Protocoles des suivis de terrain
Flore et communautés végétales
1 Végétations des dunes littorales non boisées
Rédaction : Kévin Romeyer, Anthony Le Fouler, Grégory Caze
Les dunes littorales non-boisées d’Aquitaine hébergent une flore d’une grande patrimonialité avec de nombreuses espèces endémiques (Hieracium eriophorum, Linaria thymifolia, Silene uniflora subsp. thorei, etc.). Les végétations dunaires sont adaptées aux conditions extrêmes du littoral (sols xériques et pauvres en nutriments, embruns salés, vents violents, forte insolation). Ces contraintes, s’atténuant du haut de plage à l’arrière-dune, déterminent leur disposition en bandes parallèles successives sur le cordon dunaire. Se retrouvent ainsi des communautés de sables très mobiles régulièrement remaniées, des communautés de sables fixés, en passant par des communautés hygrophiles à aquatiques à la faveur de dépressions où la nappe affleure (pannes dunaires). Dans le contexte du changement climatique avec des sécheresses et canicules plus intenses, la composition floristique de ces végétations pourrait changer avec la progression d’espèces thermophiles d’affinités méditerranéennes et la régression d’espèces de pannes dunaires liées à la présence d’eau. De plus, l’ensemble de ce système dunaire subit d’importantes perturbations engendrées par l’érosion marine depuis plusieurs décennies (effondrement de dune blanche, disparition de dune embryonnaire), et qui devraient s’accentuer sous l’action d’un réchauffement climatique .
Pour identifier et mesurer les effets du changement climatique sur les communautés végétales de dunes ouvertes, l’objectif est de suivre dans le temps et dans l’espace : 1- leur structure (types biologiques dominants, hauteur, recouvrement) et 2- leur composition floristique (diversité spécifique, cortèges indicateurs, fréquence relative des espèces, spectre chorologique).
1.1 Sélection des sites
En ex-Aquitaine, le cordon dunaire est continu et s’étend sur près de 230 kilomètres entre la pointe de Grave au nord et l’estuaire de l’Adour au sud. La partie littorale non-boisée est plus ou moins large selon les secteurs, entre 50m et 700m. Le cordon dunaire se prolonge également de l’embouchure de la Gironde jusqu’à La Tremblade sur le littoral de Charente-Maritime, et de façon plus fragmentaire et de plus faible largeur sur les îles de Ré et d’Oléron.
Depuis 1997, l’Office National des Forêts (ONF) assure un suivi régulier des végétations dunaires non-boisées par un système de transect afin d’observer la proportion et la répartition des différentes communautés dans le temps et dans l’espace . Dans l’objectif d’un suivi fin et d’une vision exhaustive à l’échelle du cordon dunaire, 97 transects sont ainsi positionnés, soit un tous les 2 à 3 kilomètres et relus tous les 6 ans.
Situation géographique des suivis préexistants (ONF) et des zones potentielles de suivi en Nouvelle-Aquitaine
Les suivis des communautés végétales dunaires, dans le cadre du programme les sentinelles du climat, se reposeront essentiellement sur ce réseau existant et éprouvé afin de mutualiser les dispositifs mis en place en accord avec l’ONF. Le changement climatique intervenant sur un pas de temps long, ce réseau apporte un recul sur ce milieu par la présence de données historiques depuis de nombreuses années (première lecture en 1997), nécessaires pour l’ajustement des modèles . De plus, un état de référence sur la flore et les communautés végétales en 2015 réalisé par le Conservatoire Botanique National Sud-Atlantique (CBNSA) permet d’avoir une base de connaissance solide pour l’étude de cet écosystème. Pour une meilleure détection et compréhension des effets du changement climatique sur ces habitats à l’échelle régionale, il convient d’enrichir ce réseau avec de nouveaux dispositifs sur le cordon dunaire de Charente-Maritime. Cela permettra notamment de détecter les secteurs de plus grande sensibilité face au changement climatique.
L’identification des transects préexistants à suivre en termes de végétations s’effectuera en 2018. Elle s’appuiera notamment sur la présence de communautés de dunes grises, d’ourlets et landes et de fourrés bien exprimés relevant de l’Euphorbio portlandicae – Helichrysion stoechadis Géhu & Tüxen ex G. Sissingh 1974, du Cisto salviifolii – Ericion cinereae Géhu in Bardat et al., 2004, du Lonicerion periclymeni Géhu, B. Foucault & Delelis 1983 nom. inval. (art. 17) ou de l’Ulici europaei – Cytision striati Rivas Mart., Báscones, T.E. Diáz, Fern. Gonz. & Loidi 1991. Les possibilités d’extension au cordon dunaire de Charente-Maritime seront également étudiées en concertation avec l’ONF en 2018-2019.
1.2 Définition et positionnement des points d'échantillonnage
Le suivi des végétations dunaires non-boisées en lien avec les évolutions climatiques dans le cadre des sentinelles du climat reprend les mêmes principes d’échantillonnage que pour le réseau de l’ONF ; c’est-à-dire un système de transect orienté perpendiculairement au cordon dunaire, de la lisière forestière jusqu’au haut de plage.
Ce type de dispositif permet à la fois une étude diachronique de la zone de cordon dunaire, pour suivre dans le temps et dans l’espace l’évolution des communautés végétales, et une étude synchronique pour décrire l’organisation spatiale et la composition floristique des groupements .
La répartition spatiale des communautés végétales étant surtout expliquée par les gradients topographiques et de contraintes (embruns salés, dépôts sableux), le transect est placé en répondant aux critères suivants :
– Départ du transect au niveau de la lisière forestière (fourrés littoraux) à partir de coordonnées GPS ;
– Transect perpendiculaire au cordon selon un azimut prédéfini.
Dans l’objectif d’un suivi à moyen/long terme (plusieurs décennies) et afin d’assurer la relocalisation précise et la pérennité du dispositif, le point de départ du transect est géo référencé par ses coordonnées GPS. La forte érosion marine s’opérant dans certaines zones entraîne une migration et un décalage des communautés végétales vers l’est . Dans l’objectif de suivre à chaque lecture toutes les communautés de dunes non-boisées, le point de départ du transect est redéfini au niveau de la nouvelle zone de lisière forestière. Le cordon dunaire étant un milieu en perpétuelle évolution topographique, une matérialisation de transect par des repères fixes peut s’avérer inutile dans certaines zones car trop éphémère. Le temps de la lecture, le transect est matérialisé à l’aide d’un topofil tendu au ras du sol.
La localisation du point de départ du transect est rapide une fois sur le site, à l’aide d’un GPS et avec les coordonnées précises du point. La durée de lecture du transect dépend de sa longueur et de la diversité des communautés ; elle peut être estimée autour de 2h à 3h.
Les caractéristiques de chaque transect ONF sur le cordon dunaire suivi dans le cadre du programme ainsi que toutes les cartes de localisation seront précisées dans le rapport 2018. Un exemple de situation est présenté ci-après :
Exemple de situation des transects sur le cordon dunaire (fond IGN BD Ortho)
Exemple de situation des transects sur le cordon dunaire (fond IGN Scan25)
1.3 Méthodes de relevés et détermination des espèces et des communautés végétales
La méthode de suivi des végétations dunaires développée par l’ONF , et ajustée par le CBN Sud-Atlantique consiste à relever et renseigner, par transect :
– l’ensemble des espèces végétales présentes à travers l’approche phytosociologique (relevés phytosociologiques et géosymphytosociologiques) ;
– les conditions stationnelles (topographie, comportement du sable) rencontrées ;
– la largeur occupée par les différentes végétations ou habitats dunaires.
L’objectif étant de suivre dans le temps et dans l’espace la structuration des communautés végétales (types biologiques dominants, hauteur, recouvrement) et leur composition floristique (diversité spécifique, cortèges indicateurs, fréquence relative des espèces, spectre chorologique), cette méthode apparaît pertinente pour suivre leur évolution en lien avec le changement climatique. En effet, elle permet une détection relativement fine des variations de composition floristique localement et donc un suivi exhaustif de la chorologie des espèces le long du littoral dunaire à travers le nombre conséquent de transects.
Pour mener ce travail, c’est la phytosociologie sigmatiste est retenue car elle est basée sur une démarche rigoureuse et éprouvée, dotée d’un référentiel structuré et régulièrement mis à jour aux échelles internationale, nationale et régionale .
Le relevé phytosociologique consiste en la réalisation de relevés floristiques exhaustifs effectués sur une surface de végétation physionomiquement, écologiquement (exposition, pente, substrat, luminosité…) et floristiquement la plus homogène possible. La surface optimale ou aire minimale est un compromis entre une surface suffisamment homogène et une surface représentative du type de milieu. Des coefficients dits d’abondance-dominance de Braun-Blanquet sont attribués à chaque espèce pour indiquer son recouvrement au sein de chaque strate de la placette. Enfin, la date, l’observateur, la localisation (point GPS, lieu-dit), les caractères généraux de la station (pente, exposition, altitude, topographie, substrat…) et de la formation végétale inventoriée (trophie, physionomie…), accompagnés d’une description brève (ex : Pelouse à immortelle sur sables semi-fixés) sont renseignés. Un bordereau d’inventaire phytosociologique standardisé est proposé par le CBNSA.
Ainsi, un relevé phytosociologique est réalisé au sein de chaque communauté végétale (pelouse annuelle, pelouse vivace, ourlet, fourré) présente dans le long d’un transect. Ces relevés sont rattachés, directement ou a posteriori, à un syntaxon existant ou à définir dans le référentiel phytosociologique.
La prise de photo est conseillée pour une aide à l’interprétation et garder une vision du site lors des différentes lectures.
En pratique, l’observateur part de la frange forestière où figure le point de départ du transect, et chemine le long du transect selon un azimut prédéfini de sorte que le transect soit perpendiculaire au cordon dunaire. Il effectue alors des relevés phytosociologiques sur des stations circulaires de l’ordre de 100 m² à chaque nouvelle communauté rencontrée. La distance entre relevés ne doit pas dépasser 30 mètres, même lorsque le milieu est homogène. L’observateur enregistre également au fur et à mesure la « distance » de chaque relevé au point de départ à l’aide d’un topofil.
Schéma du profil topographique dunaire avec répartition théorique des relevés
La détermination des espèces végétales non-identifiées peut s’effectuer directement sur le terrain à l’aide d’une flore et d’une loupe (x10 minimum). Dans le cas de critères délicats à appréhender in situ, l’identification se fera ultérieurement en laboratoire, avec un matériel adéquat (loupe binoculaire, microscope…), sur des échantillons prélevés si possible hors de la zone d’étude. Concernant les espèces rares ou protégées, la détermination devra se faire autant que possible sur photos ou in situ sans prélèvement.
Pour l’étude des végétations dunaires, le champ d’investigation taxonomique concerne uniquement les spermatophytes et ptéridophytes, excluant donc les bryophytes et lichens trop complexes à appréhender. Le référentiel taxonomique suit la version la plus récente de TaxRef (actuellement version 9, ).
Les flores utilisées sont diverses :
– Flora Gallica ,
– Flore du Pays Basque et des régions limitrophes ,
– Flore de France méditerranéenne continentale ,
– Flore descriptive et illustrée de la France, de la Corse et des contrées limitrophes (Tomes 1 à 3) .
Le référentiel syntaxonomique des végétations utilisé est celui du CBNSA, version du 19/09/2017 . Ce référentiel, basé initialement sur le Prodrome des végétations de France , est corrigé et complété au niveau syntaxonomique le plus fin possible (association, sous-association, variante, etc.) à partir des travaux de synthèse récents, des publications effectuées dans le cadre de la déclinaison du prodrome des végétations de France II et des connaissances actuelles acquises par le CBNSA sur les végétations de son territoire d’agrément (OBV atlas en ligne).
Pour la mise en place et la lecture des transects dunaires, le matériel requis est le suivant :
– appareil GPS (GPS submétrique si possible) ;
– topofil avec mesure de distance (400 m minimum) ;
– boussole ;
– appareil photo.
1.4 Période optimale de suivi
Les végétations des dunes non-boisées connaissent leur optimum phénologique entre début mai et début juillet ; c’est-à-dire la période durant laquelle la majorité du cortège floristique est en floraison. Afin de noter et pouvoir identifier le maximum d’espèces, les inventaires et suivis doivent s’effectuer durant cette période .
1.5 Nombre de campagne de relevés
Une seule campagne de relevés est réalisée pour chaque année de suivi. En effet, la majorité du cortège floristique étant observable dans le cas d’une lecture pendant la période phénologique optimale, la réalisation de plusieurs campagnes n’offre qu’un intérêt limité.
Les végétations dunaires et leur agencement résultent d’un blocage dynamique dû aux contraintes rencontrées sur le littoral ; par définition, elles sont donc très peu dynamiques en absence de perturbations d’origine anthropiques directes (eutrophisation, plantations). En revanche, l’érosion marine rend ces végétations relativement changeantes spatialement. De plus, elles peuvent être impactées en cas d’aléas climatiques extrêmes (forte sécheresse, canicule…) répétés. Pour ces raisons, le délai entre chaque campagne de suivis a été fixé à 6 ans par l’ONF. Les précédentes campagnes ont eu lieu lors des années 1997, 2003, 2009 et 2015, la prochaine est donc prévue pour l’année 2021. Les impacts du changement climatique sur ces milieux intervenant à une échelle de temps assez large, ce délai apparaît raisonnable dans le cadre des sentinelles du climat étant donné l’historique des données collectées.
1.6 Fiches de relevés
Pour le suivi des communautés de dunes ouvertes, une fiche de relevés par transect sera élaborée à la suite de tests complémentaires en 2019-2020. Elle se basera sur la fiche conçue par l’ONF pour le suivi de ces communautés, modifiée et ajustée en fonction des propositions définies par .
1.7 Discussion
Les protocoles de suivi conçus par l’ONF étant calibrés pour observer la proportion et la répartition des différentes communautés dans le temps et dans l’espace selon des critères principalement physionomiques, le CBN Sud-Atlantique a fait des propositions d’ajustements pour tenir compte davantage de critères floristiques afin d’évaluer l’état de conservation des habitats. Ces compléments ou modifications semblent en adéquation avec le suivi des paramètres retenus (présence, structure, composition floristique et largeur de chaque communauté végétale) pour mesurer les effets du changement climatique. Ces protocoles semblent assez précis car intégrant plusieurs échelles spatiales et temporelles et permettant la détection de variations floristiques fines pour un écosystème qui devrait connaître une accentuation des phénomènes climatiques à l’avenir .
Toutefois, les transects ne prennent en compte que les végétations de la xérosère (sur substrat nu et sec, en biotope xérique) ; or les communautés humides de dépressions arrière-dunaires (hygrosère) sont également très intéressantes car sensibles aux épisodes de sécheresse intense, peu fréquentes et abritant des espèces patrimoniales. Une extension des dispositifs de suivi à ces zones relictuelles de fort intérêt à la fois floristique et faunistique semble pertinente et mérite une réflexion plus approfondie. Concernant la végétation, l’identification des zones de suivi favorables s’appuiera sur l’étude typologique réalisée en 2015
738890729D3QMU6items1apadefaultASChttps://technique.sentinelles-climat.org/wp-content/plugins/zotpress/
, illustrant la répartition des communautés ciblées relevant de l’Hydrocotylo vulgaris – Schoenion nigricantis de Foucault 2008, et sur les données de l’Observatoire de la Biodiversité Végétale de Nouvelle-Aquitaine (OBV atlas en ligne).
Figure 5 : Situation géographique des zones potentielles de suivi de pannes dunaires
Concernant la période de suivi, il existe de nombreuses communautés thérophytiques dont l’optimum phénologique intervient entre fin mars et fin mai, soit légèrement décalé par rapport aux communautés vivaces. De même, les communautés de laisses de mer connaissent un optimum décalé puisqu’intervenant entre août et septembre. Ainsi, selon la date de lecture d’un transect, certaines communautés ne pourront pas être contactées ou du moins pas dans leur état optimal. En théorie, 3 campagnes de relevés par an serait donc nécessaires pour dresser un inventaire floristique exhaustif sur un transect. Des ajustements de la période de suivi et des méthodes de suivi seront à définir en cas de nécessité d’intégration de ces communautés dans les analyses.
Dans le cas des végétations dunaires, la modélisation des effets du changement climatique portera sur plusieurs aspects :
– tout d’abord, l’enrichissement présumé en espèces xéro-thermophiles aux extrêmes nord et sud du littoral, ainsi que la progression/migration d’espèces déjà présentes à partir des extrêmes nord et sud vers le centre du littoral ;
– ensuite, la régression potentielle des espèces plus mésothermes, et éventuellement de celles des pannes dunaires ;
– enfin, la migration transversale des séquences de végétations dunaires (dune embryonnaire, dune blanche, dune grise, etc.) en lien avec l’érosion marine ; ces mesures servant notamment par rapport aux problématiques conservatoires des habitats et des espèces associées (cas des séquences tronquées, disparition de la dune embryonnaire, etc.).
Une analyse des traits de vie des espèces et de leur spectre chorologique pour chaque site permettra, en lien avec les scénarios climatiques du GIEC , de modéliser la niche écologique potentielle future pour les espèces présentant une sensibilité positive (augmentation de la fréquence sur les sites, élargissement de l’aire de répartition) ou négative (diminution de la fréquence, extinction locale).
2 Végétation des pelouses sèches calcicoles
Rédaction : Kévin Romeyer, Anthony Le Fouler
Contribution : Grégory Caze
Les pelouses sèches sur substrats calcaires hébergent une flore thermophile avec de nombreuses espèces patrimoniales au niveau régional (Rhaponticum coniferum, Dorycnium pentaphyllum, Argyrolobium zanonii, Stipa gallica) et national (Anthericum liliago, Sideritis hyssopifolia subsp. guillonii), souvent d’affinités méditerranéennes. Ces végétations vivaces sont adaptées à des sols maigres, pauvres en nutriments, en stations souvent pentues et supportant un déficit hydrique important en période estivale . Toutefois, sujettes à l’abandon de pratiques agricoles et à l’eutrophisation, elles ont fortement régressé ces dernières décennies au profit de communautés plus eutrophiles ou de fourrés denses, dont certaines de manières irréversibles . Dans le contexte du changement climatique, ces pelouses, encore bien exprimées, pourraient connaître une importante modification de leur cortège sur plusieurs aspects : l’apparition et la propagation d’espèces méditerranéennes typiques et le développement de cortèges d’espèces annuelles au profit des vivaces .
Pour identifier et mesurer les effets du changement climatique sur les communautés végétales de pelouses calcaires, l’objectif est de suivre dans le temps et dans l’espace :
1- leur structure (types biologiques dominants, hauteur, recouvrement) ;
2- leur composition floristique (diversité spécifique, cortèges indicateurs, fréquence relative des espèces, spectre chorologique).
2.1 Sélection des sites
En région Nouvelle-Aquitaine, les communautés végétales de pelouses sèches calcicoles sont relativement fréquentes et bien exprimées sur les coteaux calcaires ou marneux du Lot-et-Garonne, de la Dordogne et de la Charente. Elles deviennent plus rares et appauvries floristiquement vers le sud-ouest et le nord de la région où elles se cantonnent à des buttes exposées au sud. Néanmoins, si les patchs bien exprimés de pelouses sont nombreux et garantissent l’expression d’une flore intéressante, ils occupent rarement de grandes surfaces (supérieure à 0,5 ha) et sont généralement en mosaïque avec des végétations plus évoluées dynamiquement d’ourlets et de fourrés (obs. CBNSA).
Situation géographique des zones d’expression des communautés végétales des pelouses sèches calcicoles en Nouvelle-Aquitaine
L’identification des sites de suivi favorables s’appuie, d’une part sur la présence de la flore caractéristique des pelouses sèches calcicoles relevant du Xerobromion erecti (Braun-Blanquet & Moor 1938) Moravec 1967 ou du Mesobromion erecti Braun-Blanquet & Moor 1938 renseignées dans l’Observatoire de la Biodiversité Végétale de Nouvelle-Aquitaine (OBV atlas en ligne), et sur les connaissances et prospections de partenaires/gestionnaires d’autre part. L’étude de la bibliographie a permis de tenir compte de la variabilité et de la répartition des communautés végétales de pelouses .
Ensuite, l’utilisation d’indices d’état ont permis de sélectionner les habitats les plus favorables, c’est-à-dire dans un bon état de conservation. Ces indices sont les suivants :
– niveau faible de dérive trophique, basé sur la fréquence relative des espèces eutrophes au sein du tapis végétal (ex : Senecio vulgaris, Sonchus asper) ;
– fermeture limitée du milieu, basée sur la fréquence relative et le recouvrement d’espèces de stades dynamiques ultérieurs aux pelouses (ex : Brachypodium rupestre, Origanum vulgare, Juniperus communis) ;
– recouvrement de sol nu, basé sur le pourcentage de recouvrement du sol nu et la proportion entre plantes annuelles et plantes vivaces ;
– limitation de perturbations : eutrophisation, surpâturage, exploitation calcaire etc.
Enfin, pour la mise en place de suivis à long terme et l’isolement du facteur climatique, la dimension foncière et paysagère des sites est essentielle en plus de leur bon état de conservation. Ainsi, les sites sont distants d’au moins de 50 mètres de toutes activités anthropiques et bénéficient d’une gestion écologique constante.
Dans le cadre du schéma pluriannuel de suivi des habitats d’intérêts communautaires (HIC) mis en place par le CBN Sud-Atlantique sur son territoire d’agrément , les habitats de pelouses sèches font l’objet d’un suivi régulier pour l’évaluation de l’état de conservation à travers le réseau Natura 2000 (Le Fouler, 2013). L’existence préalable d’un tel réseau de sites de suivi des communautés végétales dans les ex-régions Aquitaine et Poitou-Charentes (Annexe 5), reposant sur des méthodes et paramètres compatibles (structure, composition floristique et recouvrement de chaque communauté) avec ceux exposés ici (Royer, 1982 ; Boullet & Gehu, 1984 ; Royer, 1984 ; Lamothe & Blanchard, 2005 ; Le Fouler, 2013 ; Abadie et al., 2014 ; Fy & Bissot, 2014), permet de mutualiser une partie des dispositifs mis en place et de bénéficier de données historiques sur ces communautés. En Aquitaine, 52 dispositifs de suivi ont ainsi été matérialisés en 2013 sur 27 sites différents , répartis essentiellement dans l’extrême est de l’ex-région (Dordogne et Lot-et-Garonne), correspondant aux zones d’expression optimales des pelouses (surfaces importantes et peu fragmentées, cortèges caractéristiques bien développés). En Poitou-Charentes, ce sont 212 dispositifs de suivi qui ont été matérialisés entre 2012 et 2014, surtout en Charente .
La sélection de nouveaux sites avec une répartition représentative des coteaux à l’échelle de la région Nouvelle-Aquitaine est essentielle pour l’étude de cet habitat en lien avec le changement climatique afin de tenir compte de la variabilité des communautés. Ainsi, la mise en place de suivis hors de la zone d’expression optimale s’effectue, d’une part selon un gradient de pluviosité (Données AURELHY par Météo France) et donc d’appauvrissement en espèces de pelouses très sèches, soit dans des secteurs plus à l’ouest et au sud (Gironde et Pyrénées-Atlantiques) ; et d’autre part selon un gradient thermique et donc d’appauvrissement en espèces thermophiles dans des secteurs plus au nord (Deux-Sèvres, Vienne). Cela devrait permettre de détecter des variations de cortèges (ex : enrichissement en espèces xéro-thermophiles) dans les différentes zones suivies.
En 2017, la sélection définitive des sites et les suivis ont été réalisés uniquement à l’échelle de l’Aquitaine. Au total, 18 sites comportent des dispositifs de suivi des communautés végétales. Ils ont tous fait l’objet d’un suivi protocolé ainsi que d’un inventaire de la flore et des végétations en 2017, et en 2013 pour certains d’entre eux . Ces suivis de communautés végétales sont réalisés en parallèle de suivis sur les cortèges de lépidoptères de pelouses calcicoles.
Situation géographique des sites de suivi des pelouses sèches calcicoles
2.2 Définition et positionnement des points d'échantillonnage
Le suivi des communautés végétales de pelouses sèches calcicoles en lien avec les évolutions climatiques reprend les principes d’échantillonnage élaborés pour l’évaluation de l’état de conservation des habitats d’intérêts communautaires (HIC) pour ces mêmes milieux . Il s’agit d’un système d’échelles emboîtées permettant des analyses complémentaires et une vision représentative des sites du point de vue floristique, structurale et dynamique :
– échelle du coteau entier, soit plusieurs hectares ;
– échelle du complexe pelousaire par un quadrat paysager de 25 m de côté ;
– échelle de la communauté végétale par un quadrat de fréquence de 4 m de côté.
Les données à l’échelle du coteau peuvent être obtenues via des photographies aériennes (couleurs normales et infra-rouge) et ne nécessitent pas d’instrumentalisation sur le site. A moyen terme, des méthodes numériques de segmentation des photographies aériennes pourraient être exploitées (Colloque CarHab, 2017, comm. orale). De même, l’utilisation de drones fournissant des images haute définition pour des sites d’une surface restreinte, comme c’est le cas ici, forme une piste intéressante pour la réalisation de micro-cartographies des végétations.
Les données concernant le complexe pelousaire sont obtenues à l’aide d’un quadrat paysager de 25 m de côté. Après des tests sur le terrain , cette surface de 625 m² semble être le meilleur compromis pour apprécier la mosaïque des communautés végétales sans pour autant être trop grande et empêcher l’observateur d’avoir une vision complète de la zone.
Le positionnement du quadrat paysager est défini après visite du coteau et identification des zones où l’habitat de pelouses sèches est bien exprimé ; il est placé dans une de ces zones, en veillant à avoir également un aperçu des végétations en dynamique et en contact avec les pelouses. Les situations atypiques sont à éviter, l’objectif étant d’être représentatif de l’état du complexe pelousaire sur un site. Le géoréférencement du quadrat est déterminé sur le terrain avec un GPS submétrique par les coordonnées de ses 4 sommets. Le temps de la lecture, il est matérialisé par des piquets temporaires aux 4 sommets et reliés par une rubalise ou un décamètre.
Les données concernant la communauté végétale sont obtenues à l’aide d’un quadrat de fréquence permanent de 4 m de côté à l’intérieur du quadrat paysager. L’aire minimale pour l’étude des pelouses sèches étant estimée autour de 20 m² , la surface de 16 m² de ce quadrat apparaît réduite mais compensée par l’utilisation complémentaire du quadrat paysager. D’après des travaux universitaires , la lecture du quadrat de fréquence s’effectue par l’intermédiaire de 16 quadrats élémentaires de 25 cm de côté.
Le positionnement du quadrat de fréquence à l’intérieur du quadrat paysager correspond généralement au centroïde du quadrat paysager mais peut être adapté à une zone plus adéquate où la communauté de pelouse est bien exprimée.
Schéma de positionnement théorique des quadrats de pelouses sèches
L’orientation du quadrat se fait dans la direction de plus grande pente, soit vers le nord ou vers le haut du coteau. Son géoréférencement est déterminé sur le terrain par les coordonnées de son centroïde. Dans l’objectif d’un suivi à moyen/long terme (plusieurs décennies) et afin d’assurer la relocalisation précise et la pérennité du dispositif, le quadrat de fréquence est délimité à ses sommets par 4 tiges métalliques (acier ou inox) enterrées et affleurant à la surface du sol. Un détecteur de champs magnétiques est nécessaire pour retrouver la position des tiges. Le temps de la lecture, le quadrat est matérialisé par des piquets temporaires aux 4 sommets et reliés par une corde ou rubalise.
La durée de mise en place et de relocalisation des quadrats sur un coteau est estimée à environ 1h. La durée de lecture des 2 types de quadrat n’est pas limitée et peut être estimée autour de 2 à 3h.
2.3 Méthodes de relevés et détermination des espèces et des communautés végétales
Le protocole de suivi des pelouses sèches dépend de l’échelle spatiale considérée.
A l’échelle du coteau, le but est de suivre l’évolution de la surface occupée par les ligneux, témoin directe de la régression/progression des pelouses et plus généralement des habitats ouverts. Pour cela, on réalise une analyse diachronique du recouvrement des ligneux sur la base des photographies aériennes en couleurs et en infrarouge (BD Ortho et IRC de l’IGN) prises à des dates plus ou moins éloignées dans le temps (2 ans minimum).
A l’échelle du quadrat paysager, le but est de suivre l’évolution du complexe pelousaire en termes de structure et de dynamique de végétation. Pour mener ce travail, la phytosociologie sigmatiste est retenue car elle est basée sur une démarche rigoureuse et éprouvée, dotée d’un référentiel structuré et régulièrement mis à jour aux échelles internationale, nationale et régionale . Ainsi, un relevé phytosociologique est réalisé au sein de chaque communauté végétale (pelouse annuelle, pelouse vivace, ourlet, fourré) présente dans le quadrat paysager. Ces relevés sont rattachés, directement ou a posteriori, à un syntaxon existant ou à définir dans le référentiel phytosociologique.
D’autre part, la phytosociologie paysagère ou symphytosociologie est utilisée afin de proportionner les différentes communautés au sein du quadrat. Ici, seule l’homogénéité des conditions écologiques est recherchée (pente, orientation, substrat) pour réaliser un relevé . La liste exhaustive des groupements végétaux présents est notée, auxquels sont associés un coefficient de recouvrement ainsi qu’un indice d’agrégation (isolé, plus ou moins fragmenté, étendu). Le relevé symphytosociologique, ou synrelevé, permet de rendre compte de l’organisation spatiale des groupements et est accompagné d’un croquis. Ces relevés peuvent être rattachés, directement ou a posteriori, à une série dynamique de végétation existante ou à définir .
Schéma d’organisation spatiale des communautés au sein du quadrat paysager
En plus, des photos des communautés inventoriées sont réalisées pour conserver une vision physionomique de celles-ci et aider dans l’interprétation des données.
A l’échelle du quadrat de fréquence, le but est de suivre l’évolution de la structure et de la composition de la communauté de pelouse à un niveau fin de précision. Pour cela, ce quadrat est subdivisé en 16 quadrats élémentaires de 25cm de côté.
Schéma d’organisation théorique des quadrats élémentaires au sein du quadrat de fréquence
Un relevé exhaustif de la flore est réalisé en présence/absence au sein de chacun des quadrats élémentaires avec notation de la hauteur moyenne et du recouvrement des différentes strates présentes. En plus, un relevé complémentaire est réalisé, également en présence/absence, à l’échelle du quadrat de fréquence pour noter les espèces non contactées dans les 16 quadrats élémentaires. Cette méthode présente l’avantage de pouvoir s’abstenir d’une estimation des coefficients de recouvrement, une variable sujette au biais d’interprétation des données engendré par la diversité des observateurs et empêchant la détection de changements subtils dans la composition floristique du tapis végétal étudié . Afin de faciliter la relocalisation des dispositifs, des photos avec prises de vue depuis les 4 sommets et les 4 côtés du quadrat paysager et surtout du quadrat de fréquence, pendant que les dispositifs de lecture sont en place, doivent être réalisées
La détermination des espèces végétales non-identifiées peut s’effectuer directement sur le terrain à l’aide d’une flore et d’une loupe (x10 minimum). Dans le cas de critères délicats à appréhender in situ, l’identification se fera ultérieurement en laboratoire, avec un matériel adéquat (loupe binoculaire, microscope…), sur des échantillons prélevés hors de la zone d’étude. Concernant les espèces rares ou protégées, la détermination devra se faire autant que possible sur photos ou in situ sans prélèvement.
Pour l’étude des végétations calcicoles, le champ d’investigation taxonomique concerne uniquement les spermatophytes et ptéridophytes, excluant donc les bryophytes et lichens trop complexes à appréhender. Le référentiel taxonomique suivi est la version la plus récente de TaxRef (actuellement version 9, ).
Les flores utilisées sont diverses :
– Flora Gallica ,
– Flore de Dordogne ,
– Flore du Pays Basque et des régions limitrophes ,
– Flore de France méditerranéenne continentale ,
– Flore descriptive et illustrée de la France, de la Corse et des contrées limitrophes (Tomes 1 à 3) .
Le référentiel syntaxonomique des végétations utilisé est celui du CBNSA, version du 19/09/2017 .
Afin de maintenir de la clarté dans la lecture, les autorités des syntaxons cités ne seront notées que lors de la première mention (ex : Xerobromion erecti (Braun-Blanquet & Moor 1938) Moravec 1967 puis Xerobromion erecti).
Pour la mise en place et la lecture d’une placette de suivi de pelouses, le matériel requis est le suivant :
– tiges en métal (inox ou acier) x 4 par quadrat ;
– appareil GPS (GPS submétrique si possible) ;
– piquets fins en bois (8 minimum) ;
– corde tressée ou rubalise (120 m minimum) ;
– détecteur de champs magnétiques ;
– marteau ;
– quadrats en carton, plastique ou bois (25 cm de côté) ;
– décamètre (50 m) ;
– appareil photo.
Photo du quadrat élémentaire utilisé pour les pelouses sèches (25 cm de côté)
2.4 Période optimale de suivi
Les pelouses sèches d’Aquitaine connaissent leur optimum phénologique entre mi-mai et fin juin ; c’est-à-dire la période durant laquelle la majorité du cortège floristique est en floraison. Afin de noter et pouvoir identifier le maximum d’espèces, les inventaires et suivis doivent s’effectuer durant cette période comme l’atteste diverses études .
2.5 Nombre de campagnes de relevés
Une seule campagne de relevés est réalisée pour chaque année de suivi. En effet, la quasi-totalité du cortège floristique étant observable dans le cas d’une lecture pendant la période phénologique optimale, la réalisation de plusieurs campagnes n’offre qu’un intérêt limité.
Les pelouses sèches pouvant être un habitat relativement dynamique si les conditions de gestion changent ou en cas d’aléa climatique extrême telles qu’une forte sécheresse ou canicule , le délai entre chaque campagne de suivis est fixé à 2 ans, soit en 2017, 2019 et 2021. En fonction des premières analyses et retours d’expérience, ce délai pourra être rehaussé. En effet, les impacts du changement climatique sur cet habitat intervenant à une échelle de temps bien plus large, des suivis trop rapprochés ont peu d’intérêt.
2.6 Fiche de relevés
Pour les suivis de pelouses sèches calcicoles, 2 types de fiches sont utilisés sur le terrain :
– fiche de renseignement par quadrat de fréquence (liste d’espèces, stratification) ;
– fiche d’évaluation pour quadrat paysager (inventaire symphytosociologique, inventaire floristique complémentaire, altérations, perspectives).
3 Végétation des hêtraies de plaine
Rédaction : Kévin Romeyer, Pierre Lafon, Laurent Chabrol
Contributeur : Grégory Caze
Les forêts à Hêtre (Fagus sylvatica) de plaine forment des habitats intéressants à suivre par rapport au changement climatique car particulièrement sensibles à des épisodes de sécheresses et de canicules plus intenses . En effet, le Hêtre et la flore qui l’accompagne trouvent leur optimum dans les régions plus froides et plus arrosées telles que le nord et l’est de la France et les massifs montagneux.
Cartes de répartition du Hêtre (Fagus sylvatica L., 1753) en France (Source : FCBN, 2016) et en Europe (Source : EUFORGEN, 2009)
Les forêts à Hêtre de plaine sont donc relictuelles de climats plus frais en Nouvelle-Aquitaine. Elles sont très localisées et se développent à la faveur de conditions atmosphériques plus fraîches sur des versants exposés au nord ou en fond de vallon. Ces forêts abritent une flore particulière d’affinités montagnardes avec de nombreuses espèces rares au niveau régional (Carex digitata, Euphorbia hyberna, Erythronium dens-canis etc.). Leur relative fragilité aux phénomènes climatiques et les pratiques sylvicoles productivistes ont fortement contribué à leur régression ces dernières décennies. A l’avenir, elles pourraient disparaître ou se raréfier au profit de végétations forestières plus sèches et plus thermophiles à travers un remplacement d’espèces .
Pour identifier et mesurer les effets du changement climatique sur les communautés végétales de hêtraies, l’objectif est de suivre dans le temps et dans l’espace : 1- leur régénération (densité des semis, mortalité) et 2- leur composition floristique (diversité spécifique, cortèges indicateurs, fréquence relative des espèces, spectre chorologique).
3.1 Sélection des sites
En Nouvelle-Aquitaine, le Hêtre est assez fréquent dans les secteurs sous influences montagnardes et à précipitations importantes telles que le Limousin ou le piémont pyrénéen ; il est en revanche nettement plus dispersé dans le cœur du bassin aquitain. Au sein de cette zone de plaine, il forme rarement des peuplements étendus et bien structurés et obs. CBNSA). De tels peuplements ne se retrouvent qu’à la faveur de conditions locales favorables : pluviosité et/ou humidité atmosphérique importante.
Situation géographique des zones d’expression des communautés végétales de forêt à Hêtre en Nouvelle-Aquitaine
L’identification des sites de suivi favorables s’appuie essentiellement sur les zones de présence du Hêtre renseignées dans l’Observatoire de la Biodiversité Végétale de Nouvelle-Aquitaine (OBV atlas en ligne : ofsa.fr) et la connaissance de terrain des partenaires et gestionnaires. Ensuite, l’étude de la bibliographie a permis de connaître les variations floristiques des différentes communautés ainsi que leur répartition respective. Ces 2 approches ont permis de dégager des secteurs d’intérêt.
En complément, des prospections de terrain ont été réalisées dans certains secteurs de l’ex-région Aquitaine en 2016 et 2017, à travers une étude typologique des communautés forestières à Hêtre, afin d’identifier les sites d’intérêt pour la mise en place de dispositifs. Ces prospections phytosociologiques ont permis d’avoir un premier aperçu de la variabilité écologique et floristique des communautés à Hêtre et serviront pour l’établissement du plan d’échantillonnage de l’année 2018. Il faut distinguer principalement deux types de forêts à Hêtre selon la nature du sol : les Hêtraies acidiphiles, bien représentées dans le Limousin, abritant des cortèges floristiques relativement pauvre et relativement bien connues phytosociologiquement ; et les Hêtraies acidiclinophiles à neutrophiles, abritant une flore plus riche et localisée plutôt dans le piémont pyrénéen.
Les critères de sélection des sites de suivi des communautés végétales à Hêtre sont les suivants :
– représentativité du territoire ;
– variabilité des communautés ;
– surface continue et homogène de peuplement forestier (minimum à définir) ;
– accessibilité du site (maîtrise foncière, droit d’accès et d’instrumentalisation).
D’autre part, l’utilisation d’indices d’état permet de sélectionner les habitats les plus favorables pour la mise en place d’un suivi à long terme. Ces indices sont les suivants :
– structuration forestière, basée sur la présence et le recouvrement de différentes classes d’âge des essences forestières (adultes, jeunes arbres, arbustes, juvéniles) ;
– maturité du peuplement, basée sur la présence du bois mort et de gros bois ;
– occupation par les espèces végétales typiques des communautés à Hêtre ;
– gestion homogène dans le temps et dans l’espace ;
– niveau de perturbations faible : eutrophisation, dégradations par la faune (retournements, écorçage, abroutissement etc.).
Malgré leur vulnérabilité supposée aux évolutions climatiques , il n’existe pas de réseau de suivis fins des forêts à Hêtre en Nouvelle-Aquitaine, en dehors d’une veille en forêts publiques (domaniales ou communales) par l’Office National des Forêts. En 2016, un programme de recherche-action multi-partenarial (piloté par le laboratoire BIOGECO de l’Université de Bordeaux) sur la hêtraie relictuelle de la vallée du Ciron (Bernos-Beaulac, Gironde) a débuté, visant à mieux comprendre les caractéristiques écologiques d’établissement et de maintien de cette population originale de Hêtre datée de 40 000 ans . Dans ce cadre, un suivi du peuplement forestier (croissance, phénologie, fructification) et des conditions météorologiques (humidité / température) ainsi qu’un suivi floristique et phytocoenotique seront réalisés. De même, une hêtraie du piémont pyrénéen à Ancé (Pyrénées-Atlantiques) fait l’objet d’un suivi depuis 1995 dans le cadre de RENECOFOR (REseau National de suivi des ECOsystèmes FORestiers) qui compte 102 placettes à travers la France. Ce réseau national piloté par l’ONF et co-animé par plusieurs laboratoires de recherche et autres structures (BIOGECO, LECA, INRA Nancy, CEMAGREF, CBNMC, bureaux d’études, etc.) s’est construit dans l’objectif d’assurer un suivi floristique des forêts françaises en tenant compte de la diversité de ces dernières . Les axes du suivi des 102 placettes du réseau concernent 1- l’évolution de la flore en lien avec les évolutions des peuplements (tempêtes, coupes) et des retombées atmosphériques ; 2- la comparaison entre sous-placettes encloses et non encloses en lien avec la pression d’herbivorie et 3- les fluctuations annuelles de la flore en lien avec le climat. L’ensemble des placettes est relu a minima tous les 5 ans et quelques-unes font l’objet de suivis annuels pour certains paramètres .
En 2017, 3 sites de suivi ont été validés. Ils ont fait l’objet d’une mise en place des dispositifs ainsi que des tests de protocoles. 5 autres sites font l’objet de discussion avec les propriétaires et gestionnaires pour intégrer le réseau de suivi :
Situation géographique des sites de suivi de communautés végétales de forêts à Hêtre
3.2 Définition et positionnement des points d'échantillonnage
Le suivi des forêts à hêtre en lien avec les évolutions climatiques dans le cadre des sentinelles du climat reprendra les mêmes principes d’échantillonnage que pour les suivis du réseau RENECOFOR , avec quelques ajustements. L’objectif est ici d’assurer la compatibilité des protocoles et des données collectées entre ces 2 programmes de suivis.
Ces forêts étant généralement homogènes au niveau topographique, c’est un système d’échelles emboîtées qui sera utiliser car permettant des analyses complémentaires et une vision représentative des sites du point de vue floristique et fonctionnelle :
– échelle du complexe forestier par une placette de 60m de côté,
– échelle de la communauté végétale par 4 bandes de 50m de long et 2m de large.
La surface de 3600m² d’une placette forestière semble être le meilleur compromis pour apprécier l’évolution structurelle, floristique et fonctionnelle sans pour autant être trop grande et empêcher l’observateur d’avoir une vision représentative de l’écosystème étudié.
Le positionnement d’une placette forestière est défini après visite d’un site et identification des zones où la communauté de hêtraie est bien représentée et estimée en bon état de conservation. Elle est placée de sorte à éviter les effets de lisières avec les communautés végétales adjacentes ou des zones perturbées (bords de chemin, talus routier). Le géoréférencement de la placette est également déterminé sur le terrain avec un GPS (GPS submétrique si possible) par les coordonnées de ses 4 sommets. Le niveau d’imprécision engendré par celui-ci est considéré comme acceptable compte-tenu de la grande taille de la placette forestière. Le temps de la lecture, celle-ci est matérialisée par des piquets temporaires aux 4 sommets éventuellement reliés par une rubalise.
L’aire minimale pour l’étude des communautés forestières étant estimée entre de 150 et 800m² selon les auteurs et le type de forêt, la surface totale de 400m² des bandes apparaît adéquate étant donné l’utilisation complémentaire des données collectées sur la placette forestière.
Le positionnement de ces 4 bandes se fait à l’intérieur de la placette dans une zone représentative et bien exprimée du sous-bois. La disposition des bandes les unes par rapport aux autres peut se faire de différentes façons selon la configuration du site :
Schémas d’organisation possible des bandes au sein de la placette forestière (schéma de droite d’après Ulrich et Cecchini (2009)
Elles doivent toutes les 4 se situer au sein de la même communauté végétale et respecter les conditions d’homogénéité écologiques, floristiques et physionomiques. Leur géoréférencement est déterminé sur le terrain par les coordonnées de ses 4 sommets. Dans l’objectif d’un suivi à moyen/long terme (plusieurs décennies) et afin d’assurer la relocalisation précise et la pérennité du dispositif, chaque bande est matérialisée aux extrémités par 2 bornes de géomètres. Un détecteur de champs magnétiques peut être nécessaire pour retrouver la position des bornes. Le temps de la lecture, les bandes sont matérialisées par des piquets temporaires aux 4 sommets et reliés par une corde ou rubalise.
La durée de mise en place et de relocalisation des bandes et de la placette forestière sur un site est estimée autour de 1h. La durée de lecture des 4 bandes et de la placette n’est pas limitée et peut être estimée entre 3 et 4h. La présence d’au moins 2 observateurs est recommandée.
Les caractéristiques des dispositifs mis en place sont détaillées dans le tableau ci-dessous. Il synthétise, par site, le code du suivi utilisé, le type de dispositif, leur surface respective :
Caractéristiques des dispositifs de suivi de hêtraies par site
3.3 Méthodes de relevés et détermination des espèces
3.3.1 Placettes forestières
A l’échelle de la placette forestière, le but est de suivre l’évolution de la structuration et de la régénération du peuplement de Hêtre, de la composition floristique, ainsi que des conditions pédo-climatiques. Pour mener ce travail, la phytosociologie sigmatiste est retenue car basée sur une démarche rigoureuse et éprouvée, associée à des mesures pédologiques, climatiques, de régénération et éventuellement phénologiques.
Ici, un relevé de 400 m² permet un compromis entre l’aire minimale et la configuration du terrain qui ne permet pas systématiquement de réaliser des relevés sur de grandes surfaces comme dans la vallée du Ciron ou de Roquefort (obs. CBNSA).
Un carottage du sol à la tarière est prévu afin de mesurer la profondeur des différents horizons, leur texture et leur granulométrie ; et déterminer le type d’humus et le taux de matière organique. Le protocole sera détaillé ultérieurement, après réalisation de tests sur le terrain et avec l’appui de services compétents.
Des indicateurs et des protocoles de suivi de la phénologie et de la régénération du peuplement, tels que la densité de plantules des essences forestières par unité de surface, le taux et l’origine de la mortalité des plantules ou les dates de débourrement, seront développés sur la base de protocoles éprouvés et utilisés dans la région .
3.3.2 Echelle des bandes forestières
A l’échelle des bandes, le but est de suivre l’évolution de la structure et de la composition de la communauté de sous-bois à un niveau fin de précision. Pour cela, un relevé exhaustif de la flore est réalisé en présence/absence au sein de chaque bande avec notation de la hauteur moyenne et du recouvrement des différentes strates présentes. En plus, un relevé complémentaire est réalisé, également en présence/absence, selon la méthode des points-contacts au centre de chaque bande.
Schéma illustrant la méthode des points-contacts le long d’une bande
Cette méthode consiste à pointer tous les 25 cm, à l’aide d’une tige, les espèces présentes le long d’un transect de 50 m matérialisé par un décamètre. Cela présente l’avantage de pouvoir s’abstenir d’une estimation des coefficients de recouvrement, une variable sujette au biais d’interprétation des données engendré par la diversité des observateurs et empêchant la détection de changements subtils dans la composition floristique du tapis végétal étudié. En effet, cette méthode est largement éprouvée et utilisée dans de nombreux travaux universitaires de suivi de végétation ; de plus elle semble particulièrement pertinente pour estimer des recouvrements d’espèces .
Ainsi, 200 points-contacts sont effectués sur chacune des bandes soit 800 sur l’ensemble.
La détermination des espèces végétales non-identifiées peut s’effectuer directement sur le terrain à l’aide d’une flore et d’une loupe (x10 minimum). Dans le cas de critères délicats à appréhender in situ, l’identification se fera ultérieurement en laboratoire, avec un matériel adéquat (loupe binoculaire, microscope…), sur des échantillons prélevés hors de la zone d’étude. Concernant les espèces rares ou protégées, la détermination devra se faire autant que possible sur photos ou in situ sans prélèvement.
Pour l’étude des forêts à hêtre en Aquitaine, le champ d’investigation taxonomique concerne les spermatophytes, ptéridophytes et bryophytes, les lichens sont exclus car trop complexes à appréhender. Le référentiel taxonomique suivi est la version la plus récente de TaxRef (actuellement version 9, ).
Les flores utilisées sont diverses :
– Flora Gallica ,
– Flore de Dordogne ,
– Flore du Pays Basque et des régions limitrophes ,
– Flore forestière française Tomes 1-3 ,
– Flore descriptive et illustrée de la France, de la Corse et des contrées limitrophes (Tomes 1 à 3) ,
– Les fougères et plantes alliées de France et d’Europe occidentale ,
– Mosses and liverworts of Britain and Ireland .
Le référentiel syntaxonomique des végétations utilisé est celui du CBNSA, version du 19/09/2017 .
Pour la mise en place et la lecture d’une placette de hêtraie, le matériel requis est provisoirement le suivant :
– bornes de géomètre (+ tiges d’ancrage) pour les 4 bandes (2 par bande) ;
– appareil GPS (GPS submétrique si possible) ;
– piquets fins en bois (8 minimum) ;
– corde tressée ou rubalise (6 x 100 m minimum) ;
– détecteur de champs magnétiques ;
– marteau ;
– tarière à têtes pour sol pierreux et pour sol mélangé ;
– décamètre(s) (60 m) ;
– appareil de visée ;
– appareil photo.
3.4 Période optimale de suivi
Les forêts à Hêtre présentes en Nouvelle-Aquitaine regroupent différentes communautés dont les optimums phénologiques divergent quelques peu en fonction du substrat, de l’exposition et du mésoclimat. Ainsi, le sous-bois des hêtraies sèches sur calcaire connaîtra son optimum de développement entre fin avril et fin juin ; tandis que cela sera plutôt entre fin mai et fin juillet pour les hêtraies sur sol acide et sous climat pluvieux. Afin de noter et pouvoir identifier le maximum d’espèces, les inventaires et suivis doivent s’effectuer durant la période adaptée comme l’atteste diverses études .
3.5 Nombre de campagnes de relevés
Une seule campagne de relevés, réalisée lors de la période optimale du type de forêt, est envisagée pour chaque année de suivi. En effet, la grande majorité des espèces composant ces forêts étant observables lors de la période optimale, la réalisation de plusieurs campagnes n’offre qu’un intérêt limité.
Les végétations forestières étant à inertie forte, elles sont par définition stables sans perturbations anthropiques (coupe, débroussaillement du sous-bois) ou aléas climatiques extrêmes (tempête, incendie). Dans le cas du changement climatique avec une modification de conditions hydriques (pluviosité, humidité atmosphérique) et de température (canicule) , elles peuvent pourtant être particulièrement sensibles avec notamment des dépérissements et l’apparition d’une flore plus héliophile et opportuniste. Ainsi, le délai entre les 2 premières campagnes de suivis est fixé à 3 ans (2017 et 2020). Ensuite, il serait intéressant de calibrer le suivi de ce réseau de hêtraies sur les campagnes de suivis RENECOFOR soit tous les 5 ans à partir de 2020 ; cela permettra des lectures synchrones et donc des comparaisons à plus large échelle. Les impacts du changement climatique sur ces habitats intervenant à une échelle de temps assez large , des suivis trop rapprochés ont peu d’intérêt.
Toutefois, les indicateurs phénologiques et de régénération étant liés aux variations climatiques saisonnières , une campagne de relevés spécifique à ces indicateurs chaque année serait pertinente.
3.6 Fiches de relevés
Pour le suivi des forêts, une fiche de relevés spécifique sera conçue en 2018, basée sur les fiches de suivi RENECOFOR et ajustée en fonction des indicateurs retenus. Elle reprendra les différentes informations à renseigner :
– métadonnées et informations générales sur la placette,
– localisation et caractéristiques des bandes ;
– relevés floristiques et informations physionomiques par bande ;
– relevés en points-contacts par bande ;
– informations pédologiques issues du carottage ;
– relevés des indicateurs phénologiques et de régénération.
4 Végétation des tourbières et bas-marais acidiphiles
Rédaction : Kévin Romeyer
Contribution : Grégory Caze
Les communautés végétales de tourbières et bas-marais acidiphiles trouvent leur optimum dans les régions froides (boréaux-montagnardes) où la décomposition de matière organique en condition anaérobie est fortement réduite.
Carte de répartition de Trichophorum cespitosum, espèce caractéristique des tourbières, en France (FCBN, 2016)
De ce fait elles sont intéressantes à suivre en lien avec le changement climatique car particulièrement sensibles à des épisodes de sécheresses et de canicules plus intenses . Les tourbières forment ainsi des reliques glaciaires en Nouvelle-Aquitaine. Les végétations qui les composent sont adaptées à un engorgement régulier par des eaux pauvres en nutriments et acides. Ces contraintes permettent le développement d’une flore particulière avec de nombreuses espèces patrimoniales au niveau régional (Menyanthes trifoliata, Narthecium ossifragum, Parnassia palustris, Sphagnum magellanicum) et national (Rhyncospora fusca, Drosera rotundifolia, Lycopodiella inundata). Dans le contexte du changement climatique avec des modifications de régime hydrique (en baisse ou saisonnalité plus marquée de la pluviosité, augmentation de l’évapotranspiration, abaissement des nappes), les végétations de tourbières pourraient disparaître ou se raréfier au profit de végétations de landes et fourrés et/ou de communautés moins oligotrophiles .
Pour identifier et mesurer les effets du changement climatique sur les communautés végétales de tourbières et bas-marais acidiphiles, l’objectif est de suivre dans le temps et dans l’espace :
1- leur structure (types biologiques dominants, hauteur, recouvrement) ;
2- leur composition floristique (diversité spécifique, cortèges indicateurs, fréquence relative des espèces, spectre chorologique).
4.1 Séléction des sites
En plaine de la région Nouvelle-Aquitaine, les habitats de tourbières et bas-marais acidiphiles sont peu fréquents et très fragmentés, ils se cantonnent aux dépressions sur sables acides du plateau landais et dans quelques secteurs de Dordogne et des Charentes. De plus, ils occupent rarement des surfaces importantes (supérieures à 0,5 ha) et bien exprimés floristiquement et fonctionnellement. En se rapprochant des zones sous influences boréo-montagnardes de la région, en Limousin et Pyrénées-Atlantiques, ces habitats deviennent plus fréquents et mieux exprimés. Ils demeurent toutefois en limite d’aire méridionale de répartition et forment également des habitats sensibles aux évolutions climatiques annoncées .
Situation géographique des zones d’expression des communautés végétales de tourbières et bas-marais acidiphiles en Nouvelle-Aquitaine
L’identification des sites de suivi favorables s’appuie d’abord sur la présence de la flore caractéristique des hauts et bas-marais relevant de l’Oxycocco palustris – Ericion tetralicis Nordh. ex Tüxen 1937, du Rhynchosporion albae W. Koch 1926, du Caricion fuscae W. Koch 1926 ou de l’Hydrocotylo vulgaris – Schoenion nigricantis B. Foucault 2008 renseignées dans l’Observatoire de la Biodiversité Végétale de Nouvelle-Aquitaine (OBV atlas en ligne) d’une part et les connaissances et prospections de partenaires/gestionnaires et l’étude de la bibliographie d’autre part.
Ensuite, l’utilisation d’indices d’état ont permis de sélectionner les habitats les plus favorables, c’est-à-dire dans un bon état de conservation. Ces indices sont les suivants :
– surface d’habitat, basée sur l’aire d’expression optimale des communautés (0,5 à 1 ha pour les tourbières) en excluant les linéaires de faible largeur (inférieure à 70 m) ;
– occupation par les espèces typiques (Eriophorum , Sphagnum sp., Narthecium ossifragum, Erica tetralix, Rhyncospora sp., Drosera sp.) ;
– recouvrement par les sphaignes, notamment les espèces hygrophiles et ombro-hygrophiles (ex : Sphagnum magellanicum) ;
– fermeture limitée du milieu, basée sur la fréquence relative et le recouvrement d’espèces de landes et de stades dynamiques ultérieurs (ex : Erica scoparia, Frangula alnus, Salix atrocinerea, Betula pubescens) ;
– gestion homogène dans le temps et dans l’espace ;
– limitation des perturbations : drains, eutrophisation, surpâturage, etc.
L’existence préalable d’un réseau de sites de suivi des communautés végétales de tourbières dans l’ex-région Aquitaine pour l’évaluation des HIC, reposant sur des méthodes et indicateurs compatibles (structure, composition floristique et taux de recouvrement de chaque communauté végétale) avec ceux exposés ici , permet de mutualiser une partie des dispositifs mis en place et de bénéficier de données historiques sur ces communautés depuis 2014. Ainsi, 14 dispositifs de suivi ont été matérialisés en 2014 sur 7 sites différents, répartis essentiellement sur le plateau landais (Gironde et Landes).
D’autre part, dans le cadre de l’OPCC2 (Observatoire Pyrénéen du Changement Climatique) et du POCTEFA 2014-2020 (Programme opérationnel de coopération territoriale Espagne, France, Andorre), les tourbières de la chaîne pyrénéenne font l’objet d’un suivi par rapport aux impacts du changement climatique. Un renforcement des suivis de tourbières en montagne à travers le programme les sentinelles du climat apportera une synergie des données collectées entre programmes. En plus, cela apparaît complémentaire avec le réseau de suivis développé en plaine sur ces mêmes habitats, apportant un gradient altitudinal et donc climatique très intéressant pour la mesure des phénomènes de résilience floristique et fonctionnelle. Ces végétations originales sont assez bien représentées dans le département des Pyrénées-Atlantiques. La mise en place de suivis de ces végétations à fort intérêt patrimonial se heurte toutefois à un inconvénient majeur dans ce département : la difficulté de trouver des sites en bon état de conservation et non ou peu pâturés (L. Olicard – CBNPMP, com. pers.). Cela représente une condition essentielle afin de mesurer la réponse de la végétation aux impacts spécifiques du changement climatique et non ceux du pâturage.
Etant donné le faible nombre de site potentiels pour la mise en place de suivis à long terme, notamment en plaine, la sélection s’est d’abord orientée sur les sites les plus favorables avec une répartition représentative à l’échelle de la région et en tenant compte du gradient altitudinal ou d’influences boréo-montagnardes La comparaison des conditions climatiques et de la réponse des communautés végétales entre sites sous différentes influences sera intéressante pour évaluer la résilience de ces habitats dans le contexte du changement climatique.
Situation géographique des sites de suivi de communautés végétales de tourbières et bas-marais acidiphiles
Le réseau est donc actuellement constitué de 10 sites validés. Parmi eux, 4 se trouvent en Limousin dans la Haute-Vienne, soit des secteurs de relativement basse altitude (290 à 550m). 2 sites se situent en plaine au sein du plateau landais en Gironde et dans les Landes ; et un autre est localisé dans le piémont pyrénéen. Enfin, 3 se retrouvent à plus haute altitude (850 à 1450m) dans les Pyrénées-Atlantique.
4.2 Définition et positionnement des points d'échantillonnage
Le suivi de tourbières en lien avec les évolutions climatiques reprend les mêmes principes d’échantillonnage que pour l’évaluation de l’état de conservation dans le cadre du suivi des HIC pour Natura 2000 .
Pour ces milieux, associant généralement des végétations liées à différents niveaux topographiques, la méthode de suivi s’appuie sur un système de transect, avec plusieurs quadrats de fréquence de 1 m de côté disposés le long de celui-ci.
La longueur et le positionnement des transects dépendent des conditions écologiques et de la surface occupée par les végétations à suivre sur chacun des sites. Un transect pourra ainsi être sécant par rapport au suintement ou au cours d’eau. Les deux extrémités du transect sont géolocalisées par GPS , et matérialisées par l’installation de piquets en bois (ex : robinier). Le temps de la lecture, le transect est matérialisé par un décamètre reliant les piquets permanents et les éventuels piquets temporaires :
Exemple de positionnement de transect et quadrats sur un site de tourbière
Le positionnement des quadrats de fréquence doit se faire le long du transect à intervalles réguliers dans le cas de végétations assez bien cloisonnées, ou définis par l’observateur dans le cas de végétations imbriquées liées à une topographie irrégulière afin de garantir une homogénéité floristico-écologique à l’échelle du quadrat. Les mêmes intervalles doivent être respectés entre chaque lecture.
La durée de mise en place et de relocalisation des quadrats et transects sur un site est estimée autour de 30 minutes. La durée de lecture du transect n’est pas limitée, elle dépend du nombre de quadrats et peut être estimée entre 15 et 20 minutes par quadrat.
Les caractéristiques de l’ensemble des dispositifs mis en place sur les sites de tourbières et bas-marais sont présentées ci-après. Ce tableau synthétise, par site, le code du suivi utilisé, les types et nombre de dispositifs et leur longueur respective :
Caractéristiques des dispositifs de suivi de tourbières et bas-marais par site
4.3 Méthodes de relevés et détermination des espèces et des communautés végétales
Le protocole de suivi des tourbières et bas-marais dépend de l’échelle spatiale considérée et du type de dispositif en place.
A l’échelle du transect, l’objectif est de mesurer l’évolution des végétations en réponse à des changements du niveau hydrique. Le long de ce transect, les différentes végétations sont notées avec éventuellement des relevés phytosociologiques au sein de chacune. Afin de proportionner les différentes communautés et rendre compte de leur organisation spatiale sur le site, un coefficient de recouvrement ainsi qu’un indice d’agrégation (isolé, plus ou moins fragmenté, étendu) peuvent être associés à chacune d’elle. En plus, pour conserver une vision physionomique du site, et aider dans l’interprétation des données et dans la relocalisation des dispositifs, des photos avec prises de vue du départ, de l’arrivée et si possible de l’ensemble du transect sont réalisées, ainsi que pour chaque communauté observée.
A l’échelle du quadrat de fréquence (1 m de côté), le but est de suivre l’évolution de la structure et de la composition floristique de la communauté à un niveau fin de précision. Pour cela, le quadrat de fréquence est subdivisé en 16 quadrats élémentaires de 25 cm de côté dont 8 qui sont lus :
Schéma d’organisation de lecture des quadrats élémentaires au sein du quadrat de fréquence de tourbières
Un relevé exhaustif de la flore est réalisé en présence/absence au sein de chacun des quadrats élémentaires avec notation de la hauteur moyenne et du recouvrement des différentes strates présentes. En plus, un relevé complémentaire est réalisé, également en présence/absence, à l’échelle du quadrat de fréquence pour noter les espèces non contactées dans les 8 quadrats élémentaires. Cette méthode présente l’avantage de pouvoir s’abstenir d’une estimation des coefficients de recouvrement, une variable sujette au biais d’interprétation des données engendré par la diversité des observateurs et empêchant la détection de changements subtils dans la composition floristique du tapis végétal étudié. Des photos de chaque quadrat, dans l’ordre de lecture, doivent être réalisées.
La détermination des espèces végétales non-identifiées peut s’effectuer directement sur le terrain à l’aide d’une flore et d’une loupe (x10 minimum). Dans le cas de critères délicats à appréhender in situ (ex : Sphaignes), l’identification se fera ultérieurement en laboratoire, avec un matériel adéquat (loupe binoculaire, microscope, etc.), sur des échantillons prélevés hors de la zone d’étude. Concernant les espèces rares ou protégées, la détermination devra se faire soit en laboratoire sur la base de photos prises sur site, soit in situ sans prélèvement.
Pour l’étude des tourbières et bas-marais, le champ d’investigation taxonomique concerne les spermatophytes et ptéridophytes mais aussi les sphaignes, les autres bryophytes et lichens sont exclus car trop complexes à appréhender. Le référentiel taxonomique suivi est la version la plus récente de TaxRef (actuellement version 9, ).
Les flores utilisées sont diverses :
– Flora Gallica ,
– Flore de Dordogne ,
– Flore du Pays Basque et des régions limitrophes ,
– Flore descriptive et illustrée de la France, de la Corse et des contrées limitrophes (Tomes 1 à 3) ,
– Les fougères et plantes alliées de France et d’Europe occidentale ,
– Handbook of European Sphagna ,
– Mosses and liverworts of Britain and Ireland .
Le référentiel syntaxonomique des végétations utilisé est celui du CBNSA, version du 19/09/2017 . Afin de maintenir de la clarté dans la lecture, les autorités des syntaxons cités ne seront notées que lors de la première mention (ex : Juncion acutiflori Braun-Blanq. in Braun-Blanq. & Tüxen 1952 puis Juncion acutiflori).
Pour la mise en place et la lecture d’une placette de tourbières, le matériel requis est le suivant :
– 2 ou 3 piquets en bois fendu imputrescible (ex : robinier) pour transect ;
– tiges en métal (acier ou inox) pour quadrats de fréquence (en cas d’absence de transect) ;
– appareil GPS (GPS submétrique si possible) ;
– piquets fins en bois (8 minimum) ;
– corde tressée ou rubalise (120 m minimum) ;
– détecteur de champs magnétiques ;
– marteau et masse ;
– quadrat en bois ou PVC (1m de côté) ;
Photo du quadrat de fréquence de tourbières et bas-marais (1 m de côté)
– décamètre (50 m) ;
– appareil de visée ;
– boussole ;
– appareil photo.
4.4 Période optimale de suivi
Les tourbières et bas-marais de Nouvelle-Aquitaine connaissent leur optimum phénologique entre début juillet et mi-septembre ; c’est-à-dire la période durant laquelle la majorité du cortège floristique est au stade de floraison. Afin de noter et pouvoir identifier le maximum d’espèces, les inventaires et suivis doivent s’effectuer durant cette période .
4.5 Nombre de campagne de relevés
Une seule campagne de relevés est réalisée pour chaque année de suivi. En effet, la quasi-totalité du cortège floristique étant observable dans le cas d’une lecture pendant la période phénologique optimale (obs. CBNSA), la réalisation de plusieurs campagnes n’offre qu’un intérêt limité.
Ces végétations étant assez stables sans perturbations anthropiques mais pouvant être relativement dynamiques dans le cas d’un changement de conditions de gestion ou de régime hydrique, le délai entre chaque campagne de suivi est fixé à 3 ans, soit 2017 et 2020. Pour les sites complémentaires identifiés et matérialisés en 2018, le délai est ramené à 2 ans (2018 et 2020) pour permettre une lecture synchrone des dispositifs. En fonction des premières analyses et retours d’expérience, ce délai pourra être rehaussé. En effet, les impacts du changement climatique sur cet habitat intervenant à une échelle de temps bien plus large, des suivis trop rapprochés ont peu d’intérêt.
4.6 Fiche de relevé
Pour le suivi de ces habitats, la fiche de relevés compile les informations relatives aux :
– métadonnées et informations générales ;
– pressions et menaces ;
– variables descriptives (maturité, espèces sociales, tourbe) ;
– géolocalisation des dispositifs ;
– quadrats de fréquence.
5 Végétation des landes humides
Rédaction : Kévin Romeyer,
Contribution : Grégory Caze
Les communautés végétales de landes humides et tourbeuses atlantiques sont liées à des précipitations assez importantes (supérieures à 900 mm/an) sur des sols acides et pauvres en nutriments, et adaptées à un engorgement plus ou moins régulier par des eaux oligotrophes limitant la minéralisation de la matière organique . Ces contraintes permettent le développement d’une flore particulière avec de nombreuses espèces patrimoniales au niveau régional et national (Gentiana pneumonanthe, Sphagnum magellanicum, Drosera rotundifolia, Genista anglica). Du fait de ces caractéristiques phyto-écologiques, elles semblent particulièrement sensibles à des épisodes de sécheresses et de canicules plus intenses . Dans le contexte du changement climatique, ces végétations pourraient se fragmenter davantage ou se raréfier au profit de végétations de landes plus sèches et de communautés moins oligotrophiles.
Pour identifier et mesurer les effets du changement climatique sur les communautés végétales de landes humides, l’objectif est de suivre dans le temps et dans l’espace :
1- leur structure (types biologiques dominants, hauteur, recouvrement) ;
2- leur composition floristique (diversité spécifique, cortèges indicateurs, fréquence relative des espèces, spectre chorologique).
5.1 Sélection des sites
Les habitats landicoles humides sont assez bien représentés au niveau de la région Nouvelle-Aquitaine et sont surtout concentrés sur les substrats acides et pauvres en nutriments du plateau landais, de la Double landaise et de l’ex-région Limousin, et dans quelques secteurs en Dordogne, Vienne et Pyrénées-Atlantiques. Néanmoins, ils occupent rarement des surfaces importantes (supérieures à 0,5 ha), hormis dans les zones où la gestion permet leur maintien (camps militaires de Souge et de Captieux, barthes de l’Adour etc.) (obs. CBNSA). Les landes humides se retrouvent essentiellement en linéaires le long de crastes, de lisières forestières et de pistes.
Situation géographique des zones d’expression des communautés végétales de landes humides en Nouvelle-Aquitaine
L’identification des sites de suivi favorables s’appuie d’abord sur la présence de la flore caractéristique des landes humides et tourbeuses relevant de l’Ulici minoris – Ericenion ciliaris (Géhu 1975) et de l’Oxycocco palustris – Ericion tetralicis renseignées dans l’Observatoire de la Biodiversité Végétale de Nouvelle-Aquitaine (OBV) d’une part et les connaissances et prospections de partenaires/gestionnaires d’autre part. L’étude de la bibliographie a permis de tenir compte de la variabilité et de la répartition des communautés végétales de landes. Par ailleurs, très sensibles aux changements de régime hydrique (drainage, abaissement de la nappe) ou de pratiques de gestion (absence de débroussaillage régulier) et à l’eutrophisation, les landes humides sont en forte régression ces dernières années, dont certaines de manières irréversibles . Une attention particulière est apportée à l’absence ou l’impact réduit de ces facteurs de modifications pour isoler au mieux le facteur climatique par rapport au suivi.
L’utilisation d’indices d’état permet alors de sélectionner les habitats et les sites les plus favorables, c’est-à-dire en bon état de conservation. Ces indices sont les suivants :
– surface d’habitat minimum, basée sur l’aire d’expression optimale des communautés (2 à 4 ha pour les landes en excluant les linéaires de faible largeur (inférieure à 50m) ;
– occupation majeure par les espèces typiques (Erica ciliaris, Ulex minor, Calluna vulgaris, Erica tetralix, Molinia caerulea, Genista anglica) ;
– présence si possible d’espèces psychrophiles d’affinités boréo-montagnardes (Sphagnum magellanicum, Lycopodium clavatum) ;
– fermeture du milieu faible, basée sur la fréquence relative et le recouvrement d’espèces de fourrés (ex : Erica scoparia, Frangula alnus, Salix atrocinerea, Betula pubescens) ;
– gestion homogène dans le temps et dans l’espace ;
– absence ou limitation des perturbations : drains, plantations, eutrophisation, gyrobroyages fréquents, etc.
L’existence préalable d’un réseau de sites de suivi des communautés végétales de landes humides en ex-région Aquitaine (Annexe 15) pour l’évaluation des HIC, reposant sur des méthodes et paramètres d’étude compatibles avec ceux exposés ici , permet de mutualiser une partie des dispositifs mis en place et de bénéficier de données historiques sur ces communautés.
La sélection de nouveaux sites avec une répartition représentative des systèmes landicoles humides à l’échelle de la région est primordiale pour l’étude de ces habitats dans le contexte du changement climatique. En effet, le mésoclimat peut être très différent selon les secteurs régionaux (Données AURELHY par Météo France). Cela devrait permettre de détecter des variations de cortèges (ex : perte d’espèces psychrophiles, développement d’espèces plus mésophiles et/ou plus mésotrophiles voire thermophiles) dans les différentes zones suivies et ainsi définir les plus sensibles.
Situation géographique des sites de suivi de communautés végétales de landes humides
5.2 Définition et positionnement des points d'échantillonnage
Le suivi des landes humides en lien avec les évolutions climatiques reprend les mêmes principes d’échantillonnage que pour l’évaluation de l’état de conservation dans le cadre du suivi des HIC pour Natura 2000 .
Pour ces milieux topographiquement homogènes, un système d’échelles emboîtées est utilisé car permettant des analyses complémentaires et une vision représentative du site d’un point de vue floristique et dynamique :
– échelle du site ;
– échelle du complexe landicole par un quadrat paysager de 25 m de côté ;
– échelle de la communauté végétale par un quadrat de fréquence de 7 m de côté.
Les données à l’échelle du site peuvent être obtenues via photographies aériennes (couleurs normales et infra-rouge) et ne nécessitent pas d’instrumentalisation sur le site.
La surface de 625 m² du quadrat paysager semble être le meilleur compromis pour apprécier la mosaïque des communautés végétales sans pour autant être trop grande et empêcher l’observateur d’avoir une vision complète de la zone.
Le positionnement du quadrat paysager est défini après visite des sites et identification des zones où l’habitat de lande humide est bien représenté et estimé en bon état de conservation. Il est placé de sorte à avoir un aperçu des végétations en dynamique et en contact avec les landes. Son géoréférencement est déterminé sur le terrain avec un GPS submétrique par les coordonnées de ses 4 sommets. Le temps de la lecture, le quadrat est matérialisé par des piquets temporaires aux 4 sommets et reliés par une rubalise ou un décamètre.
L’aire minimale pour l’étude des landes basses (inférieures à 1 m) étant estimée entre de 30 et 100 m² , la surface de 49 m² du quadrat de fréquence apparaît adéquate étant donné l’utilisation complémentaire du quadrat paysager.
Le positionnement de ce quadrat se fait à l’intérieur du quadrat paysager dans une zone où la communauté de lande est bien exprimée. Pour simplifier et limiter les erreurs lors de prochaines lectures, le quadrat est orienté au nord. Son géoréférencement est déterminé sur le terrain par les coordonnées de ses 4 sommets. Dans l’objectif d’un suivi à moyen/long terme (plusieurs décennies) et afin d’assurer la relocalisation précise et la pérennité du dispositif, le quadrat de fréquence est délimité à ses sommets par 4 tiges métalliques (acier ou inox) enterrées et affleurant à la surface du sol. Un détecteur de champs magnétiques est nécessaire pour retrouver la position des tiges. Lorsque cela est possible, des mesures de distances et de cap à la boussole sont notées par rapport à des repères fixes qui ne risquent pas de bouger avant la prochaine lecture. Le temps de la lecture, le quadrat est matérialisé par des piquets temporaires aux 4 sommets et reliés par une corde graduée ou un décamètre.
La durée de mise en place et de relocalisation des quadrats sur un site est estimée autour de 30 minutes. La durée de lecture des 2 types de quadrat n’est pas limitée et peut être estimée autour de 3h.
Les caractéristiques de l’ensemble des dispositifs mis en place sur les sites de landes humides sont présentées ci-après. Ce tableau synthétise, par site, le code du suivi utilisé, les types de quadrats et leur surface respective :
Caractéristiques des dispositifs de suivi de landes humides par site
5.3 Méthodes de relevés et détermination des espèces et des communautés végétales
5.3.1 Echelle du quadrat paysager
A l’échelle du quadrat paysager (voir figure ci-dessous), le but est de suivre l’évolution du complexe landicole et la dynamique de végétation. Pour mener ce travail, la phytosociologie sigmatiste est retenue car basée sur une démarche rigoureuse et éprouvée. La démarche de réalisation de relevés phytosociologiques est explicitée plus haut.
Schéma de l’organisation spatiale des communautés végétales au sein d’un quadrat paysager de landes humides
D’autre part, la phytosociologie paysagère ou symphytosociologie est utilisée afin de lister et proportionner les différentes communautés au sein du quadrat .
En plus, des photos avec des prises de vue en grand angle depuis les quatre coins du quadrat, figurant eux-mêmes sur l’image, doivent être réalisées afin de conserver une vision physionomique du site et des communautés végétales, et aider dans l’interprétation des données.
5.3.2 Echelle du quatrat de fréquence
A l’échelle du quadrat de fréquence de lande (7m de côté), le but est de suivre l’évolution de la structure et de la composition de la communauté à un niveau fin de précision. Pour cela, le quadrat de fréquence est subdivisé en 9 quadrats élémentaires de 1m de côté.
Schéma d’organisation des quadrats élémentaires au sein du quadrat de fréquence de landes humides
Un relevé exhaustif de la flore est réalisé en présence/absence au sein de chacun des quadrats élémentaires avec notation de la hauteur moyenne et du recouvrement des différentes strates présentes. En plus, un relevé complémentaire est réalisé, également en présence/absence, à l’échelle du quadrat de fréquence pour noter les espèces non contactées dans les 9 quadrats élémentaires. Cette méthode présente l’avantage de pouvoir s’abstenir d’une estimation des coefficients de recouvrement, une variable sujette au biais d’interprétation des données engendré par la diversité des observateurs et empêchant la détection de changements subtils dans la composition floristique du tapis végétal étudié .
En plus, des photos avec des prises de vue en grand angle depuis les quatre sommets et les 4 côtés du quadrat, pendant que les dispositifs de lecture sont en place, doivent être réalisées afin de conserver une vision physionomique de la zone suivie, et aider dans la relocalisation des dispositifs.
5.3.3 Détermination des espèces
La détermination des espèces végétales non-identifiées peut s’effectuer directement sur le terrain à l’aide d’une flore et d’une loupe (x10 minimum). Dans le cas de critères délicats à appréhender in situ (ex : Sphaignes), l’identification se fera ultérieurement en laboratoire, avec un matériel adéquat (loupe binoculaire, microscope…), sur des échantillons prélevés hors de la zone d’étude. Concernant les espèces rares ou protégées, la détermination devra se faire autant que possible sur photos ou in situ sans prélèvement.
Pour l’étude des landes et tourbières en Aquitaine, le champ d’investigation taxonomique concerne les spermatophytes et ptéridophytes mais aussi les sphaignes, les autres bryophytes et lichens sont exclus car trop complexes à appréhender. Le référentiel taxonomique suivi est la version la plus récente de TaxRef (actuellement version 9, ).
Les flores utilisées sont diverses :
– Flora Gallica ,
– Flore de Dordogne ,
– Flore du Pays Basque et des régions limitrophes ,
– Flore descriptive et illustrée de la France, de la Corse et des contrées limitrophes (Tomes 1 à 3) ,
– Les fougères et plantes alliées de France et d’Europe occidentale ,
– Handbook of European Sphagna ,
– Mosses and liverworts of Britain and Ireland .
Le référentiel syntaxonomique des végétations utilisé est celui du CBNSA, version du 19/09/2017 . Afin de maintenir de la clarté dans la lecture, les autorités des syntaxons cités ne seront notées que lors de la première mention (ex : Agrostion curtisii Foucault B. 1986 puis Agrostion curtisii).
5.3.4 Matériel
Pour la mise en place et la lecture d’une placette de landes humides et de tourbières, le matériel requis est le suivant :
– tiges en métal (acier ou inox) pour quadrats de fréquence (4 par quadrats lande) ;
– appareil GPS (GPS submétrique si possible) ;
– piquets fins en bois (8 minimum) ;
– corde tressée ou rubalise (60 m minimum) ;
– détecteur de champs magnétiques ;
– marteau ;
– quadrats en bois (1 m de côté) ;
– décamètre (50 m) ;
– boussole ;
– appareil photo.
5.4 Période optimale de suivi
Les landes humides et tourbières d’Aquitaine connaissent leur optimum phénologique entre début juillet et mi-septembre ; c’est-à-dire la période durant laquelle la majorité du cortège floristique est en floraison. Afin de noter et pouvoir identifier le maximum d’espèces, les inventaires et suivis doivent s’effectuer durant cette période comme l’attestent divers travaux sur ces milieux .
5.5 Nombre de campagne de relevés
Une seule campagne de relevés est réalisée pour chaque année de suivi. En effet, la quasi-totalité du cortège floristique étant observable dans le cas d’une lecture pendant la période phénologique optimale, la réalisation de plusieurs campagnes n’offre qu’un intérêt limité.
Ces végétations étant assez stables sans perturbations anthropiques mais pouvant être relativement dynamiques dans le cas d’un changement de conditions de gestion ou de régime hydrique, le délai entre chaque campagne de suivis est fixé à 3 ans, soit 2017 et 2020. En fonction des premières analyses et retours d’expérience, ce délai pourra être rehaussé. En effet, les impacts du changement climatique sur cet habitat intervenant à une échelle de temps bien plus large, des suivis trop rapprochés ont peu d’intérêt.
5.6 Fiches de relevés
Pour le suivi de ces habitats, la fiche de relevés compile les informations relatives aux :
– métadonnées et informations générales,
– pressions et menaces,
– variables descriptives (maturité, espèces sociales, tourbe),
– géolocalisation des dispositifs,
– quadrats de fréquence,
– quadrats paysagers.
6. Végétation des lagunes du plateau landais
Rédaction : Kévin Romeyer
Contributeur : Grégory Caze
Les communautés végétales des lagunes du plateau landais hébergent une flore spécifique avec de nombreuses espèces patrimoniales (Caropsis verticillatto-inundata, Littorella uniflora, Drosera intermedia, Luronium natans, etc.) dont certaines à tendance psychrophile (Utricularia minor, Pilularia globulifera). Ces végétations sont adaptées à des sols et eaux pauvres en nutriments et aux fluctuations des niveaux d’eaux qui déterminent leur disposition en ceinture autour de la pièce d’eau . Ainsi, des communautés strictement aquatiques (immergées toutes l’année), terrestres (toujours émergées) et amphibies (immergées seulement une partie de l’année) sont retrouvées. Du fait de ces caractéristiques phyto-écologiques, elles semblent particulièrement sensibles à des épisodes de sécheresses plus intenses (obs. CBNSA). Dans le contexte du changement climatique avec des sécheresses et canicules plus intenses, ces végétations amphibies et aquatiques pourraient disparaître ou se raréfier au profit des végétations strictement terrestres.
Pour identifier et mesurer les effets du changement climatique sur les communautés végétales de lagunes, l’objectif est de suivre dans le temps et dans l’espace : 1- leur structure (types biologiques dominants, hauteur, recouvrement) et 2- leur composition floristique (diversité spécifique, cortèges indicateurs, fréquence relative des espèces, spectre chorologique).
6.1 Sélection des sites
Les communautés végétales amphibies et aquatiques des sols et eaux oligotrophes sont peu fréquentes à l’échelle de la région Nouvelle-Aquitaine ; elles sont en revanche bien représentées au sein du plateau landais et de la zone arrière-littorale en Gironde et dans les Landes :
Situation géographique des lagunes du plateau landais inventoriées en 2011
Néanmoins, elles sont souvent mal exprimées et sur de faibles surfaces surtout en linéaires. Elles se retrouvent généralement en bord de routes et pistes forestières dans les fossés et crastes. Elles composent également en grande partie les végétations de lagunes du plateau landais où elles peuvent se développer sur des surfaces importantes. En effet, les profils de pente douce caractéristiques des lagunes en bon état de conservation favorisent une exondation graduelle sur de grandes largeurs. Ainsi, les lagunes forment un milieu privilégié pour étudier et suivre l’évolution de ces végétations typiques. Près de 2000 lagunes sont recensées sur le plateau landais mais la plupart n’abrite pas de communautés végétales amphibies et aquatiques car atterries ou reprofilées pour d’autres utilisations (bassins de rétention, chasse, etc.).
Situation géographique des lagunes visitées pour la flore et les communautés végétales
L’identification des sites de suivi favorables s’appuie d’abord sur l’étude réalisée par le CBN Sud-Atlantique , les données de présence des espèces typiques des lagunes renseignées dans l’Observatoire de la Biodiversité Végétale de Nouvelle-Aquitaine (OBV atlas en ligne : ofsa.fr). Pour l’étude de ce milieu en lien avec le changement climatique, l’indicateur de suivi privilégié est formé par les communautés végétales amphibies relevant de l’Elodo palustris-Sparganion erecti Br.-Bl. & Tüxen ex Oberdorfer 1957) ; leur présence au sein des lagunes à retenir est donc indispensable. D’autre part, la présence de communautés végétales aquatiques relevant de l’Hydrocharition morsus-ranae Rübel ex Klika in Klika & Hada 1944 et Potamion polygonifolii Hartog & Segal 1964 est intéressante pour estimer leur résilience, notamment par rapport aux suivis de populations d’odonates.
En termes de répartition, la sélection devra être représentative des lagunes du plateau landais et spatialement équilibrée afin que d’éventuels gradients nord/sud ou est/ouest puissent être identifiés.
Ensuite, l’utilisation d’indices d’état permet de sélectionner les habitats les plus adéquats pour la mise en place d’un suivi à long terme. Ces indices sont les suivants :
– niveau de dérive trophique faible, basé sur la fréquence relative des espèces eutrophes au sein du tapis végétal (ex: Bidens frondosa, Lemna sp) ;
– atterrissement limité, basé sur le pourcentage de recouvrement de la pièce d’eau en étéet des espèces ligneuses (Frangula alnus, Salix atrocinerea) ;
– envahissement faible par hélophytes, basé sur la fréquence relative et le recouvrement d’espèces compétitives (ex: Schoenoplectus lacustris, Phragmites australis, Cladium mariscus) ;
– diversité végétale élevée, basée sur la richesse spécifique et le nombre de communautés présentes;
– absence ou limitation de perturbations hydrauliques ou physiques: creusement, comblements, fossés de connexion, retournements par faune etc.
Les lagunes du plateau landais étant sensibles aux modifications de régime hydrique (assèchement, surcreusement des lagunes, plantations adjacentes) et à l’eutrophisation liées aux activités anthropiques, elles sont en forte régression ces dernières années et certaines de manières irréversibles . Une attention particulière est apportée à l’absence ou à l’impact réduit de ces facteurs de modifications pour isoler au mieux le facteur climatique par rapport au suivi.
En début 2017 s’est tenue une réunion technique avec plusieurs partenaires du territoire impliqués sur l’étude et le suivi des lagunes à travers le programme les sentinelles du climat ou d’autres programmes (CEN Aquitaine, Conseil Départemental des Landes, CPIE Seignanx-et-Adour, Parc Naturel Régional des Landes de Gascogne, Réserve Géologique de Saucats-La Brède, Pays Médoc etc.). Cette réunion a permis de mettre en lumière l’ensemble des travaux portant sur la biodiversité des lagunes avec un objectif de mutualisation de certains suivis, de synergie entre suivis et ainsi éviter des doublons contre-productifs. La connaissance des acteurs du territoire a permis d’élaborer une nouvelle sélection de 31 sites potentiellement favorables pour la mise en place de suivis en lien avec le changement climatique.
Parmi ces 31 lagunes, 14 d’entre elles ne disposaient d’aucune donnée sur la flore et les communautés végétales présentes et ont fait l’objet d’un diagnostic par le CBN Sud-Atlantique, cela dans le but de statuer sur la pertinence d’un suivi pour ces lagunes. Une réunion-bilan entre Cistude Nature, le CBN Sud-Atlantique et le CEN Aquitaine tenue à l’automne 2017 a permis d’affiner la sélection en écartant certains des sites non favorables pour des suivis de communautés végétales et/ou de populations d’odonates.
6.2 Définition et positionnement des points d'échantillonnage
La disposition des végétations de lagunes suivant un gradient hydrique d’exondation et les hypothèses en lien avec les évolutions climatiques étant d’observer des glissements d’espèces et de communautés végétales, un dispositif de suivi sécant aux différentes ceintures de végétations est privilégié. Les principes d’échantillonnage établis pour l’évaluation de l’état de conservation dans le cadre du suivi des HIC, à travers un système de transect orienté perpendiculairement aux ceintures de végétations et lu au moyen de quadrats de 1m de côté , sont conservés car compatibles quant aux paramètres mesurés.
Ce type de dispositif permet à la fois une étude diachronique de la lagune, pour suivre dans le temps et dans l’espace la dynamique évolutive de la végétation ; et une étude synchronique pour décrire l’organisation spatiale des groupements dans l’espace.
La répartition spatiale des communautés végétales étant surtout expliquée par les gradients topographique et hydrique, le transect est orienté du centre de la pièce d’eau (zone la plus profonde) vers la marge complètement exondée en répondant aux critères suivants :
– échantillonner la diversité phytocénotique : le transect doit prendre en compte les différentes situations écologiques majoritairement rencontrées sur la lagune ;
– choisir le transect le plus long possible (pente faible) pour apprécier la végétation dans son expression optimale ;
– éviter les situations atypiques : les zones suivies doivent être relativement indicatrices du fonctionnement écologique de la lagune.
Dans l’objectif d’un suivi à moyen/long terme (plusieurs décennies) et afin d’assurer la relocalisation précise et la pérennité du dispositif, le transect est délimité par 2 piquets fixes en bois imputrescible (ex : robinier) en évitant les zones soumis à contraintes (coupe, passage d’engins, niveau d’eau trop élevé). Le premier est placé dans la zone externe de la lagune et le second à la limite moyenne des eaux en période estivale, repérable à la zone amphibie de bas-niveau :
Schéma de positionnement du transect et des quadrats sur la lagune
Pour ne pas attirer l’attention et éviter toute dégradation du dispositif, les piquets doivent être enterrés profondément et ne dépasser que de quelques dizaines de centimètre de la surface du sol. Le géoréférencement du transect est déterminé sur le terrain par les coordonnées GPS de ses repères fixes. Dans le cas où le transect s’avère plus long que la distance entre les repères fixes, celui-ci est prolongé au moyen de repères temporaires (piquets en bois), positionnés exactement dans le prolongement des repères fixes à l’aide d’un appareil de visée. Le temps de la lecture, le transect est matérialisé par un décamètre tendu entre les deux piquets temporaires, au ras du sol.
La durée de mise en place et de relocalisation du transect sur une lagune est estimée autour de 15 à 30 minutes. La durée de lecture des quadrats le long du transect dépend de la longueur du transect et du nombre de quadrats de fréquence, elle n’est pas limitée et peut être estimée entre 10 à 20 minutes par quadrats.
Les caractéristiques de chaque transect de lagune mis en place sont présentées dans le tableau ci-dessous. Ce tableau synthétise, par site, le code du suivi utilisé, le type de dispositifs, leur longueur respective avec le nombre de quadrats de fréquence utilisés. Pour les transects, les coordonnées GPS sont relevées et correspondent aux repères fixes mis en place, la longueur du transect relu peut donc être plus grande ou plus petite que la distance entre les repères fixes.
6.3 Méthodes de relevés et détermination des espèces
Deux méthodes complémentaires de suivi des lagunes, développées pour l’évaluation de l’état de conservation, sont retenues. Cela permettant d’avoir une vision globale du site et de détecter de façon fine les variations floristiques :
– méthode descriptive sans matérialisation de la lagune : inventaire floristique exhaustif, liste des végétations avec forme et recouvrement respectifs et diagnostic des perturbations,
– méthode par transect avec matérialisation de la lagune : suivi fin de l’évolution des communautés végétales (composition, hauteur, recouvrement) et du complexe lagunaire.
Le protocole descriptif consiste en la réalisation d’un inventaire floristique exhaustif sur l’emprise de la lagune couplé à un relevé symphytosociologique permettant de proportionner les différentes communautés. En plus, un diagnostic des perturbations (hydrauliques, trophiques, physiques, envahissement par hélophytes compétitives) sur le site est opéré.
La prise de photo est conseillée pour une aide à l’interprétation et garder une vision du site lors des différentes lectures.
Le protocole descriptif consiste en la réalisation d’un inventaire floristique exhaustif sur l’emprise de la lagune couplé à un inventaire des végétations présentes permettant de proportionner les différentes communautés sur la lagune. En plus, un diagnostic des perturbations (hydrauliques, trophiques, physiques, envahissement par hélophytes compétitives) sur le site est opéré.
Le suivi des lagunes par transect s’effectue au moyen de quadrats de 1m de côté subdivisés en 4 quadrats élémentaires de 25cm de côté :
Schéma de l’organisation des quadrats élémentaires au sein d’un quadrat de fréquence pour les lagunes
Le nombre de quadrats est adapté aux caractéristiques de la lagune (diversité de communautés végétales, taille de la lagune). Ils sont répartis le long du transect à intervalles réguliers. Cet intervalle (n), mesuré à partir du centre du quadrat, est variable en fonction de la longueur du transect et du nombre de quadrats choisis. En moyenne, un intervalle de 1m entre 2 quadrats est préconisé. Une fois défini, cet intervalle ne doit en aucun cas varier entre les différentes lectures. Le premier quadrat est disposé au pied du repère fixe le plus élevé (marge de la lagune), et orienté vers le centre de la lagune. La position des autres quadrats sera déduite par celle du premier à l’aide du décamètre.
Pour chacun des quadrats, le recouvrement des strates (précision 5%), la hauteur de biomasse (précision 5 cm) et les caractéristiques abiotiques (niveau d’eau, surface de sol nu) sont notés et un relevé exhaustif de la flore avec estimation du recouvrement des espèces (précision 5%) est réalisé au sein de 4 quadrats élémentaires de 25cm. En plus, un relevé complémentaire est réalisé, en présence/absence, à l’échelle du quadrat pour noter les espèces non contactées dans les quadrats élémentaires.
Pour conserver une vision physionomique du site, et aider dans l’interprétation des données et dans la relocalisation des dispositifs, des photos avec prises de vue du départ, de l’arrivée et si possible de l’ensemble du transect sont réalisées, ainsi que pour chaque communauté observée. En plus, des photos de chaque quadrat, dans l’ordre de lecture, doivent être prises.
La détermination des espèces végétales non-identifiées peut s’effectuer directement sur le terrain à l’aide d’une flore et d’une loupe (x10 minimum). Dans le cas de critères délicats à appréhender in situ, l’identification se fera ultérieurement en laboratoire, avec un matériel adéquat (loupe binoculaire, microscope…), sur des échantillons prélevés si possible hors de la zone d’étude. Concernant les espèces rares ou protégées, la détermination devra se faire autant que possible sur photos ou in situ sans prélèvement.
Pour l’étude des lagunes du plateau landais, le champ d’investigation taxonomique concerne uniquement les spermatophytes et ptéridophytes, excluant donc les bryophytes et lichens trop complexes à appréhender. Le référentiel taxonomique suivi est la version la plus récente de TaxRef (actuellement version 9, ).
Les flores utilisées sont diverses :
– Flora Gallica ,
– Flore du Pays Basque et des régions limitrophes ,
– Flore descriptive et illustrée de la France, de la Corse et des contrées limitrophes (Tomes 1 à 3) ,
– Flore de France méditerranéenne continentale ,
– Les fougères et plantes alliées de France et d’Europe occidentale .
Le référentiel syntaxonomique des végétations utilisé est celui du CBNSA, version du 19/09/2017 .
Pour la mise en place et la lecture des placettes de lagunes, le matériel requis est le suivant :
– 2 Piquets en bois fendu imputrescible (ex : robinier) ;
– appareil GPS (GPS submétrique si possible) ;
– piquets fins en bois (2 minimum) ;
– corde tressée ou rubalise (120 m minimum) ;
– marteau et masse ;
– quadrats en plastique ou PVC (1 m de côté) ;
– décamètre (50 m) ;
– conductimètre ;
– appareil de visée ;
– appareil photo ;
– scie égoïne.
6.4 Période optimale de suivi
Les végétations des lagunes connaissent leur optimum phénologique assez tardivement entre début août et fin septembre ; c’est-à-dire la période durant laquelle la majorité du cortège floristique est en floraison. Afin de noter et pouvoir identifier le maximum d’espèces, les inventaires et suivis doivent s’effectuer durant cette période . En cas d’année particulièrement sèche avec des précipitations faibles en hiver et au printemps, une lecture dès le mois de juillet est envisageable.
6.5 Nombre de campagne de relevé
Une seule campagne de relevés est réalisée pour chaque année de suivi. En effet, la quasi-totalité du cortège floristique étant observable dans le cas d’une lecture pendant la période phénologique optimale, la réalisation de plusieurs campagnes n’offre qu’un intérêt marginal pour le contact d’espèces décalées phénologiquement (ex : Ranunculus gr. batrachium) mais souvent toujours visibles à l’optimum du cortège.
Les végétations des lagunes et leur agencement résultent d’un blocage dynamique dû à la période d’immersion prolongée ; par définition, elles sont donc très peu dynamiques en absence de perturbations d’origine anthropiques directes (surcreusement, assèchement, eutrophisation). Néanmoins, elles peuvent être impactées en cas d’aléas climatiques extrêmes (forte sécheresse, canicule etc.) répétés plusieurs années de suite. Pour ces raisons, le délai entre chaque campagne de suivis est fixé à 3 ans, soit 2017-2018 et 2020. En fonction des premières analyses et retours d’expérience, ce délai pourra être rehaussé. En effet, les impacts du changement climatique sur ces milieux intervenant à une échelle de temps plus large, des suivis trop rapprochés ont peu d’intérêt.
6.6 Fiche de relevé
Pour le suivi des lagunes, une fiche de renseignement par transect est conçue. Elle reprend les différentes informations à renseigner :
– localisation et caractéristiques du transect,
– proportion des différentes communautés végétales (largeur),
– relevés floristiques et informations physionomiques par quadrat.
En plus, une fiche descriptive par lagune renseigne les informations suivantes :
– caractéristiques générales de la lagune,
– perturbations éventuelles,
– relevés phytosociologiques complémentaires,
– relevé floristique exhaustif,
– relevé symphytosociologique.
7 Végétation des étangs arrière-dunaires
Rédaction : Kévin Romeyer
Contributeur : Grégory Caze
La multitude de végétations qui compose les rives des étangs arrière-littoraux aquitains hébergent une flore particulière avec de nombreuses espèces patrimoniales (Lobelia dortmanna, Isoetes boryana, Caropsis verticillatto-inundata, Littorella uniflora) dont certaines d’affinités boréales en limite d’aire sud-occidentale (Rhynchopora fusca, Utricularia intermedia, Drosera intermedia). Ces étangs sont isolés de la mer par un imposant cordon dunaire ; ils sont donc alimentés exclusivement par les eaux des bassins versants. Issues du plateau sableux du triangle landais, ces eaux acides et oligotrophes favorisent le développement de communautés végétales très originales. Ces végétations vivaces sont adaptées à des sols pauvres en nutriments et aux fluctuations des niveaux d’eaux qui déterminent leur agencement en ceinture le long d’un gradient topographique plus ou moins étendu
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. Ainsi, des communautés aquatiques (immergées toute l’année), terrestres (toujours émergées) et amphibies (immergées seulement une partie de l’année) sont retrouvées. Du fait de ces caractéristiques phyto-écologiques, elles semblent particulièrement sensibles à des épisodes de sécheresses plus intenses (obs. CBNSA). Dans le contexte du changement climatique avec des sécheresses et canicules plus intenses, ces végétations amphibies et aquatiques pourraient disparaître ou se raréfier au profit des végétations strictement terrestres et moins oligotrophiles.
Pour identifier et mesurer les effets du changement climatique sur les communautés végétales de lagunes, l’objectif est de suivre dans le temps et dans l’espace : 1- leur structure (types biologiques dominants, hauteur, recouvrement) et 2- leur composition floristique (diversité spécifique, cortèges indicateurs, fréquence relative des espèces, spectre chorologique).
7.1 Sélection des sites
Dans le cadre du schéma pluriannuel de suivi des habitats d’intérêts communautaires (HIC) de la région Aquitaine mis en place par le CBN Sud-Atlantique , les rives des étangs font l’objet d’un suivi régulier pour l’évaluation d’état de conservation à travers le réseau Natura 2000 .
Au total, il existe 19 étangs arrière-littoraux dont 16 étant intégrés dans un périmètre Natura 2000 sur 6 sites différents. L’ensemble des étangs ne pouvant être suivi, un échantillon de 8 étangs a été sélectionné selon les critères suivants :
– présence dans un périmètre Natura 2000 ;
– présence des habitats d’intérêt communautaire à évaluer ;
– bonne représentativité de ces habitats (surface, état).
Les étangs étant parfois de très grande superficie et relativement hétérogènes d’une rive à l’autre, plusieurs dispositifs de suivi ont dû être mis en place pour un même étang. Les critères sur leur positionnement sont explicités plus loin.
Les suivis des communautés végétales de rives d’étangs dans le cadre du programme les sentinelles du climat se reposeront essentiellement sur ce réseau existant afin de mutualiser les dispositifs mis en place et de bénéficier des données acquises. Toutefois, il convient d’enrichir ce réseau avec de nouveaux dispositifs sur d’autres rives d’étangs déjà suivis voire sur des étangs non-suivis actuellement. Cela permettra notamment d’avoir une vision régionale exhaustive sur les végétations qui composent ces étangs et ainsi de détecter les secteurs de plus grande sensibilité face au changement climatique.
L’identification des nouvelles zones à suivre en termes de végétations s’effectuera en 2018. Elle s’appuiera notamment sur la présence de communautés amphibies relevant de l’Elodo-Sparganion erecti, aquatiques relevant de l’Hydrocharition morsus-ranae et Potamion pectinati (Koch 1926) Libbert 1931 et de gazons subaquatiques d’intérêt patrimonial relevant du Lobelio dortmannae – Isoetion W. Pietsch 1965. Les données renseignées dans l’OBV (ofsa.fr) et issues de la bibliographie
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formeront une base d’intérêt pour ce travail.
Fig. 313. Situation géographique des sites d’études validés pour le suivi des communautés végétales des rives d’étangs
7.2 Définition et positionnement des points d'échantillonnage
Le suivi des étangs en lien avec les évolutions climatiques dans le cadre des sentinelles du climat reprend les mêmes principes d’échantillonnage que pour l’évaluation de l’état de conservation dans le cadre du suivi des HIC pour Natura 2000 ; c’est-à-dire un système de transect orienté perpendiculairement au rivage et aux ceintures de végétations et lu au moyen de quadrats de 4m de côté et de relevés phytosociologiques.
Ce type de dispositif permet à la fois une étude diachronique des végétations rivulaires, pour suivre dans le temps et dans l’espace leur dynamique évolutive ; et une étude synchronique pour décrire l’organisation spatiale des groupements dans l’espace.
La répartition spatiale des communautés végétales étant surtout expliquée par les gradients topographique et hydrique, le transect est orienté de la zone de bas-niveau (toujours immergée) vers le rivage complètement exondé en répondant aux critères suivants:
– échantillonner la diversité phytocénotique : le transect doit prendre en compte les différentes situations écologiques majoritairement rencontrées sur l’étang ;
– choisir le transect le plus long possible (pente faible) pour apprécier la végétation dans son expression optimale ;
– éviter les situations atypiques : les zones suivies doivent être relativement indicatrices du fonctionnement écologique de l’étang.
Dans l’objectif d’un suivi à moyen/long terme (plusieurs décennies) et afin d’assurer la relocalisation précise et la pérennité du dispositif, le transect est délimité par 2 piquets fixes en bois imputrescible (ex : robinier) en évitant les zones soumis à contraintes (coupe, passage d’engins, niveau d’eau trop élevé).
La limite inférieure est fixée de manière à prendre en compte l’intégralité des groupements de bas-niveau (roselières, groupements amphibies) et dans la mesure du possible les groupements aquatiques sous-jacents. La limite supérieure est arrêtée dès l’apparition des premiers ligneux hauts ou à la sortie de la zone amphibie et l’apparition des communautés végétales mésophiles non soumises à immersion temporaire. Pour ne pas attirer l’attention et éviter toute dégradation du dispositif ou dommages aux usagers de l’étang, les piquets doivent être enterrés profondément et ne dépasser que de quelques dizaines de centimètre la surface du sol. Le géoréférencement du transect est déterminé sur le terrain par les coordonnées GPS de ses repères fixes. Le temps de la lecture, le transect est matérialisé par une corde doublé d’un décamètre tendu entre les deux piquets, au ras du sol. Les quadrats sont quant à eux matérialisés par des piquets temporaires reliés par une corde ou rubalise.
Schéma de positionnement du transect sur les rives d’étangs
La durée de mise en place et de relocalisation du transect et des quadrats est estimée autour de 1h. La durée de lecture des quadrats et des relevés phytosociologiques le long du transect n’est pas limitée et peut être estimée autour de 3h.
Un exemple de positionnement est présenté ci-après.
Exemple de situation de transect sur une rive d’étang arrière-littoraux (photographie aérienne)
7.3 Méthode de relevé et détermination des espèces
Dans le cadre du programme les sentinelles du climat, comme pour l’évaluation de l’état de conservation Natura 2000, le suivi des végétations rivulaires d’étangs arrières-littoraux s’opère selon la méthode des transects. Deux protocoles complémentaires sont utilisés sur un même transect pour avoir une vision globale du fonctionnement des étangs et détecter de façon fine les variations floristiques du milieu :
– transect de relevés phytosociologiques ;
– transect de quadrats de fréquence disposés à intervalles réguliers.
Selon la méthode phytosociologique sigmatiste, des relevés sont réalisés le long du transect dans les zones d’expression optimale des communautés végétales, y compris celles des communautés d’annuelles qui se superposent aux communautés de plantes vivaces, ainsi qu’aux limites inférieures et supérieures de chacune d’elles. Cela permet notamment de connaitre l’écologie et les liens dynamiques des différentes communautés et l’évolution de l’emprise de celles-ci le long du transect : une information capitale pour estimer, par extrapolation, l’évolution des surfaces d’habitats sur les étangs.
Le long du même transect, la flore et les végétations sont suivies à travers des quadrats de fréquence de 4m de côté subdivisés en quadrats élémentaires de 1m de côté.
Schéma d’organisation (à gauche) et illustration (à droite) des quadrats élémentaires au sein du quadrat de fréquence pour les végétations d’étangs
Le nombre de quadrats par transect est adapté aux caractéristiques de la rive (diversité de communautés végétales, longueur de la zone de marnage). Ils sont répartis le long du transect à intervalles réguliers.
Schéma de positionnement des quadrats de fréquence le long du transect sur une rive d’étang (en noir : quadrats fixes ; en rouge : quadrats complémentaires ; C1 à C6 : communautés végétales)
Cet intervalle (n), mesuré à partir du centre du quadrat, est variable en fonction de la longueur du transect et du nombre de quadrats choisis. En moyenne, un intervalle de 8m entre 2 quadrats est préconisé. Une fois défini, cet intervalle ne doit en aucun cas varier entre les différentes lectures. Le premier quadrat est disposé au pied du repère fixe le plus élevé (rivage de l’étang), et orienté vers la zone de bas-niveau. La position des autres quadrats sera déduite par celle du premier à l’aide du décamètre.
Pour chacun des quadrats de fréquence, le recouvrement des strates (précision 5%), la hauteur de biomasse (précision 5 cm) et les caractéristiques abiotiques (niveau d’eau, surface de sol nu, nature du substrat) sont notées et un relevé exhaustif de la flore en présence/absence est réalisé au sein de 5 quadrats élémentaires placés de façon précise. En plus, un relevé complémentaire est réalisé, en présence/absence, à l’échelle du quadrat de fréquence pour noter les espèces non contactées dans les 5 quadrats élémentaires. Cette méthode présente l’avantage de pouvoir s’abstenir d’une estimation des coefficients de recouvrement, une variable sujette au biais d’interprétation des données engendré par la diversité des observateurs et empêchant la détection de changements subtils dans la composition floristique du tapis végétal étudié.
Pour conserver une vision physionomique du site, et aider dans l’interprétation des données et dans la relocalisation des dispositifs, des photos avec prises de vue du départ, de l’arrivée et si possible de l’ensemble du transect sont réalisées, ainsi que pour chaque communauté observée. En plus, des photos de chaque quadrat, dans l’ordre de lecture, doivent être prises.
La détermination des espèces végétales non-identifiées peut s’effectuer directement sur le terrain à l’aide d’une flore et d’une loupe (x10 minimum). Dans le cas de critères délicats à appréhender in situ, l’identification se fera ultérieurement en laboratoire, avec un matériel adéquat (loupe binoculaire, microscope…), sur des échantillons prélevés si possible hors de la zone d’étude. Concernant les espèces rares ou protégées, la détermination devra se faire autant que possible sur photos ou in situ sans prélèvement.
Pour l’étude des étangs arrières-littoraux, le champ d’investigation taxonomique concerne les spermatophytes et ptéridophytes mais aussi les sphaignes, les autres bryophytes et lichens sont exclus car trop complexes à appréhender. Le référentiel taxonomique suivi est la version la plus récente de TaxRef (actuellement version 9, ).
Les flores utilisées sont diverses :
– Flora Gallica ,
– Flore de Dordogne ,
– Flore du Pays Basque et des régions limitrophes ,
– Flore descriptive et illustrée de la France, de la Corse et des contrées limitrophes (Tomes 1 à 3) ,
– Les fougères et plantes alliées de France et d’Europe occidentale ,
– Handbook of European Sphagna ,
– Mosses and liverworts of Britain and Ireland ,
– Flore de France méditerranéenne continentale .
Le référentiel syntaxonomique des végétations utilisé est celui du CBNSA, version du 19/09/2017 .
Pour la mise en place et la lecture des végétations rivulaires des étangs arrière-littoraux, le matériel requis est le suivant :
– 2 piquets en bois imputrescible (ex : robinier) ;
– piquets en bois fin (6 minimum) ;
– cordes tressées ou rubalise (150 m minimum) ;
– quadrat élémentaire de 1 m² ;
– décamètre(s) (50 m) ;
– appareil GPS (GPS submétrique si possible) ;
– masse et marteau ;
– aquascope ;
– appareil photo ;
– scie égoïne ;
– poches et flacons pour prélèvements des échantillons.
7.4 Période optimale de suivi
Les végétations des rives d’étangs connaissent leur optimum phénologique assez tardivement entre début août et fin septembre ; c’est-à-dire la période durant laquelle la majorité du cortège floristique est en floraison. Afin de noter et pouvoir identifier le maximum d’espèces, les inventaires et suivis doivent s’effectuer durant cette période . En cas d’année particulièrement sèche avec des précipitations faibles durant l’hiver et le printemps précédent, une lecture dès le mois de juillet est envisageable.
7.5 Nombre de campagnes de relevés
Une seule campagne de relevés est réalisée pour chaque année de suivi. En effet, la quasi-totalité du cortège floristique des rives d’étangs étant observable dans le cas d’une lecture pendant la période phénologique optimale, la réalisation de plusieurs campagnes n’offre qu’un intérêt limité.
Comme pour les lagunes, les végétations des rives d’étangs et leur agencement résultent d’un blocage dynamique dû à la période d’immersion prolongée ; par définition, elles sont donc très peu dynamiques en absence de perturbations d’origine anthropiques directes (marnage important, eutrophisation). Néanmoins, elles peuvent être impactées en cas d’aléas climatiques extrêmes (forte sécheresse, canicule…) répétés plusieurs années de suite. Pour ces raisons, le délai entre chaque campagne de suivis est fixé à 3 ans. En fonction des premières analyses et retours d’expérience, ce délai pourra être rehaussé. En effet, les impacts du changement climatique sur ces milieux intervenant à une échelle de temps bien plus large, des suivis trop rapprochés ont peu d’intérêt.
7.6 Fiche de relevés
Pour le suivi des communautés rivulaires d’étangs, une fiche de relevés par transect sera élaborée. Elle se basera sur la fiche conçue en 2012 pour le suivi de ces communautés, modifiée et ajustée en fonction des ajustements du protocole.