Protocoles des suivis de terrain
Lézard ocellé
1 Suivi de l'occupation du littoral
1.1 Sélection des sites
L’abondance du Lézard ocellé a fait l’objet d’un travail important entre 2008 et 2012 par Cistude Nature . Un système de suivi sur placettes avait été mis en place selon les premières méthodes d’occupation et d’estimation d’abondance basées sur les principes de détection certaine et de non-détection temporaire . Les sites sélectionnés ici reposent sur le protocole existant, reconduit lors de ce programme, en coordination avec les placettes ONF (cf. partie précédente sur le suivi des végétation dunaires) et ainsi couplé aux autres relevés faune/flore en milieu dunaire. L’intérêt de s’appuyer sur un protocole et des placettes existantes, étudiées sur un pas de temps important, est d’avoir une base de données historiques importantes pour les prospectives de modélisation.
Une partie du littoral en nord Landes ne comporte pas de placette car il s’agit d’une zone militaire dont l’accès est restreint voire interdit pour essai de munitions, malgré les populations connues de Lézard ocellé sur ce secteur. Ne permettant pas le respect du protocole (nombre et fréquence des passages d’observation), ce secteur n’a pu être retenu pour l’étude. Une absence d’information est donc visible cartographiquement pour cette zone, bien que les populations de Lézard ocellé y sont importantes.
Lors des visite de pré-suivi en début de saison, chaque année , certaines placettes sont déplacées de quelques mètres pour s’ajuster au profil de la dune, à la potentialité en habitats favorables. En effet, le littoral, et le système dunaire en particulier, sont soumis aux aléas climatiques saisonniers (tempêtes, vagues submersives, etc.). Ils subissent une érosion parfois si importante que certains secteurs géolocalisés abritant du Lézard ocellé se retrouvent en une nuit dans l’océan. Ainsi une surveillance annuelle des placettes listées se fait avant chaque début de saison afin de vérifier leur existence, leur caractère favorable à l’espèce. Dans le cas où les changements climatiques ont modifié drastiquement les conditions d’accueil d’une placette pour le Lézard ocellé ou ont fait littéralement disparaître une placette suivie, une placette équivalente est redéfinie dans la mesure du possible avec la même latitude.
L’étude du Lézard ocellé se cantonne aux départements de la Gironde et des Landes, car les populations de l’intérieur des terres (Dordogne, Lot-et-Garonne, Charente-Maritime) ont une écologie et des habitats différents des populations dunaires suivies, répondant ainsi à d’autres problématiques de conservation. Il en est de même pour les populations de l’ile d’Oléron qui sont soumises à un phénomène insulaire particulier influant sur le dynamisme des populations.
Répartition du Lézard ocellé (SHF, 2013)
Les sites choisis pour ce suivi sont répartis selon la répartition connue du Lézard ocellé entre les départements de la Gironde et des Landes : 80 placettes sur l’ensemble du cordon dunaire (depuis la dune blanche jusqu’à la frange forestière). Niveau terminologie, pour ce suivi Lézard ocellé, un « site » équivaut à une « placette ».
Figure 7 : Répartition géographique des sites de suivi du Lézard ocellé
2.2.2 Définition et positionnement des points d'échantillonnage
Les points d’échantillonnage Lézard ocellé correspondent aux placettes individuelles. Le protocole de suivi est basé sur un comptage de l’espèce sur chacun des sites d’études, c’est-à-dire sur chacune des placettes de 50 x 50 mètres, réparties sur l’ensemble du littoral aquitain. Une carte et un numéro sont attribués à chaque placette.
Exemple de disposition des placettes littorales pour le Lézard ocellé
1.2 Méthode de relevés et détermination des espèces
Le Lézard ocellé est une espèce dont le principal comportement observable est l’activité d’insolation. Cette espèce ectotherme a besoin de se chauffer au soleil afin de réguler sa température interne. Pour ce faire, il se place généralement à l’entrée de son abri où il est facilement observable. Le Lézard ocellé ne confectionne pas son propre gîte, il s’approprie divers types d’abris pour se protéger (garennes de lapins, terriers/trous de rongeurs, tas de bois morts, débris anthropiques tels que les restes de voies allemandes bitumées en arrière dune, blockauss endommagés, etc.). La prospection du Lézard ocellé consiste en l’observation directe de l’espèce, mais également en la recherche de ses indices de présence (traces de pattes dans le sable et fèces caractéristiques), et de ses abris potentiels.
L’application du protocole type « POP Reptile » (élaboré au niveau national par un collège scientifique : SHF, MNHN, EPHE Montpellier, ONF) permet une estimation fine de la présence ou de l’abondance du Lézard ocellé. Cette abondance peut être mise en relation avec des facteurs extérieurs (évolution des températures, etc.) et peut être comparée d’une année sur l’autre.
Le Lézard ocellé étant une espèce farouche, qui disparaît à la moindre alerte, il convient d’être le plus discret possible à l’approche du secteur à prospecter. Il est également recommandé de faire le moins de bruit possible durant les observations. Il est préconisé d’attendre 10 minutes après l’arrivée de l’observateur sur la placette pour commencer l’observation effective et les relevés en cas de perturbations et/ou fuite des lézards présents à l’arrivée de l’observateur.
Chaque placette est parcourue trois fois pendant 20 min au cours de la saison d’activité de l’espèce. Après une approche discrète et une recherche visuelle aux jumelles pendant 10 minutes, l’observateur parcourt la placette de manière aléatoire pendant 10 minutes à la recherche d’indices de présence (traces, crottes, mues). Chaque observation est notée et quantifiée pour chaque relevé et chaque placette. D’autres informations, tels que les indices de présence de Lapin de Garenne, sont également notées.
Trace d’adulte de Lézard ocellé (à gauche) ; mues (au centre) ; fécès (à droite)
1.3 Conditions météorologiques requises
Les placettes doivent être prospectées en matinée lors de conditions météorologiques favorables, de mars à fin juin (période d’activité du Lézard ocellé).
Les recommandations pour les conditions météorologiques favorables à l’observation des lézards ocellés sont les suivantes :
– Préférer une température moyenne (éviter température trop fraiche notamment en début de saison ou à l’inverse trop élevée en été).
– Éviter les jours à couverture nuageuse importante et pluvieux.
– Vent faible.
En début de saison, et en fonction de la météo, les relevés peuvent être réalisés toute la journée ou le matin préférentiellement. Les horaires optimaux préconisés se situent généralement après 10h en début de saison(mars à mai), et entre 9h30 et 11h ou entre 16h30 et 19h en fin de saison (juin à septembre).
1.4 Nombre de campagne de relevés
L’ensemble des placettes est prospecté 3 fois durant la saison d’activité (de mars à juin), avec un intervalle d’au moins 2 semaines entre les passages.
1.5 Fiches de relevés
La récolte de données sera réalisée à l’aide de trois fiches de relevé standardisées, remplies pour chaque placette et chaque passage.
La première fiche « Relevé » renseigne par placette les observations de l’espèce, les indices de présence et les gîtes utilisés pour les trois passages.
La deuxième fiche « Descriptif placette » permet un descriptif précis de la placette pour les trois passages.
Enfin, la fiche « Récapitulatif placettes » liste l’ensemble des placettes à prospecter.
Fiche Relevé
– Localisation / aide localisation : coordonnées GPS des quatre extrémités de la placette. Il peut également être noté toute remarque facilitant le bon repérage du site.
– Météo :
T° : valeur maximale indiquée par le thermomètre/anémomètre (en degré Celsius).
Vent : valeur maximale indiquée par le thermomètre/anémomètre (en m/s) sur une minute.
Nuage : la couverture nuageuse doit être indiquée selon 5 coefficients (1 ≤ 20% ; 20 % < 2 ≤ 40 % ; 40 % < 3 ≤ 60 % ; 60 % < 4 ≤ 80 % ; 5 > 80 %).
– Nature du contact avec LO :
Obs directe : nombre d’individus différents observés.
Traces : nombre de traces observées.
Fèces : nombre crottes.
Mues : nombre de mues dénombrées (attention à la confusion avec d’autres lacertidés).
– Nature du Gîte : Description du gîte utilisé par l’individu.
– Remarque : pour indiquer tout type d’information supplémentaire.
Fiche Descriptif placette
– Localisation / aide localisation : cf. ci-dessus.
– Date / Observateur : date et nom des observateurs lors des trois passages.
– Position : emplacement de la placette sur la dune.
– Strates de végétation : pourcentage et hauteur des différentes strates de végétation au sein de la placette.
– Nature du Gîte : présence / absence et nombre des différents abris disponibles pour les Lézards ocellés.
– Lapins : présence / absence et nombre des types d’observations du Lapin de Garenne.
Fiche Récapitulatif placettes
– Coordonnées GPS : indiquent les quatre extrémités Nord-Ouest, Nord-Est, Sud-Est et Sud-Ouest de la placette.
– Commentaires : toutes informations permettant de faciliter le repérage de la placette.
2 Détermination des niches thermiques
Les niches thermiques réalisées et fondamentales sont mesurées par un protocole mis en place en 2018 par Frank D’AMICO et réalisé par les différents observateurs qui effectuent les suivis de l’espèce
Dès lors qu’un individu est observé, qu’il soit sur une placette ou hors placette, l’observateur tente de s’approcher au maximum pour prendre 5 mesures de température sur le corps du lézard. S’il a fui, il prend ces 5 mesures sur la zone où le lézard se chauffait, très rapidement après son départ afin de faire l’hypothèse que la température mesurée soit la température corporelle de l’individu . Ensuite, il décrit un cercle de 50 centimètres de rayon autour de l’individu et prend 5 mesures de températures, ces mesures correspondent à la niche réalisée. Enfin, il décrit un cercle de 5 mètres de rayon et prend 10 mesures de température, ces mesures correspondent à la niche fondamentale . Toutes les mesures de température sont réalisées avec un thermomètre infrarouge. Cette méthode présente l’avantage d’être non invasive et plutôt fiable .
En premier lieu, ces données permettent de comparer les niches réalisées et les niches fondamentales par un test de comparaison de moyenne, Wilcoxon pour données appariées. Pour que la puissance soit assez élevée, il est nécessaire de réaliser ce protocole sur 64 individus au minimum . Les jeux de données comparés sont les moyennes des 5 mesures de niche réalisée et les moyennes des 10 mesures de niche fondamentale pour chaque individu. Pour le moment, seulement 42 individus ont fait l’objet de ce protocole. Les températures des niches sont également comparées aux moyennes des températures corporelles.
En second lieu, la distribution des températures corporelles peut être utilisée pour quantifier VTmin et VTmax. La moyenne des 5 mesures par individu est calculée puis les seuils sont déterminés en calculant les quantiles 5 et 95 de la distribution obtenue. Seuls des comportements d’insolation ont été observés, les individus ne sont pas considérés actifs selon la définition de Ferri-Yanez et al. , ce pourquoi nous avons privilégié cette méthode de calcul.
3 Enregistrement des températures opérantes
L’enregistrement des températures opérantes, correspondant à un proxy de la température corporelle, est réalisé à partir de sondes thermiques placées dans des tubes en PVC mimant les caractéristiques thermiques d’un lézard. Ce tube reproduit les échanges de chaleur par convection, conduction et radiation. La température est aussi enregistrée dans les refuges avec le même dispositif, le tube est enfoui à 15 cm en dessous de la surface. Pour le lézard ocellé, 4 couples de modèles sont déployés, un premier sur une placette à Tarnos , un second sur celle de Contis, un troisième sur la placette de Carcans et un dernier sur celle de Montalivet. Ces quatre placettes s’étendent le long du littoral aquitain ce qui permet l’étude de l’effet du gradient nord-sud. Selon les placettes et les années, les sondes effectuent des mesures toutes les 10 à 30 minutes. Également, la température de l’air et l’humidité relative sont mesurées à 1m30 du sol depuis 2017 sur les 4 placettes et à 20 centimètres depuis 2018 sur Tarnos, Contis et Carcans. Le déploiement des sondes plus proches du sol a été réalisé afin de mesurer les conditions météorologiques que pourraient ressentir les espèces vivant au so.
Les déploiements réalisés de 2016 à 2019 sur Tarnos permettent l’étude de la variabilité annuelle. Ceux réalisés en 2019 sur Contis, Carcans et Tarnos (sonde Montalivet volée) permettent l’étude de la variabilité inter-site. Les déploiements de 2018 ont été réalisés trop tardivement (début juin), bien après le début de la période de reproduction pour le lézard ocellé (début avril), les données ne sont donc pas exploitables pour notre étude. Les 3 sites retenus sont sur un gradient nord-sud, ce qui permettra d’étudier cet effet sur le temps d’activité et la probabilité de persistance :
Sites retenus pour l’étude de la variabilité des températures opérantes et le calcul du temps d’activité et de la probabilité de persistance dans le cadre de la modélisation mécanistique