d’instrumentalisation sur le site.
La surface de 625 m² du quadrat paysager semble être le meilleur compromis pour apprécier la mosaïque des communautés végétales sans pour autant être trop grande et empêcher l’observateur d’avoir une vision complète de la zone.
Le positionnement du quadrat paysager est défini après visite des sites et identification des zones où l’habitat de lande humide est bien représenté et estimé en bon état de conservation. Il est placé de sorte à avoir un aperçu des végétations en dynamique et en contact avec les landes. Son géoréférencement est déterminé sur le terrain avec un GPS submétrique par les coordonnées de ses 4 sommets. Le temps de la lecture, le quadrat est matérialisé par des piquets temporaires aux 4 sommets et reliés par une rubalise ou un décamètre.
L’aire minimale pour l’étude des landes basses (inférieures à 1 m) étant estimée entre de 30 et 100 m² , la surface de 49 m² du quadrat de fréquence apparaît adéquate étant donné l’utilisation complémentaire du quadrat paysager.
Le positionnement de ce quadrat se fait à l’intérieur du quadrat paysager dans une zone où la communauté de lande est bien exprimée. Pour simplifier et limiter les erreurs lors de prochaines lectures, le quadrat est orienté au nord. Son géoréférencement est déterminé sur le terrain par les coordonnées de ses 4 sommets. Dans l’objectif d’un suivi à moyen/long terme (plusieurs décennies) et afin d’assurer la relocalisation précise et la pérennité du dispositif, le quadrat de fréquence est délimité à ses sommets par 4 tiges métalliques (acier ou inox) enterrées et affleurant à la surface du sol. Un détecteur de champs magnétiques est nécessaire pour retrouver la position des tiges. Lorsque cela est possible, des mesures de distances et de cap à la boussole sont notées par rapport à des repères fixes qui ne risquent pas de bouger avant la prochaine lecture. Le temps de la lecture, le quadrat est matérialisé par des piquets temporaires aux 4 sommets et reliés par une corde graduée ou un décamètre.
La durée de mise en place et de relocalisation des quadrats sur un site est estimée autour de 30 minutes. La durée de lecture des 2 types de quadrat n’est pas limitée et peut être estimée autour de 3h.
Les caractéristiques de l’ensemble des dispositifs mis en place sur les sites de landes humides sont présentées ci-après. Ce tableau synthétise, par site, le code du suivi utilisé, les types de quadrats et leur surface respective :
Caractéristiques des dispositifs de suivi de landes humides par site
Méthodes de relevés et détermination des espèces et des communautés végétales
A l’échelle du quadrat paysager (voir figure ci-dessous), le but est de suivre l’évolution du complexe landicole et la dynamique de végétation. Pour mener ce travail, la phytosociologie sigmatiste est retenue car basée sur une démarche rigoureuse et éprouvée. La démarche de réalisation de relevés phytosociologiques est explicitée plus haut.
Schéma de l’organisation spatiale des communautés végétales au sein d’un quadrat paysager de landes humides
D’autre part, la phytosociologie paysagère ou symphytosociologie est utilisée afin de lister et proportionner les différentes communautés au sein du quadrat .
En plus, des photos avec des prises de vue en grand angle depuis les quatre coins du quadrat, figurant eux-mêmes sur l’image, doivent être réalisées afin de conserver une vision physionomique du site et des communautés végétales, et aider dans l’interprétation des données.
A l’échelle du quadrat de fréquence de lande (7m de côté), le but est de suivre l’évolution de la structure et de la composition de la communauté à un niveau fin de précision. Pour cela, le quadrat de fréquence est subdivisé en 9 quadrats élémentaires de 1m de côté.
Schéma d’organisation des quadrats élémentaires au sein du quadrat de fréquence de landes humides
Un relevé exhaustif de la flore est réalisé en présence/absence au sein de chacun des quadrats élémentaires avec notation de la hauteur moyenne et du recouvrement des différentes strates présentes. En plus, un relevé complémentaire est réalisé, également en présence/absence, à l’échelle du quadrat de fréquence pour noter les espèces non contactées dans les 9 quadrats élémentaires. Cette méthode présente l’avantage de pouvoir s’abstenir d’une estimation des coefficients de recouvrement, une variable sujette au biais d’interprétation des données engendré par la diversité des observateurs et empêchant la détection de changements subtils dans la composition floristique du tapis végétal étudié .
En plus, des photos avec des prises de vue en grand angle depuis les quatre sommets et les 4 côtés du quadrat, pendant que les dispositifs de lecture sont en place, doivent être réalisées afin de conserver une vision physionomique de la zone suivie, et aider dans la relocalisation des dispositifs.
La détermination des espèces végétales non-identifiées peut s’effectuer directement sur le terrain à l’aide d’une flore et d’une loupe (x10 minimum). Dans le cas de critères délicats à appréhender in situ (ex : Sphaignes), l’identification se fera ultérieurement en laboratoire, avec un matériel adéquat (loupe binoculaire, microscope…), sur des échantillons prélevés hors de la zone d’étude. Concernant les espèces rares ou protégées, la détermination devra se faire autant que possible sur photos ou in situ sans prélèvement.
Pour l’étude des landes et tourbières en Aquitaine, le champ d’investigation taxonomique concerne les spermatophytes et ptéridophytes mais aussi les sphaignes, les autres bryophytes et lichens sont exclus car trop complexes à appréhender. Le référentiel taxonomique suivi est la version la plus récente de TaxRef (actuellement version 9, ).
Les flores utilisées sont diverses :
– Flora Gallica ,
– Flore de Dordogne ,
– Flore du Pays Basque et des régions limitrophes ,
– Flore descriptive et illustrée de la France, de la Corse et des contrées limitrophes (Tomes 1 à 3) ,
– Les fougères et plantes alliées de France et d’Europe occidentale ,
– Handbook of European Sphagna ,
– Mosses and liverworts of Britain and Ireland .
Le référentiel syntaxonomique des végétations utilisé est celui du CBNSA, version du 19/09/2017 . Afin de maintenir de la clarté dans la lecture, les autorités des syntaxons cités ne seront notées que lors de la première mention (ex : Agrostion curtisii Foucault B. 1986 puis Agrostion curtisii).
Pour la mise en place et la lecture d’une placette de landes humides et de tourbières, le matériel requis est le suivant :
– tiges en métal (acier ou inox) pour quadrats de fréquence (4 par quadrats lande) ;
– appareil GPS (GPS submétrique si possible) ;
– piquets fins en bois (8 minimum) ;
– corde tressée ou rubalise (60 m minimum) ;
– détecteur de champs magnétiques ;
– marteau ;
– quadrats en bois (1 m de côté) ;
– décamètre (50 m) ;
– boussole ;
– appareil photo.
Période optimale de suivi
Les landes humides et tourbières d’Aquitaine connaissent leur optimum phénologique entre début juillet et mi-septembre ; c’est-à-dire la période durant laquelle la majorité du cortège floristique est en floraison. Afin de noter et pouvoir identifier le maximum d’espèces, les inventaires et suivis doivent s’effectuer durant cette période comme l’attestent divers travaux sur ces milieux . En 2017, les dates de suivis se sont ainsi étalées entre le 9 août et le 5 octobre.
Nombre de campagne de relevés
Une seule campagne de relevés est réalisée pour chaque année de suivi. En effet, la quasi-totalité du cortège floristique étant observable dans le cas d’une lecture pendant la période phénologique optimale, la réalisation de plusieurs campagnes n’offre qu’un intérêt limité.
Ces végétations étant assez stables sans perturbations anthropiques mais pouvant être relativement dynamiques dans le cas d’un changement de conditions de gestion ou de régime hydrique, le délai entre chaque campagne de suivis est fixé à 3 ans, soit 2017 et 2020. En fonction des premières analyses et retours d’expérience, ce délai pourra être rehaussé. En effet, les impacts du changement climatique sur cet habitat intervenant à une échelle de temps bien plus large, des suivis trop rapprochés ont peu d’intérêt.
Fiches de relevés
Pour le suivi de ces habitats, la fiche de relevés compile les informations relatives aux :
– métadonnées et informations générales,
– pressions et menaces,
– variables descriptives (maturité, espèces sociales, tourbe),
– géolocalisation des dispositifs,
– quadrats de fréquence,
– quadrats paysagers.
Discussion et prespectives de suivi
Les protocoles énoncés semblent assez précis et adaptés pour répondre à la problématique de l’évolution des communautés par rapport au changement climatique car ils intègrent plusieurs échelles spatiales (quadrats de fréquence et paysager) permettant la détection de variations floristiques et structurales au sein de ces communautés liées à la modification de l’engorgement et aux changements de régime hydrique (quantité de précipitations, alimentation en eau).
6.3 Lépidoptères des landes humides
Rédaction : Fanny Mallard, Sandy Bulté
Contribution : Pierre-Yves Gourvil, David Soulet
Face à au changement climatique, les habitats de landes humides pourraient être particulièrement sensibles aux épisodes de sécheresses et de canicules intenses . Ces végétations pourraient se raréfier, voire disparaitre, au profit de végétations de landes plus sèches et de communautés moins oligotrophiles. Comme pour les lépidoptères de pelouses calcicoles, ces changements sont susceptibles d’avoir un impact sur les communautés de lépidoptères dont certaines espèces dépendent de plantes spécifiques appelées plante hôte spécifiques de ces milieux. De plus, l’optimum de développement des espèces inféodées aux landes humides (Coenonympha oedippus, Heteropterus morpheus, Phengaris alcon, etc.) pourrait être influencé par le réchauffement climatique risquant de provoquer des évolutions spatio-temporelles des cortèges. Plusieurs hypothèses peuvent être émises selon les espèces. Soit, les espèces pourraient être capables de s’adapter au nouveau contexte environnemental, soit elles seraient capables de déplacer leur aire de répartition pour suivre les conditions qui leur conviennent ou enfin elles pourraient être sujettes à des disparitions locales par exemple le Fadet des laîches (Coenonympha oedippus).
Ainsi, l’objectif de cette étude est de déterminer les effets spatio-temporels du changement climatique sur les populations de lépidoptères de lande humide et d’identifier, par la suite, différents scénarios de répartition des espèces et de structure des assemblages.
Sélection des sites
Le type de lande humide favorisée est une lande mésohygrophile à molinie et à bruyère Erica tetralix. Cet habitat est choisi pour accueillir potentiellement une espèce endémique, le Fadet des laiches Coenonympha oedippus.
La sélection des sites repose sur la même hypothèse posée pour le cortège de lépidoptères et d’ascalaphes de pelouses calcicoles. Elle s’appuie sur le bon état de conservation des landes humides permettant ainsi de limiter autant que possible l’influence des autres facteurs anthropiques qui pourraient interférer avec la réponse de la biodiversité et ne permettraient pas de dissocier les effets du changement climatique de ces autres pressions. L’état de conservation d’un habitat naturel est considéré comme favorable suivant plusieurs critères : aire de répartition naturelle, surface importante (au minimum possibilité de positionner un transect de 200 m), stable ou en extension (maîtrise foncière et gestion écologique constante), connexion potentielle à d’autres milieux humides, composition homogène en espèces caractéristiques/typiques/rares (peu de présence de fougères), distants au moins de 50 m des activités anthropiques, etc.
La répartition des sites est spatialement équilibrée à travers la région Nouvelle-Aquitaine. En terme pratique, les sites ont un accès facile permettant la réalisation de campagnes de relevés standardisées.
En 2016, une pré-sélection de sites par le CBNSA a permis, au préalable, d’identifier 36 sites de landes humides considérées en bon état de conservation. Cette sélection s’est appuyée sur l’évaluation de l’état de conservation des landes humides d’Aquitaine réalisés dans le cadre du schéma pluriannuel de suivi des habitats d’intérêts communautaires (HIC) de la région Aquitaine mis en place par le CBN Sud-Atlantique . En 2017, de nouvelles prospections ont été réalisées afin de remplacer des sites pour lesquels des difficultés d’accès ont été rencontrées.
Situation géographique des landes humides prospectées pour les suivis lépidoptères
Sur 36 sites de landes humides prospectées en 2016, 13 sites ont été retenus pour répondre aux critères énoncés précédemment. Suite à l’animation foncière réalisée en 2017, le site Lande de Limenut été abandonné dû au refus du propriétaire pour l’accès à la parcelle. Trois sites sont actuellement en suspens pour diverses raisons :
– le camp militaire de Captieux : l’accès, qui est réglementé, n’a pas pu se faire en 2017 en raison d’une indisponibilité des agents de l’ONF qui ont dû faire face à un incendie sur le site, l’accès reste encore à voir ;
– la lande de Gavardies : une partie du site a été gyrobroyée en vue d’une plantation de pins, une proposition d’achat de la parcelle gyrobroyée est actuellement en cours par le CEN Aquitaine ;
– les Barthes de l’Adour : l’animation foncière est en cours.
Situation géographique des sites d’études validés pour le suivi des espèces de lépidoptères de landes humides
Définition et positionnement des points d'échantillonnage
La méthodologie de comptage des lépidoptères est basée sur le programme national du suivi temporel des Rhopalocères de France (STERF) du programme d’observatoires de la biodiversité Vigie-Nature .
Les transects sont parcourus en un temps identique (10 ± 1 min.). La longueur du transect définie en lande humide est de 200 m. Cette longueur est déterminée suivant des données empiriques de 2016 de vitesse de déplacement de comptage des observateurs dans un habitat peu diversifié et selon la longueur minimale disponible d’un type d’habitat homogène.
Selon la surface d’habitat homogène, un à dix transects ont été définis sur chaque site. Les transects, situés sur plateau, sont de forme linéaire adoptant la forme de l’habitat. Ils sont positionnés dans les zones de végétation homogène continue en évitant autant que possible des conditions spécifiques telles qu’une zone de fougères. En landes humides les transect sont situés sur plateau, leur orientation n’a a priori pas d’influence sur le comptage contrairement aux pelouses calcicoles. Les transects sont espacés d’un minimum de 50 m afin d’éviter les doubles comptages, distance de référence d’après le protocole de suivi des lépidoptères des Réserves Naturelles de France . La distance entre les transects et les limites de l’habitat est de 30 à 50 m. Les transects sont matérialisés par des points GPS et ont également été cartographiés. La précision de réalisation du transect se situe entre 3 à 5 m (précision du GPS) selon les conditions météorologiques. Afin de ne pas perturber le cortège sur le transect, le début est déterminé à l’entrée du site.
Un exemple de situation sur photographie aérienne de transects sur la tourbière de Maoucout, site de suivis de lépidoptères de landes humides
Méthode de relevés et détermination des espèces
Pour chacun des transects, tous les rhopalocères (ainsi que les zygènes et les ascalaphes) identifiables à distance sont comptés par un observateur. La limite postérieure d’une boîte virtuelle de 5 m de côté avance avec l’observateur dans le but de standardiser la distance à laquelle les rhopalocères sont comptés. Les comptages dans la boîte sont standardisés et donc comparables au cours du temps . Le protocole d’observation est passif, c’est-à-dire que la végétation n’est pas remuée pour éviter l’effet observateur influençant l’envol d’individus non visibles. La vitesse de déplacement est fixe et de moins de 2 km/h.
Le comptage est effectué au vol avec capture au filet pour les espèces non identifiables. Une liste d’espèces à capturer permet de standardiser la capture des spécimens entre les différents observateurs. Les espèces à détermination délicate concernent 26 espèces d’après une sélection basée sur les critères de validation des données du MNHN et les espèces de lépidoptères présentes en Aquitaine :
Liste des 26 espèces à détermination délicate, nécessitant capture avec ou sans prélèvement
Pour les espèces à détermination rapide (1 à 2 min maximum), le temps du comptage est suspendu. La mise en flacon est effectuée seulement pour les individus non identifiables à l’espèce en moins de 2 min. Leur identification est réalisée à la fin du transect. Dans tous les cas, les individus sont ensuite relâchés sur place pour éviter l’impact de l’échantillonnage sur le site. Les espèces non déterminables par observation sont prélevées et ramenées en laboratoire pour examiner les pièces génitales (genitalia) afin de déterminer précisément l’espèce. Le protocole d’analyse des genitalia est détaillé p118. Le prélèvement est d’un individu par groupe d’espèce à détermination délicate par transect. La technique de morpho-espèce est utilisée afin de limiter au maximum le prélèvement d’individus. Le terme morpho-espèce est un substitut de l’estimation de l’espèce . Si durant les premières années de suivis, l’analyse des genitalia a permis de recenser qu’une seule espèce d’un complexe (par exemple, détermination de L. sinapsis mais aucun L. reali), les prélèvements pourront alors être arrêtés et il sera considéré l’existence d’une seule espèce sur le site. Le tableau suivant précise l’attitude à adopter (capture seule, prélèvement) selon le groupe d’espèces.
Dans le cas d’individus isolés d’espèces non identifiées, l’observateur note l’individu en « indéterminé ». Ce cas sera limité au maximum.
Liste des groupes d’espèces à capturer ou à prélever
Conditions météorologiques requises
Les suivis sont effectués entre 10h et 17h dans les conditions météorologiques suivantes : présence d’une couverture nuageuse d’au maximum 75% et sans pluie ; vent inférieur à 6 sur l’échelle de Beaufort (39 à 49 km/h) ; température d’au moins 13°C pour un temps ensoleillé ou d’au moins 17°C pour un temps nuageux. Les suivis sont réalisés jusqu’à une température maximale de 35°C à l’ombre.
Nombre de campagnes de relevés
Quatre passages par site sont effectués par an et répartis entre mai et août, soit 1 passage par mois. Cette fréquence correspond à l’échantillonnage minimum recommandé par le STERF . Les suivis sont espacés d’au moins 15 jours et sont réalisés d’une année sur l’autre les mêmes semaines jusqu’en 2021, préférentiellement durant les deux premières semaines de chaque mois. Le tableau ci-dessous indique les dates de suivis pour les années 2016 et 2017 :
Dates des suivis 2016 et 2017 du cortège de lépidoptères de landes humides
Fiche de relevés
Le couple site-observateur sera indissociable, c’est-à-dire que le même niveau professionnel d’observation est maintenu jusqu’en 2021. Les relevés sont réalisés par des professionnels expérimentés.
Pour les suivis lépidoptères, chaque observateur note pour chaque transect les heures de comptage de début et fin du transect avec la mention du temps de pause, le nombre d’individus par espèce et les conditions météorologiques de début du transect. La température est mesurée à l’aide d’un thermomètre, l’humidité relative de l’air à l’aide d’un hygromètre, la vitesse du vent est évaluée à l’aide de l’échelle de Beaufort et la couverture nuageuse est estimée en pourcentage de recouvrement.
Pour les suivis phénologiques simplifiés, une liste de plantes nectarifères et de plantes hôtes a été établie par le CBNSA pour les landes humides, cette liste pouvant être, au besoin, complétée sur le terrain. Pour chaque site de suivi lépidoptères, l’observateur identifie le transect bénéficiant du suivi floristique et attribue une classe d’effectif par catégorie phénologique pour chaque plante nectarifère ou plante hôte.
Complément au suivi
Afin de mettre en évidence des variations de réponse du cortège de lépidoptères de landes humides à différentes latitudes, trois sites ont été sélectionnés en ex-Limousin, venant compléter la liste des sites de landes humides existante. Ces trois sites, pour lesquels les suivis débuteront en 2018, sont : Tourbière des Dauges, à St-Léger-la-Montagne ; Grandes landes, à Montrol-Sénard ; Lande de la Flotte et du Cluzeau, à Meuzac.
Situation géographique des sites validés pour les suivis de lépidoptères de landes humides en ex-Limousin
6.4 Azuré des mouillères
Rédaction : Sandy Bulté, Fanny Mallard
Contribution : Pierre-Yves Gourvil, David Soulet
Face au changement climatique, les espèces de lépidoptères associées aux landes humides, comme l’Azuré des mouillères (Phengaris alcon écotype « alcon »), peuvent être sujettes à des disparitions locales.
Phengaris alcon possède un cycle de vie complexe qui dépend à la fois de la présence d’une plante-hôte spécifique, Gentiana pneumonanthe, et de fourmis-hôtes spécifiques Myrmica scabrinodis, M. ruginodis ou M. rubra, qui sont nécessaires au développement de la chenille. L’été, les femelles pondent 50 à 100 œufs répartis sur les boutons floraux de G. pneumonanthe. Il s’agit d’une plante hémicryptophyte, vivace, inféodée aux zones humides : prairies humides et zones marécageuses . Sa floraison est plutôt tardive et s’étale de juillet à octobre (selon sa répartition géographique). Après quelques jours d’incubation, les chenilles sortent de l’œuf et s’enfoncent dans la fleur où elles subissent plusieurs mues. Elles se laissent ensuite tomber au sol où elles sont rapidement adoptées par des fourmis du genre Myrmica. Ainsi, la survie de P. alcon dépend d’un équilibre entre l’évolution de la végétation et de la présence de ses deux hôtes, G. pneumonanthe et fourmis du genre Myrmica.
A travers la modélisation de différents scénarios, Cormont et al. ont étudié les effets du changement climatique sur les populations de G. pneumonanthe et leurs répercussions sur les populations de P. alcon. Ils ont montré que des températures plus élevées, entrainant une détérioration des populations de gentianes, affectaient négativement les populations de P. alcon Ceci témoigne de l’importance des relations qu’il peut exister entre une espèce de lépidoptère et sa plante hôte. Ainsi, une désynchronisation entre la période de vol des imagos et la période de floraison de G. pneumonanthe pourrait également entrainer des impacts sur les populations de P. alcon.
L’hypothèse est que, face à un réchauffement climatique (températures plus élevées au printemps, sécheresses précoces), la floraison de G. pneumonanthe pourrait être décalée et devenir plus précoce d’année en année. Ce décalage serait variable selon la zone géographique et le contexte (montagne/plaine) et entrainerait ainsi des impacts qualitatifs (date de ponte, positionnement des œufs sur la plante hôte) et quantitatifs (nombre d’œufs pondus par les femelles) sur les populations de Phengaris alcon écotype « alcon ».
L’objectif de l’étude est de déterminer les impacts potentiels du changement climatique sur la phénologie de G. pneumonanthe et d’en évaluer les conséquences sur les populations de P. alcon.
Sélection des sites
La sélection des sites est réalisée en fonction de la répartition de Phengaris alcon, de la présence de populations importantes sur des habitats à forte densité de G. pneumonanthe et d’une répartition spatialement équilibrée en ex-Aquitaine. La maitrise foncière est également un élément fondamental à prendre en compte afin d’assurer la pérennité des suivis dans le temps.
La répartition spatiale de P. alcon est limitée à quelques zones en ex-Aquitaine :
Données de présence de M. alcon en Aquitaine
La sélection porte sur les sites qui présentent les plus grandes surfaces, qui sont les moins impactés par la fragmentation et qui ont les plus fortes densités de population de P. alcon. Avec l’extension à la région Nouvelle-Aquitaine, des sites sélectionnés en ex-Limousin viendront par la suite compléter le réseau de sites existants pour les analyses.
En 2016, 6 sites répondant aux critères précédemment énoncés ont été sélectionnés. Une présentation des suivis et une demande d’autorisation d’accès ont été faites auprès des propriétaires et des gestionnaires des sites suivants : Camp militaire de Souge, Aérodrome de Bordeaux-Léognan-Saucats et le camp militaire de Captieux, sites reconnus pour leur importante population de P. alcon.
En 2017, des difficultés d’accès ont été rencontrées sur le camp de Captieux, empêchant la la réalisation des suivis. Suite à des échanges avec les acteurs du territoire dont la Réserve Naturelle Nationale géologique de Saucats-La Brède, ce site a été remplacé par la carrière de Lafarge. Cependant les populations connues de P. alcon et de G. pneumonanthe sont nettement moins importantes que sur le site du camp de Captieux.
En 2017, une animation foncière a également été réalisée sur les sites dont l’accord n’avait pas encore été obtenu en 2016. Suite à des refus de propriétaires pour la réalisation des suivis ou bien à des populations trop dégradées, deux sites ont été remplacés : lande de Limenut à Léognan et la tourbière de Pédestarrés à Louvie-Juzon. Des animations foncières sont actuellement en cours sur les sites de remplacement et vont être réalisées sur des sites favorables découverts en 2017 (Briscous/Hélette, Tardet-Sorholus). Les sites en ex-Limousin viendront également compléter le réseau des sites afin d’augmenter les données recueillies pour les analyses.
Situation géographique des sites d’études pour le suivi de P. alcon et de la G. pneumonanthe
Caractéristiques des sites étudiés dans le cadre du suivi de P. alcon
Définition et positionnement des points d'échantillonnage
Comptage de G. pneumonanthe
En 2016, un relevé des hampes florales de G. pneumonanthe a été réalisé sur les sites suivants : aérodrome de Bordeaux-Léognan-Saucats, Plateau d’Anzé, Ellorimendi. En 2017, ce relevé a été réalisé sur les sites restants : camp militaire de Souge, lande de Pouchau (site potentiel dont l’animation foncière est en cours).
La méthode de recensement des gentianes a consisté à pointer au GPS, avec une précision de 3 m (précision maximale des GPS standard), les hampes florales en parcourant l’ensemble des zones favorables aux gentianes par bande de deux mètres :
Illustration de la méthode de recensement de Gentiana pneumonanthe sur la lande de Pouchau
Afin de réévaluer l’évolution de la répartition spatiale de la gentiane, un recensement est effectué tous les deux ans sur chaque site.
Suivis de G. pneumonanthe et des pontes de P. alcon
Par rapport au suivi des cortèges de lépidoptères, il n’existe pas actuellement de protocole standardisé au niveau national. Plusieurs études ont utilisé la méthode des quadrats dans le cadre du suivi des pontes sur les pieds de G. pneumonanthe. Cette méthode détermine une surface délimitée dans laquelle les comptages des populations sont réalisés.
Deux méthodes de quadrats se dégagent dans la littérature pour étudier le succès de la ponte de P. alcon et le changement de phénologie de G. pneumonanthe . En 2017, ces deux méthodes ont été testées et comparées afin d’établir la méthode la plus adéquate pour continuer les relevés jusqu’en 2021.
Méthode des quadrats permanents
La première méthode utilise des quadrats permanents. Des carrés de 100 m² (10 m x 10 m) sont disposés sur des zones à forte densité de G. pneumonanthe. Le nombre de quadrats à suivre est défini de sorte qu’au moins 20% des gentianes recensées soient échantillonnés. La méthode de sélection des quadrats est la suivante :
– 20% de la totalité des gentianes recensées sur la surface favorable (données de recensement des gentianes) sont calculés ;
– sous SIG, la zone favorable à G. pneumonanthe est quadrillée selon un maillage de 10×10 m orienté nord-sud (maillage généré automatiquement par le logiciel SIG) ;
– pour chaque quadrat de 10×10 m, les gentianes sont dénombrées (d’après les pointages GPS réalisés sur le terrain et retranscrit sous SIG) ;
– une sélection des quadrats où la densité de gentianes est assez élevée (seuil variable selon les sites, ) est réalisée ;
– un tirage aléatoire est effectué parmi les quadrats présélectionnés jusqu’à ce que les 20% de la totalité des gentianes recensées soient atteints.
Les différentes étapes de la méthode de sélection des quadrats pour le suivi de P. alcon et G. pneumonanthe
Cette méthode des quadrats permanents a été testée de façon régulière (plusieurs passages) sur 4 sites en 2017. Pour chacun des sites, les valeurs, correspondantes aux différentes étapes pour la sélection des quadrats, sont indiquées dans le tableau suivant :
Valeurs des différents critères de sélection des quadrats pour le suivi de P. alcon et de G. pneumonanthe
En pratique, les transects sont découpés en sous-transects d’environ 10 m afin d’obtenir une précision de tracé sur le terrain. Les repères des transects sont matérialisés par des piquets en métal enfouis dans le sol et le quadrat de 4m² est un carré disposé au fur et à mesure des relevés le long des transects.
Méthode des transects
La deuxième méthode utilise plusieurs transects disposés sur chaque site d’étude. Les transects sont composés de quadrats continus de 4m² (2m x 2m) sur un transect d’environ 100m (soit 200 m²). Les transects sont orientés nord-sud. De la même manière que la première méthode, le nombre de transects à suivre est défini de sorte qu’au moins 20% des gentianes recensées soient échantillonnés. La méthode de sélection des quadrats est la suivante :
– 20% de la totalité des gentianes recensées sur la surface favorable sont calculés ;
– sous SIG, la zone favorable à G. pneumonanthe est quadrillée selon un maillage de 2×2 m orienté nord-sud (maillage généré automatiquement par le logiciel SIG) ;
– les quadrats 2×2 m sont ensuite fusionnés de sorte à former des transects orientés nord-sud de 2 m de large ;
– pour chaque transect, les gentianes sont dénombrées;
– une sélection des transects où la densité de gentianes est assez élevée (seuil variable selon les sites, ) est ensuite réalisée ;
– un tirage aléatoire est effectué parmi les transects présélectionnés jusqu’à ce que les 20% de la totalité des gentianes recensées soient atteints.
Les différentes étapes de la méthode de sélection des transects pour le suivi de P. alcon et de G. pneumonanthe
Cette méthode des transects a été testée au moins une fois sur 4 sites en 2017. Pour chacun des sites, les valeurs correspondantes aux différentes étapes pour la sélection des transects sont indiquées dans le tableau précédent.
Selon l’évolution spatiale des gentianes, c’est-à-dire la diminution des pieds dans un quadrat en dessous du seuil établi, l’emplacement des transects pourra être ajusté dans la limite des conditions microclimatiques similaires.
Méthode de relevés testées
En 2016, le recensement des gentianes, réalisé sur quatre sites, a permis de localiser les zones à forte et faible densité de gentianes permettant de sélectionner les zones à suivre sur chaque site. En 2017, les deux méthodes ont été testées sur les quatre sites.
Pour chaque quadrat et chaque transect, la phénologie de chaque gentiane est notée ainsi que le nombre d’œufs de P. alcon associé en fonction de leur positionnement sur la plante (bourgeons ou fleurs sans distinction du calice et de la corolle, tige, feuilles).
Chaque quadrat de 100 m² est divisé en quadrats de 4 m² afin de faciliter le comptage des gentianes. L’utilisation de plusieurs quadrats de 4 m² permet d’éviter un éventuel décalage et donc le comptage à plusieurs reprises d’une même gentiane.
Exemple de quadrat 10×10 m matérialisé sur le site de l’aérodrome de Bordeaux-Saucats pour le suivi de P. alcon et G. pneumonanthe
Pour les transects, un ou plusieurs quadrats de 4 m² sont positionnés au fur et à mesure d’un même côté, le long du transect.
Les quadrats de 100 m² et les transects sont matérialisés à l’aide de piquets et de cordes. Les quadrats de 4 m² sont matérialisés à l’aide de cordes, de tasseaux en bois ou de tuyaux en pvc.
Afin d’éviter au maximum la perturbation du milieu, le piétinement est évité le plus possible sur le site en optimisant les relevés sur le terrain.
Exemple de transect matérialisé sur le site de l’aérodrome de Bordeaux-Saucats pour le suivi de P. alcon et de G. pneumonanthe
Le tableau suivant indique pour chaque site et chaque méthode, le nombre de quadrats et transects à échantillonner théoriquement, le nombre de quadrats et transects échantillonnés réellement, le nombre de quadrats et transects échantillonnés régulièrement ainsi que le nombre de gentianes attendu.
Nombre de quadrats et transects à échantillonner théoriquement et échantillonnés réellement en 2017
Le nombre de quadrats et transects à échantillonner théoriquement (20% de la population) est fonction du nombre de gentianes qui ont été recensées sur chaque site. Ce nombre est très variable selon les sites. Plus il est élevé, plus le nombre de quadrats ou de transects à échantillonner sera a priori élevé. De plus, selon la répartition des gentianes sur les sites, le nombre de quadrats et transects sera plus ou moins élevé. Par exemple pour un site où la répartition de gentianes est diffuse, il faudra un plus grand nombre de quadrats ou transects pour atteindre un échantillonnage de 20% de la population par rapport à un site où les gentianes sont réparties de manière agrégée. Ces deux critères conditionnent ainsi le nombre de quadrats ou transects à échantillonner pour chaque site.
Tous les quadrats et transects sélectionnés n’ont pas été échantillonnés pour chaque site par contrainte de temps. En effet, une des principales raisons a été le nombre important de gentianes observées par rapport au nombre prévu, notamment pour les quadrats, ce qui a considérablement augmenté le temps d’échantillonnage. Par exemple, sur le Plateau d’Anzé, le suivi d’un quadrat a duré jusqu’à 7h. Ainsi, il n’a pas été possible de réaliser les deux méthodes le même jour, ni même de réaliser l’échantillonnage de tous les quadrats ou tous les transects.
Conditions météorologiques requises
Ce suivi ne nécessite pas de conditions météorologiques spéciales.
Nombre de campagnes de relevés
Le suivi de la phénologie de G. pneumonanthe associée au nombre de pontes de P. alcon peut être chronophage. La fréquence de suivi est d’une fois par semaine pendant toute la durée de la campagne allant de la semaine avant la date de première floraison de G. pneumonanthe jusqu’à la fin de vol de l’imago. Cette fréquence est établie selon le suivi phénologique de G. pneumonanthe et avec les autorisations d’accès sur les différents sites, notamment les camps militaires.
Afin de déterminer le début des suivis, il est nécessaire de connaitre la date de première floraison de G. pneumonanthe. Pour chaque site, elle a été estimée à partir des connaissances disponibles et par des passages réguliers sur le terrain. Si la date de première floraison évolue au fil des ans, la date de début des suivis pourra être réajustée.
La détermination de la fin de vol de l’imago est également basée sur les connaissances de l’espèce – Phengaris alcon est connu pour voler principalement de juillet à fin août-début septembre (selon les secteurs) – ainsi que sur des observations de terrain.
En 2017, les dates de première floraison et de fin de vol ont été soit estimées soit affinées selon les sites. Le nombre de passages est variable selon les sites (voir tableau suivant). Pour les sites Ellorimendi et Plateau d’Anzé, la date de première floraison a été déterminée en 2016, les passages ont donc commencé une semaine avant cette date contrairement aux sites Aérodrome et Lafarge pour lesquels cette date a été déterminée en 2017, c’est-à-dire en même temps qu’ont débuté les premiers suivis, ce qui a réduit le nombre de passages. Ces dates seront déterminées pour les nouveaux sites en 2018.
Données sur la phénologie de G. pneumonanthe et P. alcon et nombre de passages par site de suivis
Fiche de relevés
Le couple site-observateur sera indissociable, c’est-à-dire que le même niveau professionnel d’observation est maintenu jusqu’en 2021. Les relevés sont réalisés par des professionnels expérimentés.
Chaque observateur note à l’intérieur de chaque quadrat de 4 m² et pour chaque hampe florale de gentiane les éléments suivants :
– le nombre de bourgeons floraux, de fleurs épanouies et de fruits pour chaque hampe florale de gentiane ainsi que la hauteur ;
– le nombre d’œufs de Phengaris alcon par bourgeons/fleurs (pas de distinction du calice et de la corolle), par tiges et par feuilles.
Analyses et statistiques
Dans un premier temps, les deux méthodes de suivis de la phénologie de G. pneumonanthe et du nombre de pontes de P. alcon sont comparées pour chaque site en termes de temps d’échantillonnage et de nombre de gentianes observées. Il est à noter que les deux méthodes n’ont pas bénéficié toutes les deux du même nombre de suivi par faute de temps de mise en œuvre sur le terrain. Ainsi, les comparaisons sont effectuées uniquement sur les valeurs des suivis réalisés lors des dates indiquées dans le tableau suivant :
Dates des suivis pour lesquels les valeurs entrent en compte dans la comparaison des deux méthodes de suivis
Des analyses descriptives ont ensuite été réalisées sur la phénologie de G. pneumonanthe et de P. alcon ainsi que sur le nombre de gentianes et de pontes observées sur les quadrats 10×10 qui ont bénéficié de suivis réguliers tout au long de la campagne de relevé. Les quadrats concernés par les analyses sont les suivants :
– Aérodrome de Bordeaux-Saucats : quadrats n°2 et 10
– Ellorimendi : quadrat n°2
– Plateau d’Anzé : quadrat n°1
Le nombre de passages sur le site de la carrière de Lafarge étant trop peu nombreux, il a été décidé d’écarter les données de ce site.
Ainsi, pour les trois sites mentionnés ci-dessus, les éléments suivants ont été analysés :
– l’évolution du nombre de gentianes au cours du temps ;
– l’évolution au cours du temps de la phénologie de la gentiane : 4 stades phénologiques sont pris en compte : le stade végétatif, le stade début de floraison (une minorité de fleurs épanouies), le stade pleine floraison (plus de 50% de fleurs épanouies), le stade fructification (présence d’au moins un fruit développé sur une tige) (d’après la notice méthodologique « protocole suivi phénologique de la flore » du CBNSA) ;
– l’évolution au cours du temps de la proportion de gentianes ayant des œufs de P. alcon;
– l’évolution au cours du temps des pontes d’azuré selon leur positionnement sur les gentianes.
Résultats : comparaison des deux méthodes testées
Les tests des deux méthodes menées sur 4 sites en 2017 ont permis de faire un bilan sur les avantages et limites de chaque méthode et de les comparer en termes de temps d’application sur le terrain et de gentianes comptabilisées :
Nombre de gentianes attendu et observé en 2017 par quadrat et transect et valeurs comparatives du temps d’échantillonnage et du nombre de gentianes observées selon les deux méthodes pour chaque site
Globalement, le temps d’échantillonnage d’un quadrat de 4 m² est semblable pour les deux méthodes (comparaisons entre les valeurs des deux méthodes pour chaque site), excepté pour le Plateau d’Anzé où le temps est plus élevé par la méthode des quadrats que par la méthode des transects. Cependant, la valeur de temps correspondant au suivi par la méthode des transects sur ce site est faussée car tous les paramètres n’ont pas été relevés. En effet, seul le nombre de gentianes a été noté sans donnée phénologique associée à chaque hampe florale, réduisant fortement le temps d’échantillonnage.
Par contre, le nombre de gentianes observées est globalement supérieur par la méthode des quadrats de 100 m². Par exemple, respectivement, pour les sites d’Ellorimendi et Plateau d’Anzé, 241 et 490 hampes florales ont été comptées par la méthode des quadrats contre 23 et 342 respectivement par la méthode des transects. Ainsi, en comparant les deux méthodes, la méthode des quadrats de 100 m² est plus rentable en termes de temps d’échantillonnage et nombre de gentianes comptées.
Discussion
L’Azuré des mouillères (Phengaris alcon) est un lépidoptère qui possède un cycle de vie complexe qui dépend en partie de la présence de sa plante-hôte, Gentiana pneumonanthe . L’objectif de ce suivi est d’étudier la réponse de la période de ponte de P. alcon à un décalage de la floraison de la G. pneumonanthe dû au changement climatique.
Sélection des sites
En 2016, six sites d’étude, connus pour leurs importantes populations de P. alcon, ont été sélectionnés. Cependant, suite à une animation foncière infructueuse ou à des difficultés d’accès pour certains sites, il a été nécessaire de sélectionner d’autres sites, en vue de tester les deux méthodes de suivis proposées sur un nombre suffisant de sites. Or, il faut noter que les sites abritant des populations importantes de P. alcon et de G. pneumonanthe sont peu nombreux en ex-Aquitaine . De plus, la sécurisation foncière et l’autorisation d’accès aux sites sont deux critères essentiels à prendre en compte dans la sélection des sites afin d’assurer la pérennité des suivis dans le temps. Ainsi, une grande difficulté réside dans la sélection des sites réunissant l’ensemble de ces critères. Par exemple, le site « Carrière Lafarge » (33) est un site sécurisé foncièrement, avec une autorisation d’accès. Il a été sélectionné pour remplacer le camp de Captieux (33) dont l’accès n’a pas été possible en 2017. Or, les suivis réalisés en 2017 ont révélé des populations de P. alcon et de G. pneumonanthe beaucoup trop faibles. Il a, par conséquent, été décidé d’abandonner ce site. La découverte récente de nouveaux sites dans les Pyrénées-Atlantiques, la poursuite d’une animation foncière sur des sites plus favorables en Gironde ainsi que l’extension du programme à la Nouvelle-Aquitaine permettra d’augmenter le nombre de sites. Pour le moment, un nouveau site, « lande de la Flotte et du Cluzeau » à Meuzac (19) vient compléter la liste existante de sites :
Situation des sites validés pour les suivis de G. pneumonanthe et P. alcon en ex-Limousin
Bilan des tests des deux méthodes
A notre connaissance, il n’existe pas actuellement de méthode standardisée pour le suivi de la phénologie de G. pneumonanthe et de la ponte de P. alcon. Après des échanges entre les partenaires et le conseil scientifique du programme « les sentinelles du climat » et une recherche bibliographique, deux types de méthodes des quadrats ont été proposées en 2016 : la première méthode dite des quadrats et la deuxième méthode dite des transects.
En 2017, afin d’établir le protocole le plus adéquat pour suivre la phénologie de P. alcon et de G. pneumonanthe, les deux méthodes de suivis ont été testées sur 4 sites : 2 sites en Gironde, 1 site au Pays-Basque et 1 site dans le Béarn. Lors de ces suivis, le nombre de gentianes comptabilisées était supérieur au nombre de gentianes attendu (nombre basé sur les pointages GPS des gentianes et retranscrit sous SIG). La méthode de comptage des gentianes peut expliquer cette différence car elle est différente pour le recensement préalable des gentianes. En effet, lors des suivis, la végétation est inspectée très finement afin de recenser de façon la plus exhaustive possible les gentianes, ce qui n’a pas été le cas au moment du recensement, la surface à couvrir étant trop importante. Ainsi, face à des contraintes de temps, seules les gentianes facilement détectables ont été pointées au GPS lors du recensement, ne permettant pas d’obtenir une vision réelle des populations de gentianes. Par conséquent, il est impossible d’échantillonner avec certitude 20% de la population de gentianes (échantillon statistique pertinent admis dans la littérature).
Les tests effectués sur le terrain ont permis de mettre en exergue les avantages et inconvénients pour chacune des deux méthodes.
La méthode des quadrats permanents 10 m x 10 m , dite méthode des quadrats, est pratique à mettre en place sur le terrain. Les quadrats sont faciles à retrouver à chaque suivi grâce à des repères permanents. La localisation étant réalisée sur les zones les plus denses en gentianes, le nombre de quadrats à disposer pour atteindre le seuil minimum de 20% de pieds est alors réduit ce qui permet d’optimiser l’effort d’échantillonnage. Cependant, ce nombre peut augmenter pour les sites où la répartition de G. pneumonanthe est grande et diffuse. La surface inventoriée est identique pour chaque quadrat mais le temps de suivis peut varier selon la densité de gentianes présente, il sera d’autant plus élevé que la densité sera forte, augmentant le temps du suivi pour certains sites comme le Plateau d’Anzé. Sept heures de comptage ont été parfois nécessaires pour réaliser le suivi. De plus, le quadrat concerne une zone qui peut être impactée par des conditions environnementales particulières avec des phénologies spécifiques de G. pneumonanthe ou des pertes de pieds par assèchement de la zone. Cet échantillonnage peut ne pas être représentatif de l’évolution de l’ensemble du site. L’adaptation de l’emplacement du quadrat en fonction de l’évolution spatiale des pieds de G. pneumonanthe permettrait d’éviter la prise en compte de réponses particulières de la flore et de la faune, qui seraient non représentatives de la réponse globale. Enfin, un inconvénient de cette méthode est le piétinement important sur la zone de suivi, dû aux nombreux passages à répétition à l’intérieur du quadrat ce qui pourrait avoir un impact à la fois sur les gentianes et les pontes de P. alcon et sur l’état de conservation de l’habitat à long terme. En effet, d’une part, avec le piétinement et la pose à répétition de quadrats de 4 m² (quadrats en tasseau de bois, en tuyau en pvc), il y a un risque important de destruction des gentianes (tiges cassées, sectionnées) et des pontes avec. D’autre part, un piétinement répété risque de provoquer des ouvertures dans la végétation permettant l’apparition d’espèces floristiques non caractéristiques des landes humides.
La méthode des quadrats de 4m² , dite méthode des transects, a l’avantage d’échantillonner le site sur une plus grande zone et permet de traverser des zones à forte et faible densité de gentianes. Comme les quadrats, les transects peuvent être facilement retrouvés grâce à la mise en place de repères permanents positionnés le long du transect. Par contre la mise en place sur le terrain peut s’avérer difficile sur les sites où la végétation est haute avec présence d’arbustes, d’autant plus lorsque le transect est long d’une centaine de mètres. De plus, il existe un risque important de décalage du transect lors de son positionnement, dû à la précision du GPS (précision maximale de 3 m). Cela peut avoir des conséquences sur le nombre de gentianes comptabilisés lors du suivis qui peut être réduit si le transect est positionné hors des zones à forte densité, ce qui fut notamment le cas sur le site d’Ellorimendi. Aussi, la surface inventoriée est variable selon la longueur des transects qui dépend de la taille et de la forme du site, ce qui conditionne également le temps de suivis : il sera d’autant plus long que la longueur du transect sera élevée. Enfin, en ce qui concerne le piétinement, cette méthode semble moins préjudiciable sans le confirmer puisqu’elle n’a été testée qu’une seule fois sur chacun des sites.
En comparant les deux méthodes, celle des quadrats 10 x 10m est la méthode qui semble offrir le meilleur compromis entre effort d’échantillonnage et nombre de gentianes contactées. En effet, les résultats des tests réalisés en 2017 ont montré un nombre de gentianes échantillonnées plus important avec la méthode des quadrats 10 x 10 m. Le choix s’est donc orienté vers cette méthode. Cependant, afin d’éviter les difficultés et inconvénients rencontrés en 2017, des modifications d’application de la méthode ont été apportées suite à une réunion technique avec Cistude Nature, le CEN Aquitaine, la Société entomologique du Limousin, le CBN Sud-Atlantique et le CBN Massif Central. Concernant le problème de piétinement, il a été décidé de réaliser les suivis, de façon rotatoire, sur deux quadrats permanents choisis parmi les quadrats de 100 m² sélectionnés et échantillonnés en 2017 qui présentaient les meilleures densités en gentianes et en œufs de P. alcon. Cela signifie qu’un quadrat sera suivi une année sur deux. Quelques changements ont également été apportés au niveau des paramètres à relever. La différenciation des pieds de gentiane étant parfois difficile à réaliser, en 2017 le nombre de bourgeons floraux, de fleurs épanouies et de fruits ainsi que le nombre d’œufs de P. alcon selon leur positionnement ont été notés pour chaque hampe florale et non pour chaque pied. Afin de valoriser les données des suivis de 2017, la phénologie de la gentiane et le nombre d’œufs seront notés pour chaque hampe florale. Cependant, le nombre de pieds de gentiane reste un élément important afin d’étudier la dynamique de la population de gentianes sur chaque site. Ce paramètre sera ainsi noté pour les prochains suivis. Enfin, concernant la matérialisation des quadrats, elle pourra se faire à l’aide de tiges métalliques enfouies dans le sol et repérées ensuite à l’aide d’un détecteur à métaux. Cette technique présente l’avantage d’assurer une grande pérennité au dispositif de suivi, tout en limitant les contraintes liées à la gestion comme la fauche.
Eléments de comparaison des deux méthodes de suivis de la phénologie de G. pneumonanthe des pontes de P. alcon
Illustration du système rotatoire pour les suivis de P. alcon et de G. pneumonanthe
Perspectives
Suite à ces premiers suivis et ces premiers résultats, les perspectives sont les suivantes :
– continuer l’animation foncière sur les sites identifiés comme favorables mais sans réponse des propriétaires ;
– débuter une animation foncière sur les nouveaux sites identifiés comme favorables, c’est-à-dire répondant aux critères de sélection ;
– affiner la date de la première floraison et la période de fin de vol de alcon sur les sites pour lesquels elles ne sont pas encore déterminées (ex : camp de Souge) ;
– déterminer la date de première ponte de P. alcon sur chaque site ;
– appliquer la méthode de suivis sélectionnée sur les sites validés ;
– établir un plan d’analyse de modèles statistiques pour relier la réponse du décalage de la phénologie de la plante hôte au succès des pontes de alcon.
6.5 Lézard vivipare
Rédaction : Maud Berroneau, Gaëlle Caublot
Contribution : Julien Jemin
« Le changement climatique est une cause du déclin de plusieurs populations de reptiles ». « Les modifications potentielles de l’aire de répartition en réponse à l’augmentation de la température ont été mises en évidence sur plusieurs groupes taxonomiques . Cependant, les études sur les reptiles se sont limitées principalement à des zones géographiques restreintes » . Le Lézard vivipare est une espèce d’affinité climatique fraîche . Abondante en altitude, l’espèce est beaucoup plus rare en plaine où elle se cantonne à des milieux de landes humides. Le changement climatique pourrait impacter fortement l’espèce sur ce dernier type d’habitat, et notamment la réussite de sa reproduction.
Les hypothèses de l’impact du changement climatique sur cette espèce indicatrice sont :
– extinction locale possible des populations suite à la disparition de stations remarquables en plaine,
– une entrée progressive du Lézard des murailles indiquant une modification micro-climatique des sites et un remplacement possible entre « lézards gris ».
L’objectif de ce suivi est par conséquent d’obtenir des tendances évolutives de l’occurrence du Lézard vivipare en lien avec d’éventuelles variations climatiques sur différents sites témoins du Massif landais mais également des zones humides de basse altitude et des tourbières des plateaux limousins.
Sélection des sites
La sélection s’est portée sur des sites présents dans l’aire de répartition du Lézard vivipare (présence avérée ou non de ce dernier), facilitant la mise en évidence d’éventuels mouvements populationnels. Les milieux concernés sont les secteurs de lagunes et de landes à molinie de plaine sur les départements de la Gironde, des Landes et du Lot-et-Garonne. Ces sites coïncident autant que possible avec ceux d’autres suivis en milieu humide, notamment avec les sites de suivi de la Rainette ibérique d’affinité climatique similaire. En Limousin, les sites ont été choisis afin de mettre en évidence une possible disparité entre les populations des tourbières et landes humides de basse altitude en Creuse et en Haute-Vienne et celles des tourbières des plateaux de Creuse et de Corrèze.
Répartition du Lézard vivipare en France (SHF, 2013)
En 2016, les sites sélectionnés ne concernaient que la Gironde, les Landes et le Lot-et-Garonne afin d’y mettre en évidence les réponses écologiques des populations de plaines face au changement climatique. Les populations enclavées dans le Massif landais sont d’autant plus intéressantes à suivre du fait de leur caractère isolé et réfugié dans les derniers secteurs de lagunes fraiches de Gironde et des Landes. En 2017, la sélection de sites s’est étendue au Limousin avec l’extension de la région Nouvelle-Aquitaine.
Pour le suivi du Lézard vivipare, chaque « site » de suivi correspond à une « lagune » en ex-Aquitaine et ses environs immédiats ou à un milieu de landes humides à molinies.
12 sites ont ainsi été sélectionnés en ex-Aquitaine (7 en Gironde, 3 dans les Landes, et 2 en Lot-et-Garonne) à partir de la répartition connue du Lézard vivipare en plaine et avec une homogénéité de répartition selon un gradient nord-sud, est-ouest, et 8 sites en ex-Limousin :
Situation géographique des sites d’études validés dans la cadre du suivi du Lézard vivipare
Caractéristiques des sites étudiés dans le cadre des suivis « Lézard vivipare »
Définition et description des points d'échantillonnage
Cette étude se base sur un suivi annuel de présence du Lézard vivipare sur 20 sites répartis sur 6 départements concernés (Gironde, Landes, Lot-et-Garonne, Creuse, Corrèze et Haute-Vienne) et couplés à des stations météo.
Les sites sont matérialisés par des carrés de 100 x 100 m, et contiennent chacun 5 placettes d’échantillonnage de 10 x 10 m positionnées aléatoirement sur habitat favorable.
Un exemple de situation de quadrat et placettes du suivi Lézard vivipare en Gironde
Cette année a été consacrée à la mise en place du protocole en ex-Limousin. Les carrés seront présentés dans le prochain rapport.
Méthode de relevés et détermination des espèces
Le suivi annuel indique la présence du Lézard vivipare sur les 20 sites sélectionnés. L’application du protocole type POP Reptile permettra une estimation fine de la présence et de l’abondance de l’espèce.
Le protocole peut se résumer ainsi : 3 passages par site et donc par placette par an, de préférence entre avril et juin. L’observateur passe 20 min par placette à noter la présence et le nombre de Lézard vivipare ainsi que d’autres données propres aux placettes et aux autres espèces observées (notamment Lézard des murailles).
Conditions météorologiques requises
Les conditions météorologiques ne sont pas particulièrement difficiles à respecter. Il convient d’éviter les jours à couverture nuageuse importante (>80%) et les jours pluvieux en cas de météo orageuse. Aussi à l’inverse, il convient d’éviter les jours trop ensoleillés et/ou à température trop élevée.
Nombre de campagne de relevés
Trois campagnes de relevés sont requises pour chaque site au cours de la saison (mars à juin), avec un espace-temps d’au moins 2 semaines entre deux passages de prospection.
Fiches de relevés
La récolte de données est réalisée à l’aide de fiches de relevé standardisées. Trois fiches de renseignements doivent être remplies pour chaque placette et chaque passage. La première fiche « Relevé » renseigne par placette les observations de l’espèce, les indices de présence et les gîtes utilisés pour les trois passages. La deuxième fiche « Descriptif placette » permet un descriptif précis de la placette pour les trois passages. Enfin, la fiche « Récapitulatif placettes » liste l’ensemble des placettes à prospecter.
Fiche Relevé
– Localisation / aide localisation : coordonnées GPS des quatre extrémités de la placette. Il peut également être noté toute remarque facilitant le bon repérage du site.
– Météo :
T°: valeur maximale indiquée par le thermomètre/anémomètre (en degré Celsius).
Vent : valeur maximale indiquée par le thermomètre/anémomètre (en m/s) sur une minute.
Nuage : la couverture nuageuse doit être indiquée selon 5 coefficients (1 ≤ 20% ; 20 % < 2 ≤ 40 % ; 40 % < 3 ≤ 60 % ; 60 % < 4 ≤ 80 % ; 5 > 80 %).
– Nature du contact avec Lézard vivipare :
Obs directe : nombre d’individus différents observés.
Fèces : nombre crottes dénombrées.
Mues : nombre de mues dénombrées (attention à la confusion avec d’autres lacertidés).
– Nature de l’abri : Description de l’abri utilisé par l’individu
– Observation d’autres espèces : Lézard des murailles (nombre, stades, etc.) ou autres espèces remarquables
Fiche Descriptif placette
– Localisation / aide localisation : cf. ci-dessus.
– Date / Observateur : date et nom des observateurs lors des trois passages.
– Position : emplacement de la placette sur le site.
– Strates de végétation : pourcentage et hauteur des différentes strates de végétation au sein de la placette.
– Nature abri : présence / absence et nombre des différents abris disponibles pour les Lézards vivipares.
Fiche Récapitulatif placettes
– Coordonnées GPS : indiquent les quatre extrémités Nord-Ouest, Nord-Est, Sud-Est et Sud-Ouest de la placette.
– Commentaires : toutes informations permettant de faciliter le repérage de la placette.
Résultats exploratoires
En 2016, les sites n’ont pu être visités et sélectionnés qu’en dehors de la pleine période d’activité du Lézard vivipare (visites faites entre juillet et septembre). Aucun relevé selon le protocole précédemment présenté n’avait pu être fait. Ainsi, aucun résultat exploratoire n’avait été rapporté pour 2016. Pour la région ex-Limousin, les sites ont été visités tardivement (de mai à octobre) en 2017 suite à la mise en place du partenariat dans le territoire en début d’année. Des suivis tardifs ont été menés pour tester le protocole et valider le choix des sites à suivre.
Pour 2017, une cartographie représentant le rapport Lézard vivipare / lézard des murailles observés sur les sites d’études est proposée :
Observations sur la saison 2017 par sites des Lézards vivipares (bleu) et des Lézards des murailles (rouge)
Les prochaines années permettront d’avoir une image instantanée du rapport de force entre le Lézard vivipare et le Lézard des murailles sur les sites d’études. Lorsque la balance penchera en faveur du Lézard des murailles, cela indiquera que l’habitat et les conditions micro-climatiques (température, hygrométrie) auront été modifiées. Les études éco-physiologiques permettront de mettre en avant les seuils de tolérance des fluctuations hygrométriques des lézards vivipares.
Discussion
Le suivi devra être assuré dans le temps pour produire des indices annuels d’abondance et de répartition pour comparaison sur le long terme.
Les analyses devront porter sur la mise en place d’une méthode efficace permettant de vérifier les corrélations entre l’occurrence du Lézard vivipare et la variation climatique des sites (assèchement, modification de la flore, etc.).
Un focus particulier sera fait sur la pénétration possible du Lézard des murailles sur ces secteurs en landes humides, indicatrice d’un changement climatique et d’habitat à l’échelle du site et sur l’étude de ses conséquences sur les populations de Lézard vivipare.
Un projet est en réflexion avec le CNRS de Chizé pour mettre en lien les changements climatiques et les réponses des populations de Lézard vivipare via l’équipement des sites de micro-sondes au niveau du sol et des micro-habitats inféodés à cette espèce. L’approche par modélisation apportera également des informations sur les tendances évolutives de ces populations.
6.6 Vipère péliade
Rédaction : Gaëlle Caublot
Contribution : Julien Jemin
La Vipère péliade est une espèce boréale présentant des adaptations spécifiques au froid qui la rendent vulnérable aux fortes températures. La limite sud de répartition de cette espèce se trouve dans le Massif central où on la rencontre principalement dans les milieux frais et humides (tourbières, landes à molinies etc.) au-dessus de 700 m d’altitude en Limousin bien que certaines vallées fraîches puissent lui permettre de subsister à 530 m. Le changement climatique pourrait impacter cette espèce en influant sur la qualité de ses habitats et en perturbant directement l’espèce par le biais de sa physiologie (coûts de maintenance et phénologie de la reproduction) .
Les hypothèses de l’impact du changement climatique sur cette espèce indicatrice sont :
– une contraction de la répartition de l’espèce vers les plus hautes altitudes ;
– un émiettement de la répartition globale (extinctions locales) ;
– une détérioration de la condition corporelle des individus due à des mécanismes hormonaux (phénomène décrit pour la Vipère aspic in Brischoux et al. ) ;
– une entrée progressive de la Vipère aspic indiquant une modification microclimatique des sites et une compétition possible entre les deux espèces.
Les objectifs de cet indicateur sont de visualiser la tendance évolutive de la répartition, abondance, estimation de l’âge et de la taille de la Vipère péliade en lien avec d’éventuelles variations climatiques, mais aussi d’observer l’évolution du rapport de force entre la Vipère péliade et la Vipère aspic.
En 2017 en Limousin, les sites ont été visités tardivement (de mai à octobre) pour tester le protocole et valider le choix des sites.
Sélection des sites
Les huit sites ont été choisis dans l’aire de répartition actuelle connue de la Vipère péliade (présence avérée de l’espèce, voir figure ci-dessous) afin de mieux appréhender l’éventuelle modification d’occurrence de cette dernière.
Répartition de la Vipère péliade (SHF, 2012)
Les zones échantillonnées sont des tourbières et des landes humides entre 670 et 810 m d’altitude en Creuse et en Corrèze. Dans certains sites les plus bas, une sympatrie avec la Vipère aspic est connue. Ils ont été choisis à la fois dans les sites en zones « marge » et « cœur » indiquées dans le travail de thèse de Michaël Guillon. Le suivi n’intègre pas de sites en zone « out », zone d’absence de la vipère péliade.
Les sites suivis sont gérés – sauf Tigouleix- par le Conservatoire d’Espaces Naturels du Limousin qui vise à conserver les parcelles dans un état favorable à la présence de vipères péliades (maintien des milieux ouverts et des fonds humides). Le dernier site appartient à un adhérent du GMHL, souhaitant conserver ses parcelles en bon état écologique pour l’espèce, qui y effectuera le suivi. La disparition éventuelle de vipères péliades sera donc probablement due à une modification climatique plutôt qu’à une modification d’état des parcelles.
Pour le suivi de la Vipère péliade, chaque « site » de suivi correspond à un cercle d’un kilomètre de rayon au sein duquel sont répartis trois transects. Ces sites englobent des zones de tourbières, de landes humides ou de bocage frais. Ce protocole se base sur le protocole POPReptile adapté par l’Observatoire des Reptiles d’Auvergne (ORA) en collaboration avec le CNRS de Chizé (CEBC) dans le cadre du suivi des vipères péliades dans le Massif Central.
Huit sites ont ainsi été sélectionnés (5 en Corrèze et 3 en Creuse) à partir de la répartition connue de la Vipère péliade en Limousin et avec une homogénéité de répartition selon un gradient altitudinal. Ces sites coïncident autant que possible avec ceux d’autres suivis en milieu humide, notamment avec les sites de suivi de Lézard vivipare, d’affinité climatique similaire.
Situation géographique des sites d’études validés dans le cadre du suivi de la Vipère péliade
Caractéristiques des sites étudiés dans le cadre du suivi de la Vipère péliade
Définition et positionnement des points d'échantillonnage
Cette étude se base sur un suivi annuel de présence de la Vipère péliade sur 8 sites répartis sur deux départements concernés (Creuse et Corrèze) et couplés à des stations météorologiques.
Les sites sont matérialisés par des cercles d’un kilomètre de rayon et contiennent chacun trois transects de 455 à 670 m localisés dans un habitat favorable homogène au sein du transect. Les transects sont distants d’au moins 200 m et réalisés de manière aléatoire entre le point d’arrivée et de fin, en passant par les zones des plus favorables potentiellement.
Un exemple de situation des transects dans le cadre du suivi de la Vipère péliade sur photographie aérienne
Un exemple de situation des transects dans le cadre du suivi de la Vipère péliade sur carte topographique
Méthode de relevés et détermination des espèces
Le protocole de suivi se base sur celui développé par l’Observatoire des Reptiles d’Auvergne (ORA), Olivier Lourdais et Michaël Guillon (CEBC) dans le cadre d’un suivi à long terme de l’espèce dans le Massif central (lui-même basé sur le protocole POPReptile 2 : suivis temporels . L’objectif du suivi ORA est double : 1/ Suivre le déplacement potentiel des limites de l’aire de répartition de l’espèce en Auvergne (phénomènes de contraction ou d’expansion, la contraction vers les hautes altitudes étant la plus probable) ; 2/ Evaluer un possible émiettement de la répartition globale de l’espèce (phénomène d’extinctions locales).
L’ensemble des observations sera réalisé à vue uniquement (pas de pose de plaques). L’espèce principalement suivie est la Vipère péliade mais la présence d’autres espèces de reptiles (Lézard vivipare, Vipère aspic, Coronelle lisse, Lézard des souches, etc.) sera également indiquée permettant d’étudier des éventuelles modifications de communauté des reptiles et le rapport de force avec notamment la Vipère aspic. La détermination se fait à vue. L’âge approximatif (adulte ou juvénile) se fait sur la base de la taille des individus. Ainsi, les animaux sont considérés comme adultes lorsqu’ils atteignent 49 cm pour les femelles et 45 cm pour les mâles, la longueur étant mesurée du museau au cloaque . Toutefois, les animaux ne seront pas capturés, la longueur sera donc estimée, de même que l’âge.
Les transects sont suivis à pied, assez lentement pour permettre de bien observer les individus présents. Il n’y a pas de limitation de durée mais le protocole est en cours de mise en place pour établir une durée moyenne.
Actuellement, au total 21 transects sont suivis, soit 11,246 km. Il manque les transects d’un site (Tigouleix) qui restent encore à définir.
Conditions météorologiques requises
Les conditions météorologiques ont un impact important sur la probabilité de détection de l’espèce. Il convient de réaliser les suivis par temps doux ou orageux, peu ou pas venteux. Les températures trop froides, trop chaudes ou la pluie battante sont à éviter. Les animaux peuvent s’observer plus aisément lors de moment couverts voire de faibles précipitations intermittentes lorsque la température est suffisante. Les tranches de température d’observation seront précisées l’année prochaine lors du test du protocole.
Nombre de campagnes de relevés
Les sites seront suivis trois fois par an au printemps (à partir de début avril jusqu’à juin), les transects d’un même site devant être réalisés dans la même journée. Les sites sont suivis chaque année.
Fiche de relevés
La récolte de données sera réalisée à l’aide de la fiche de relevé standardisée créée par l’Observatoire des Reptiles d’Auvergne et le Centre d’Etudes Biologiques de Chizé.
Trois fiches de renseignements doivent être remplies pour chaque site. La première fiche « Relevé » renseigne les observations de l’espèce pour chaque transect de chaque site et doit être complétée à chaque passage. La deuxième fiche « Typologie des habitats » permet un descriptif général des habitats bordant le transect et doit être remplie chaque année. La dernière fiche « Typologie simplifiée des milieux » décrit l’espace dans une largeur de 3m de part et d’autre du transect et relève plus précisément la présence d’abris et la structure de la végétation.
Fiche Relevé
– Localisation : nom du site, numéro du transect, longueur du transect.
– Observateur : nom du prospecteur.
– Date, heure de début et de fin, numéro de passage sur le transect.
– Météo :
T°: température au début du transect à relever (en degré Celsius).
Vent : nul, légéer, moyen ou fort.
Ciel : ensoleillé, belles éclaircies, nuageux prédominant, très nuageux, orageux, pluvieux ou ciel voilé.
– Contact avec les individus observés :
Espèce.
Age de l’individu observé (adulte/juvénile).
Localisation : 1er/2e/3e tiers du transect ou hors protocole (à positionner).
Fiche Typologie des habitats
Il s’agit de décrire l’habitat dominant sur deux bandes de 30 m de large environ de part et d’autre du transect. La description est réalisée de manière indépendante pour chaque transect du fait du caractère bordier de certains transects. La classification se base sur EUNIS, possédant une structure fondée sur 10 types de milieux.
Fiche Typologie simplifiée des milieux
La fiche vise à mieux définir la nature de l’interface en fonction de 5 types de milieux (linéaire, en mosaïque à végétation haute ou basse, à structuration végétale homogène ou anthropiques).
Analyses et statistiques
Le choix de la méthode s’est porté sur un suivi en présence/absence multi sites (connu également sous le nom d’occupancy). L’intérêt de ce type de suivi est de limiter l’effort de prospection, mais en contrepartie un nombre important de sites est nécessaire. De plus, les paramètres démographiques ne pourront pas être suivis finement là où seuls des phénomènes populationnels assez drastiques pourront être mis en évidence mais correspondant bien à l’échelle d’analyse de l’aire de répartition de l’espèce.
Discussion
Le suivi devra être assuré dans le temps pour produire des indices annuels d’abondance et de répartition pour comparaison sur le long terme. Le protocole est encore en cours de calage sur quelques détails (temps minimal de suivi, par exemple). L’année 2018 devrait permettre de le fixer une fois pour toute.
Les analyses devront porter sur la mise en place d’une méthode efficace permettant de vérifier les corrélations entre l’occurrence de la Vipère péliade et la variation climatique des sites (assèchement, modification de la végétation, etc.). La difficulté principale réside dans le caractère élusif de l’espèce, qui nécessite de réaliser les suivis par conditions météorologiques très favorables pour maximiser les chances d’observation. A titre d’exemple, un seul individu a été aperçu en fin d’année 2017, lorsque les températures ont baissé.
Un focus particulier sera fait sur la pénétration possible de la Vipère aspic sur les transects en landes humides et bords de tourbières, indicatrice d’un changement climatique et d’habitat à l’échelle du site et sur l’étude de ses conséquences sur les populations de Vipère péliade.
La mise en place de capteurs de température et d’humidité au niveau du sol devrait être envisagée afin de mieux appréhender le microclimat des zones fréquentées par les animaux (comm. pers. recommandations d’Olivier Lourdais et Mickaël Guillon, Centre d’études biologiques de Chizé-CNRS). De même, l’ajout de quelques sites pourrait permettre d’obtenir des résultats plus probants et fiables statistiquement.
Les transects ont été définis tardivement en 2017. L’année 2018 servira à confirmer leur positionnement. Le protocole étant encore en développement, il pourrait éventuellement subir quelques variations. De nouveaux transects pourraient être définis également dans le courant de 2018.